Base de données - Hôpital public

Avez-vous désigné votre correspondant de biovigilance ?
Isabelle Lucas-Baloup

Si votre établissement utilise des "éléments et produits du corps humain utilisés à des fins thérapeutiques, et des produits autres que les médicaments qui en dérivent, des dispositifs médicaux les incorporant et des produits thérapeutiques annexes", vous devez désigner votre correspondant local de biovigilance, dont la désignation et les missions sont prévues aux nouveaux articles R. 1211-40 et suivants introduits dans le code de la santé publique par le décret n° 2003-1206 du 12 décembre 2003 (sur le net au : http://www.recherche.gouv.fr) qui décrit la biovigilance, la nouvelle Commission nationale de biovigilance, le rôle de l'AFSSAPS, et les obligations de signalement et de déclaration, notamment.

La Lettre du Cabinet


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AFSSAPS Biovigilance Hôpital public

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Circulaire DGS/DHOS/E n° 645 du 29 décembre 2000 : Obligation d'alerte pour les I.N.
Isabelle Lucas-Baloup

On sait qu'une circulaire a rarement une valeur réglementaire en droit français. C'est ainsi que le Conseil d'Etat a déclaré non réglementaire la circulaire sur la stérilisation en date du 27 octobre 1997 (arrêt du Conseil d'Etat en date du 24 février 1999) ou que la Cour de cassation a relaxé les personnes poursuivies pour avoir restérilisé des dispositifs médicaux à usage unique, cette interdiction n'étant, à l'époque des faits (1994) prévue que par voie de circulaires.
Celle du 29 décembre 2000 est importante, en matière d'hygiène à l'hôpital, puisqu'elle abroge à la fois celles du 13 octobre 1988 et du 19 avril 1995, bien connues des hygiénistes.
Elle rappelle que la responsabilité des établissements de santé publics est engagée pour faute présumée et celle des établissements privés, par application du principe d'obligation de sécurité de résultat, est reconnue même en l'absence de faute.
Au titre du programme d'action, la circulaire notamment invite le CLIN à définir le rôle de chacun des acteurs.
Au titre des mesures de prévention des IN, elle engage les établissements à établir des recommandations techniques de bonnes pratiques d'hygiène (fiches techniques ou protocoles), de procéder à un état des lieux des pratiques, à l'aide d'audits ou de tout autre outil approprié, en s'aidant des " Cent recommandations pour la surveillance et la prévention des IN " publiées par le CTIN.
Au titre du programme d'action, la circulaire donne une importance particulière à la surveillance des infections nosocomiales " outil indispensable " : outre la réalisation d'une enquête de prévalence initiale portant sur l'ensemble des patients hospitalisés, il est considéré comme absolument prioritaire la mesure de l'incidence des infections du site opératoire.
L'originalité de la circulaire est essentiellement d'organiser une alerte, par avis au CLIN et à l'équipe opérationnelle d'hygiène, d'évènements " inhabituels ou sévères dont l'origine nosocomiale peut être suspectée ", lesquels concernent notamment : la suspicion d'épidémies, les infections dues à des micro-organismes ayant un profil inhabituel de résistance aux anti-infectieux, celles ayant une source environnementale, les infections particulièrement graves (profondes sur prothèses articulaires ou cardiovasculaires) ainsi que les infections suspectées d'avoir entraîné un décès.
D'autres chapitres concernent la formation des professionnels et leur information, celle des patients, l'évaluation du programme d'action de lutte contre les infections nosocomiales, l'équipe opérationnelle d'hygiène hospitalière, les correspondants en hygiène et enfin les actions de coopération.
Le texte intégral de cette circulaire est disponible sur le site web ouvert par la direction des vigilances de l'AP-HP : http://coviris.ap-hp.fr

