Autorisations sanitaires : nouvelles censures des erreurs de l’Administration

Auteur(s)
Jonathan Quadéri
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Dans une précédente Lettre du Cabinet (décembre 2011), nous vous avions informés que, par jugements du 20 septembre 2011, le Tribunal administratif de Montreuil avait (pour la première fois en France sur ce fondement) annulé quatre délibérations de juillet 2009 de la Commission exécutive de l’ARH d’Ile-de-France, rendues en matière d’activité de soins de traitement du cancer, par lesquelles il avait été, d’une part, écarté les demandes d’autorisation de trois cliniques et, d’autre part, fait droit à celle présentée par l’hôpital concurrent.

D’un point de vue d’ensemble, il en résultait que, lorsque le nombre d’interventions effectuées par les praticiens d’un établissement se situe, en moyenne et sur trois ans, au-dessus du seuil réglementaire fixé par l’arrêté du 29 mars 2007, l’autorité de tutelle est tenue, de ce chef, de délivrer le droit d’exercer cette discipline. A l’inverse, et dans le cadre des premières fenêtres de dépôt ouvertes après la publication des nouveaux volets « Traitement du cancer » des SROS 3, la circonstance que le seuil dont s’agit n’était pas atteint ne dispensait pas l’Agence d’étudier le dossier d’un promoteur, aux fins, le cas échéant, de lui accorder une autorisation dérogatoire.

Aujourd’hui, l’une des trois cliniques précitées a obtenu, de l’ARS et sur injonction du juge, l’autorisation convoitée et l’hôpital a depuis quelque mois cessé toute prise en charge carcinologique gynécologique. En revanche, il a été sursis à statuer sur le sort de l’activité des deux autres structures privées, car, en fin d’année 2011, le Ministre de la Santé a cru bon devoir frapper d’appel les jugements qui les avaient concernées.

La réponse de la Cour administrative d’appel de Versailles n’a pas tardé (arrêts nos 11VE03753 et 11VE03754 du 31 mai 2012) et, au terme de seulement six mois d’instruction, le Ministre a vu ses recours rejetés et l’Etat condamné à 2 000 € dans chaque instance, au titre des frais de justice.

Les premiers juges avaient donc bien, d’emblée et contrairement à l’Administration, correctement appliqué la règle de droit et il est désormais clair que, ne disposant d’aucune autorisation de soins de traitement du cancer par chirurgie avant la publication du volet du SROS 3 y afférent, « la clinique devait voir sa demande examinée dans le cadre du régime dérogatoire prévu au deuxième alinéa de l’article R. 6123-89 du code de la santé publique ».

La solution retenue dans ces arrêts a très vite trouvé écho puisque, à la lecture d’un nouveau jugement favorable obtenu par notre Cabinet, du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, du 12 juin 2012 (n° 1105109), les magistrats s’en sont assurément inspirés pour faire droit à la requête de la société intéressée par l’annulation d’un arrêté d’autorisation édicté en matière de radiothérapie externe au profit d’un établissement public de santé. En effet, il a été jugé que, « dès lors [qu’une] autorisation [lui avait été] accordée […] dans le cadre du dispositif transitoire prévu à l’article 3 du décret du 21 mars 2007, [la seconde] autorisation accordée par le Directeur général de [l’ARS] ne pouvait être légalement regardée comme une « première autorisation » permettant un examen dans le cadre dérogatoire prévu au deuxième alinéa de l’article R. 6123-89 précité ». Le seuil d’activité réglementaire « n’étant pas atteint par le Centre Hospitalier […], ni pour chacune des années 2008 […], 2009 […] et 2010, ni en moyenne sur ces trois années, […] le Directeur général de l’Agence […] était tenu de rejeter [sa] demande ». En opérant la distinction « moyenne d’activité/année d’activité », la juridiction cergyssoise a tenu compte de la jurisprudence précédemment dégagée par la Cour administrative d’appel de Lyon, dans ses arrêts du 22 mars 2012 (nos 11LY00664 et 11LY00687).

Certains errements ou difficultés de compréhension relatifs au droit des autorisations sanitaires soumises à une condition de seuil apparaissent ainsi en voie d’être évités ou levées à l’échelle du territoire. Pour autant, le contentieux existant en la matière n’est pas prêt de se tarir, au vu des mesures contenues dans le volet hospitalier des SROS-PRS déjà parus.

Source
La lettre du Cabinet - Septembre 2012