Base de données - Droit des malades

La loi relative aux droits des malades adoptée en séance du Sénat du 19 février
Isabelle Lucas-Baloup

Bien qu'elle ne soit pas encore publiée au Journal officiel, HMH vous livre ci-après quelques extraits du texte définitivement voté. Après l'affaire Perruche, la presse nationale a surtout fait l'écho des dispositions concernant le préjudice des enfants nés handicapés. Pourtant, certains articles de cette loi, qui en compte une centaine, méritent bien des commentaires et soulèvent des problèmes juridiques qu'il faudra certainement plusieurs décrets et jurisprudences pour résoudre :

Obligation de déclaration des I.N. à l'autorité administrative compétente : art. L. 1413-14. " Tout professionnel ou établissement de santé ayant constaté ou suspecté la survenue d'un accident médical, d'une affection iatrogène, d'une infection nosocomiale ou d'un événement indésirable associé à un produit de santé doit en faire la déclaration à l'autorité administrative compétente. " Un grand nombre de CLIN étaient contrariés, après le décret du 26 juillet 2001, par les difficultés d'application du signalement obligatoire devant les carences présentées par certains des critères de définition des I.N. concernées. Vous aurez maintenant à déclarer la " suspicion " d'I.N !

Responsabilité systématique des établissements en cas d'I.N. : art. L. 1142-1. II " Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. " La loi entérine la jurisprudence de la Cour de cassation, que nous avons tant critiquée (obligation de sécurité de résultat). La seule possibilité désormais, pour un établissement, de ne pas être condamné en cas d'infection nosocomiale, est de prouver l'intervention d'une cause étrangère. Mais à ce jour aucune jurisprudence n'a reconnu le bénéfice de la cause étrangère en matière de réparation de préjudice corporel et on ne voit pas bien sur quel argument nouveau les juridictions modifieraient leurs décisions sur ce point... Les établissements seront en conséquence responsables des infections " nosocomiales ", sans aucune chance d'y échapper. Par ailleurs, la loi n'apporte aucun élément utile à la définition de la nosocomialité. Il n'y a donc pas lieu de distinguer entre l'origine endogène ou exogène. En instituant par ailleurs une automaticité de responsabilité des établissements, quid de la responsabilité des professionnels auxquels la jurisprudence faisait application de la même obligation de sécurité de résultat ?

Prescription décennale des actions en responsabilité : Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage (art. L. 1142-28). Il est ainsi mis un terme à la disparité des prescriptions administrative de 4 ans et civile de 30 ans. Les dispositions de la loi nouvelle s'appliquent immédiatement sur ce point, en tant qu'elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.

On reviendra évidemment sur le contenu de la loi nouvelle dans les prochaines rubriques, et notamment sur l'accès au dossier, les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, et sur les dispositions particulières pour l'indemnisation en cas d'hépatites B et C.
Un recours devant le Conseil constitutionnel est annoncé.

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Février 2002


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Assurance Droit des malades Hépatite C Infections nosocomiales

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