Base de données - Poliomyélite

Reconnaissance d’une cause étrangère par la Cour d’appel de Paris
(Arrêt du 16 novembre 2007, CA Paris, 1ère chambre section B n° 05/17960)
Isabelle Lucas-Baloup

Récemment publié mais faisant une application du droit antérieur à l’entrée en vigueur de la loi Kouchner, l’arrêt du 16 novembre 2007 de la Cour d’appel de Paris surprend en acceptant exceptionnellement l’existence d’une cause étrangère de l’infection contractée par une patiente à la suite d’une intervention chirurgicale.
Elle avait présenté une poliomyélite aigue à l’âge de six ans. Une détérioration progressive de son genou a rendu nécessaire une intervention orthopédique complexe, en 1992. Neuf jours plus tard apparaît une nécrose cutanée liée à une insuffisante vascularisation des tissus nécessitant au total 24 interventions chirurgicales ul-térieures pour obtenir une consolidation définitive.
L’expert a relevé que « l’infection était la conséquence directe, non d’une contamination directe per-opératoire telle qu’on en rencontre dans une infection nosocomiale en chirurgie, mais la réinfestation nécessaire, en quelque sorte obligatoire, d’une nécrose cutanée ouverte à la contamination extérieure, comme une brûlure est en quelque sorte, obligatoirement toujours surinfectée et qu’étant une conséquence directe de la nécrose, l’infection n’était pas de type nosocomiale ».
La Cour en a déduit qu’« il résulte de ces constatations que l’infection n’est pas liée aux soins et actes chirurgicaux réalisés mais à l’évolution obligatoire de la nécrose, survenue à l’issue de la pose de la prothèse en raison d’une insuffisante vascularisation des tissus, et ne peut donc être qualifiée de nosocomiale ; Considérant, au surplus, que même dans l’hypothèse discutée où le seul élément chronologique, constitué par l’apparition de l’infection après plusieurs inter-ventions, serait suffisant pour retenir l’origine nosocomiale de l’infection, la polyclinique établit que cette infection a été causée par la nécrose et est donc, en elle-même, extérieure à l’activité de soins de l’établissement et du Docteur P., caractérisant ainsi l’existence d’une cause étrangère exonératoire de responsabilité ».
La Cour d’appel de Paris semble, dans cette affaire, distinguer de façon très inha-bituelle l’infection liée à un acte de soins, laquelle pourrait être qualifiée de nosocomiale, et celle résultant nécessairement d’une complication de l’intervention, constituant une cause étrangère exonératoire.
Néanmoins, cette décision reste extraordinaire, la 1ère chambre section B de la Cour d’appel de Paris ayant, depuis, appliqué la jurisprudence de la Cour de cassation en jugeant notamment qu’une « infection peut être qualifiée de nosocomiale si elle survient au cours ou au décours de la prise en charge d’un patient et n’était ni présente ni en incubation au début de la prise en charge ; qu’il n’est pas contesté que l’infection est apparue à la suite de l’hospitalisation à la clinique C. et était absente lors de l’admission de M.L. » (cf. notamment CA Paris, 1ère chambre section B, 11 janvier 2008, 05/11913 et 22 février 2008).
Dans ces deux arrêts, la Cour d’appel de Paris réaffirme la notion d’infection nosocomiale et, ce faisant, la difficulté d’apporter la preuve d’une cause étrangère.

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Juillet-août 2008
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