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Mai 2001
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Complications d’une cure d’hypertrophie mammaire : l’hôpital n’est pas responsable, même sans information complète sur les risques
(Cour adm. d’appel de Lyon, 6ème ch., arrêt du 3 novembre 2009, n° 08LY00799)
Isabelle Lucas-Baloup

Intéressant arrêt en ce qu’il rappelle successivement quelques principes jurisprudentiels régulièrement mis en œuvre à l’hôpital public, à partir de la demande d’une patiente atteinte d’une hypertrophie mammaire bilatérale sur mastose fibro-kystique, qui, sur le conseil de son gynécologue et après consultation de plusieurs médecins, a décidé de recourir à une cure d’hypertrophie mammaire avec résection des zones de mastose, qui a notamment permis de vérifier l’absence de toute lésion suspecte de malignité ; l’intervention a été conduite dans les règles de l’art, mais les experts ont constaté une complication connue : hématome bilatéral prédominant du coté droit, qui a été correctement gérée de telle sorte que les mastodynies ont presque entièrement disparu. L’arrêt juge en conséquence qu’il n’existe aucune faute dans le suivi des soins et l’administration du service hospitalier et déboute la patiente en rappelant notamment :
- qu’il n’existe pas en cette matière d’obligation de résultat et que le CHU de Grenoble n’a pas engagé sa responsabilité du seul fait qu’une complication soit intervenue ;
- qu’un chirurgien n’est pas tenu de réaliser des clichés photographiques avant/après l’opération ;
- que, lorsque l’acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l’art, comporte des risques connus de décès ou d’invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que toutefois la faute commise par les praticiens de l’hôpital en n’assurant pas une information complète du patient n’entraîne pour celui-ci que la perte d’une chance de se soustraire au risque qui s’est réalisé ; que la réparation du dommage en résultant doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice subis, compte tenu du rapprochement entre, d’une part, les risques inhérents à l’intervention et, d’autre part, les risques en cas de renoncement à ce traitement ; que, si l’expert a relevé que la patiente avait consulté plusieurs médecins, et notamment discuté avec le praticien qui l’a opérée, le CHU de Grenoble n’établit pas pour autant qu’une information sur les risques de complication lui aurait alors été fournie ; que, toutefois, alors que, d’une part, l’opération se justifiait par l’état de la patiente et n’était pas, contrairement à ce qu’il est allégué, purement esthétique, et que, d’autre part, la complication qui est survenue n’était pas sérieuse et pouvait être prise en charge de telle sorte que son état soit amélioré et que les séquelles soient extrêmement limitées, la patiente ne peut être regardée comme ayant perdu une chance de se soustraire au risque qui s’est réalisé si elle avait reçu une information complète ;
La patiente doit donc être entièrement déboutée de ses demandes contre l’hôpital.

La Lettre du Cabinet - Décembre 2009
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Fugue et décès d'un patient : une affaire de circonstance
(Cour adm. d’appel de Nancy, arrêt du 12 novembre 2009, n° 08NC00590)
Eglantine Lhermitte

Une patiente majeure, en hospitalisation libre depuis le 30 décembre 2003, fugue du Centre Hospitalier le 29 juillet 2004 et décède. Ses parents et sœurs attaquent l'Hôpital pour faute, estimant la surveillance insuffisante et considérant que l'Hôpital n'avait pas fait preuve de diligence pour retrouver la patiente.
La Cour retient, en premier lieu, que la patiente ne présentait pas de tendances suicidaires, ni de symptôme dépressif. En second lieu, elle ne manifestait aucun comportement particulier nécessitant le renforcement de la surveillance, même si elle avait montré, les jours précédant sa fugue, une agressivité dont elle était coutumière. Enfin, bien que la patiente avait déjà fugué précédemment trois fois, il n'y avait pas lieu de mettre en œuvre une surveillance constante.
En conséquence, la Cour retient l'absence de faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier.
Sur le second grief, la Cour relève que la patiente est partie vers 10h30 et son absence découverte à 11h30. Des recherches ont immédiatement été effectuées au sein de l'établissement et dans les villages situés à proximité dès la disparition constatée. Lorsqu'un signalement a indiqué la présence de la patiente dans un port, deux agents de l'hôpital se sont rendus sur les lieux pour poursuivre les recherches. Le délai après lequel a été découverte l'absence de la victime, tout comme le temps consacré aux démarches entreprises pour la retrouver, ne peuvent dès lors être constitutifs d'une faute de nature à engager le Centre Hospitalier.
La Cour annule le jugement du Tribunal administratif et rejette la demande des parents et sœurs de la victime.

