Base de données - Successeurs

Le droit d'usage de lits ne confère pas un droit de propriété négociable sans le contrat d'exercice
(CA Limoges, ch. civ., 8 juin 2010, n° 09/0833)
Isabelle Lucas-Baloup

Une GO, le Dr C., est titulaire d’un contrat de gynécologie-obstétrique, cessible, avec usage prioritaire de quatre lits et interdiction pour la Clinique S.-G. de laisser d’autres praticiens de la même spécialité venir exercer dans l’établissement, à l’exception de 3 nommés, qui constituent ultérieurement une SCP. Le contrat prévoit que lorsqu’elle cessera son exercice, elle peut présenter deux successeurs dans un délai de 6 mois, et, si la Clinique n’en agrée aucun, elle doit à son tour présenter au praticien 2 successeurs dans les 6 mois. Le Dr C. ne présente finalement personne à la Clinique, mais réclame le prix de cession « de ses 4 lits de gynécologie-obstétrique » que la Clinique concède après le départ du Dr C. à la SCP. Contrairement au jugement du tribunal de Brive qu’elle annule, la Cour de Limoges retient qu’il n’est pas établi que le Dr C. ait effectivement présenté deux successeurs à la Clinique S.-G. dans le délai prévu de 6 mois. « Que dès lors elle a perdu tout droit sur l’usage prioritaire de 4 lits de GO et n’est pas fondée à se plaindre de ce que cet usage prioritaire aurait été ultérieurement accordé à la SCP ». Le Dr C. affirme que c’est la SCP qui lui a demandé de ne pas céder son droit d’usage prioritaire afin de lui permettre de prendre un nouvel associé. « Que si ce fait est de nature à engager la responsabilité délictuelle de la SCP, encore faut-il que la preuve en soit rapportée car il est expressément contesté par celle-ci. […] Attendu que le silence opposé à l’affirmation d’un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait. » Le Dr C. est déclarée mal fondée et déboutée.

Gynéco-Online - Mai 2011
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Légèreté blâmable de la Clinique dans l'exercice de son refus d'agrément d'un successeur de gynécologue-obstétricien décédé
(CA Lyon, ch. civ. 1, 14 avril 2011, n° 09/03321)
Isabelle Lucas-Baloup

Un gynécologue-obstétricien titulaire à la Clinique du T. d’un contrat d’exercice libéral cessible décède. Sa succession signe avec le Dr B. un compromis de cession de patientèle civile, sous condition suspensive de son agrément par la Clinique, pour qu’il puisse y accoucher et opérer. Il commence à exercer à titre provisoire et un anesthésiste formule des réserves sur ses pratiques médicales. La commission médicale d’établissement, dont l’avis est sollicité, s’abstient et la Clinique du T. refuse son agrément au candidat à la succession du praticien décédé. La Cour rappelle que le refus d’agrément est un droit pour la Clinique et que celui qui s’en plaint supporte la charge de la preuve d’un abus. En l’espèce, il est jugé exactement : « Les conditions dans lesquelles le refus a été pris et notifié au Dr B. et l’attitude qui s’en est suivie caractérisent une légèreté blâmable et une attitude déloyale dans l’exercice du droit de refus d’agrément, la décision ayant été prise de manière inconséquente, précipitée et pouvant apparaître, comme discriminatoire à l’égard d’un médecin contre lequel s’élevaient les médecins anesthésistes de la Clinique alors que les autres, dans sa spécialité, n’avaient aucun grief à énoncer. Cette décision de refus d’agrément prise sans aucune précaution véritable quant au fond de la controverse qui devait, par la suite, se révéler sans fondement, est une décision fautive à l’égard du Dr B. qui n’a pas pu poursuivre son activité comme il le prévoyait. […] La Clinique du T. a donc commis une faute civile dans l’exercice de son droit de refuser l’agrément au Dr B. dès lors qu’elle connaissait l’étendue de la controverse entre médecins notamment parce que son directeur avait assisté à la CME qui n’est pas une commission administrative mais une commission médicale ; elle a manqué de prudence en prenant la décision de ne pas donner son agrément et de le refuser après la CME […] sans prendre la précaution d’être mieux informée sur les compétences professionnelles de ce dernier, mises en doute par les anesthésistes. » 50 000 euros de dommages-intérêts au gynécologue-obstétricien évincé abusivement.

