Base de données - Présomption d'innocence

Pas de présomption d’innocence après condamnation ordinale en première instance :
(Cour de cassation, 1ère ch. civ., arrêt du 30 octobre 2013, n° 12-28.018)
Isabelle Lucas-Baloup

 

L’article 9-1 du code civil assure à chacun « le droit au respect de la présomption d’innocence ». Un chirurgien-dentiste, dans le contexte de la résiliation conflictuelle de la société civile de moyens qu’il avait contractée avec un confrère, avait adressé à plusieurs personnes du milieu médical une décision de l’Ordre des médecins prise à l’encontre de ce dernier, dont l’appel n’était pas encore jugé par la chambre disciplinaire nationale.

 

   Le médecin ainsi condamné par la chambre de première instance de son ordre avait saisi, sur le fondement de l’article 9-1, la juridiction civile afin d’obtenir des dommages-intérêts pour « violation de la présomption d’innocence » dont il se prévalait en raison de la diffusion de la décision ordinale de première instance l’ayant condamné.

 

   La Cour de cassation annule l’arrêt qui a condamné le chirurgien-dentiste à payer 3000 € de dommages-intérêts à son ancien associé médecin, en reprochant à la Cour d’appel d’Aix en Provence de n’avoir pas exposé en quoi cette décision était assimilable à une poursuite ou condamnation pénale, l’atteinte à la présomption d’innocence supposant que la personne soit publiquement présentée comme coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, ou d’une condamnation pénale. Pénale, pas ordinale.

 

   En revanche, le chirurgien-dentiste avait été condamné (avec confirmation par un arrêt de la Cour de cassation du 10 avril 2013, n° 11-28.406, 1ère ch. civ.), sous astreinte de 500 € par infraction constatée, à faire cesser l’affichage d’un jugement ayant condamné son associé médecin à une peine d’amende pour abus de confiance, en ayant supprimé le passage du jugement relatif à l’argumentation par laquelle son associé avait plaidé sa relaxe et omis l’indication que le jugement était frappé d’appel. La Cour de cassation souligne que l’atteinte portée à la présomption d’innocence est réalisée chaque fois qu’avant sa condamnation irrévocable, une personne est publiquement présentée comme nécessairement coupable des faits pénalement répréhensibles pour lesquels elle est poursuivie.

 

 
La Lettre du Cabinet - Janvier 2014


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