Base de données - Astreinte

L'astreinte ne repose pas
Isabelle Lucas-Baloup

La chambre sociale de la Cour de cassation (arrêt 10 juillet 2002) vient de le rappeler : les périodes " d'astreintes ", si elles ne constituent pas un temps de travail effectif durant les périodes où le salarié n'est pas tenu d'intervenir au service de l'employeur, ne peuvent être considérées comme un temps de repos, lequel suppose que le salarié soit totalement dispensé, directement ou indirectement, sauf cas exceptionnel, d'accomplir pour son employeur une prestation de travail, même si elle n'est qu'éventuelle ou occasionnelle.
Un salarié ne bénéficie donc pas de son repos hebdomadaire lorsqu'il est " d'astreinte ".

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Octobre 2002


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Le trajet effectué à l’occasion d’une astreinte doit être comptabilisé en temps de travail effectif
(arrêts Cass. soc., 31 octobre 2007, n°s 06-43.834 et 06-43.835)
Bertrand Vorms

L’article L. 212-4 du code du travail mentionne, en son alinéa 4 : « Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif […] ».
Cette disposition autorise-t-elle l’employeur à ne comptabiliser, comme temps de travail effectif lorsqu’un salarié d’astreinte est amené à se rendre sur le lieu de son travail, que la période ayant couru entre son arrivée sur place et son départ ?
La chambre sociale de la Cour de cassation a eu à trancher cette question, sur le pourvoi formé par un établissement de santé privé. Elle y a répondu par la négative dans un arrêt du 31 octobre 2007, remarquable à deux titres au moins :
En premier lieu, les dispositions précitées semblaient donner raison à l’employeur, puisque leur formulation, en termes généraux, pouvait conduire à présumer qu’elles s’appliquent à la situation objet du litige.
En second lieu, et de manière plus significative, il convient de relever que la Cour de cassation s’est prononcée sur un recours formé à l’encontre d’un arrêt d’une cour d’appel statuant comme juge d’appel d’une ordonnance de référé rendue par un conseil de prud’hommes.
On sait que le juge des référés est le juge de l’évidence et qu’il doit décliner sa compétence lorsque la question qui lui est soumise se heurte à une contestation sérieuse.
L’employeur soutenait ainsi, devant la Cour de cassation que, tant le conseil de prud’hommes que la cour d’appel, avaient excédé leurs pouvoirs en portant une appréciation sur la portée de l’article L. 212-4 alinéa 4 du code du travail en l’écartant.
Mais la Cour de cassation approuve les premiers juges. Elle fonde sa décision sur la définition légale de l’astreinte, fixée à l’article L. 212-4 bis du code du travail, prévoyant : « Une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ».
Selon cet arrêt, il résulte de ce texte que « le temps de déplacement accompli lors de périodes d’astreintes fait partie intégrante de l’intervention et constitue un temps de travail effectif ».
Il n’existait donc, selon les Hauts magistrats, aucune contestation sérieuse aux prétentions des salariés sollicitant le paiement de leur temps de trajet comme temps de travail effectif.
Cette décision ne devrait avoir aucune incidence sur la rémunération des salariés soumis à la convention collective nationale des personnels de cabinets médicaux. Elle stipule, en son article 18 dernier alinéa, que l’indemnité due au salarié d’astreinte lorsqu’il est obligé de se déplacer est égale au « double du salaire horaire de sa catégorie proportionnellement à la durée de déplacement y compris le trajet ». Rien ne change donc.
Elle viendra, en revanche, compléter le régime prévu à l’article 82.3.2 de la Convention collective de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002 (article 100 pour les cadres), lequel organise un régime de rémunération du temps de travail effectué en cours d’astreinte sur la base du double du salaire horaire du coefficient du salarié considéré, sans que cette rémunération puisse être inférieure à une heure de travail. Cette limite basse sera vraisemblablement systématiquement atteinte dès lors que le temps de trajet doit désormais être comptabilisé comme un temps de travail effectif.
Mais l’incidence de cette décision devrait surtout se faire sentir pour les médecins relevant de la Convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif, dont l’article M. 05.02.2.1 prévoit une rémunération sous forme de forfait. Il ne peut être maintenu qu’à la condition que le montant alloué à ce titre sera supérieur à celui auquel le médecin aurait pu prétendre en appliquant, à la durée de son immobilisation, depuis son départ jusqu’à son retour au domicile, le taux horaire, éventuellement majoré, qui lui est dû.

La Lettre du Cabinet - Janvier 2008


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