Gynécol-Online - Mai 2011
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Perte de chance de présenter un successeur
(arrêt Cour d’appel Grenoble, 1ère ch. civ., 26 juin 2018, n° 17/03322)
Isabelle Lucas-Baloup

   Un chirurgien vasculaire, exerçant à titre libéral sans contrat écrit dans une clinique, est remercié par la direction suite à un « recentrage sur l’orthopédie et la neurochirurgie » indique l’arrêt. Il obtient de la Cour d’appel de Chambéry environ 200 000 € à titre d’indemnité compensatrice d’un délai de préavis non respecté, 100 000 € en réparation du dommage subi du fait de la perte du droit de présentation de sa patientèle et une indemnité de procédure.

   La Cour de cassation casse l’arrêt en ce qu’il a alloué une indemnité de perte de droit de présentation de patientèle et renvoie l’affaire devant la Cour de Grenoble, devant laquelle le chirurgien ne se défend pas.

   L’arrêt du 26 juin 2018 juge :

   « Le droit de présenter un successeur et de céder sa clientèle ne se présumant pas doit être expressément prévu au contrat liant les parties. En l’espèce, il n’existe aucun contrat écrit organisant les relations contractuelles des parties. » et refuse en conséquence l’indemnisation d’un tel préjudice en matière de contrat d’exercice libéral verbal.

La Lettre du Cabinet - Septembre 2018


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Perte de chance Successeurs

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Refus abusif d'agrément d'un successeur
(arrêt Cour de cassation, 2ème ch. civ., 12 avril 2018, n° 497 F-D)
Isabelle Lucas-Baloup

   Un orthopédiste exerçant à titre libéral, avec un contrat prévoyant la cessibilité de ses droits, notifie à la Clinique son départ et présente un successeur. Une clause du contrat mentionne que le candidat ne peut être refusé qu’au regard de la moralité ou des compétences professionnelles insuffisantes. La Clinique refuse son agrément au 3ème des candidats présentés par le retrayant en invoquant son « absence d’activité à titre libéral en secteur 1 ou 2 ». La Cour d’appel de Nîmes, dans un arrêt du 23 juin 2016, avait considéré « qu’en ajoutant un critère d’appréciation non prévu au contrat d’exercice libéral et en ne formulant aucun grief quant aux compétences professionnelles et aux qualités orales du candidat, la Clinique avait abusé de son droit de refus d’agrément et ainsi engagé sa responsabilité contractuelle ».

   La Clinique, condamnée à indemniser le praticien notamment au titre de la « perte du prix de cession des éléments incorporels de son cabinet d’orthopédie » diligenta un pourvoi en cassation rejeté, le 12 avril 2018, par un arrêt ainsi motivé : « S’étant fondée sur les dispositions contractuelles selon lesquelles seuls les motifs liés aux qualités morales ou aux compétences professionnelles du candidat présenté par le praticien seraient considérées comme opposables à ce dernier par la clinique, la cour d’appel a pu, sans être tenue de s’expliquer sur la procédure d’agrément, en déduire que cet établissement, qui n’avait formulé aucun grief quant aux qualités morales et aux compétences professionnelles du candidat qui lui avait été présenté, ne pouvait se prévaloir de son absence d’activité libérale antérieure pour refuser de l’agréer ».

   La Clinique disposait d’un droit mais en a abusé. L’abus de droit est réparé par de légitimes dommages-intérêts payés à l’orthopédiste retrayant qui n’a pas pu céder sa patientèle en raison du refus d’agrément fondé sur un motif non prévu au contrat d’exercice libéral.

La Lettre du Cabinet - Mai 2018


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Agrément Successeurs

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