La Lettre du Cabinet - Décembre 2009
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Hôpital sans tabac : directeur condamné
Isabelle Lucas-Baloup

Il a été reproché au directeur de l'Hôpital Perray Vaucluse (établissement de soins psychiatriques, Essonne) "l'absence de signalisation de l'interdiction de fumer dans un lieu public couvert et clos" (art. R. 355-28-13 alinéa 2 et suivants du code de la santé publique) et une association pour la défense des non fumeurs s'était constituée partie civile. L'article R. 355-28-13 qui a fondé la condamnation prévoit :
" Sera puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 3ème classe quiconque aura fumé dans l'un des lieux visés à l'article 1er du présent décret, hors d'un emplacement mis à la disposition des fumeurs.
Sera puni de l'amende prévue pour les contravention de la 5ème classe :
a) Quiconque aura réservé aux fumeurs des emplacements non conformes aux dispositions du présent chapitre et de l'article 74-I du décret du 22 mars 1942 modifié sur la police, la sûreté et l'exploitation des voies ferrées d'intérêt général local ;
b) Quiconque n'aura pas respecté les normes de ventilation prévues par l'article 3 du présent décret ;
c) Quiconque n'aura pas mis en place la signalisation prévue à l'article R. 355-28-6 ".
Le Tribunal de police de Longjumeau a condamné ce directeur, aujourd'hui à la retraite, par jugement du 6 octobre 2003, à 1 000 € d'amende avec sursis et l'a relaxé pour deux autres infractions : " la mise à la disposition des fumeurs d'un emplacement non conforme aux normes de ventilation " et " l'aménagement irrégulier d'un emplacement réservé aux fumeurs ". L'association a reçu 1 € de dommages et intérêts.
Fumer nuit gravement à la santé. Mal signaler qu'il est interdit de fumer nuit gravement aux directeurs hospitaliers.

Le Quotidien du Médecin - Octobre 2003


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Directeur hospitalier Hôpital public

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L'amnistie à l'hôpital
Isabelle Lucas-Baloup

Les soignants qui n'avaient pas complètement la conscience (judiciaire) tranquille, pendant cet été pluvieux, n'ont pas manqué la lecture du Journal Officiel du 9 août publiant la loi d'amnistie n° 2002-1062 du 6 août, applicable aux faits antérieurs au 17 mai 2002.

Contrairement aux automobilistes et aux responsables politiques, les personnels médicaux, paramédicaux, techniques et autres, susceptibles d'avoir commis à l'hôpital, public ou privé, l'élément matériel et parfois même intentionnel, d'un certain nombre de délits, n'ont pas fait l'objet d'une campagne d'opinion défavorable à une " pratique perverse ", conduisant à " l'incivisme " et contraire à " la tolérance zéro " annoncée par le nouveau gouvernement.

Les peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois sans sursis sont amnistiées, ainsi que celles inférieures ou égales à six mois avec application du sursis simple.

Ainsi, le médecin condamné à quatre mois avec sursis pour omission de porter secours ou le directeur d'établissement poursuivi pour complicité d'homicide par imprudence, lorsqu'il n'aura pas organisé une permanence médicale suffisante, en bénéficieront. Les peines sanctionnant de tels délits dépassent rarement six mois avec sursis simple si l'auteur n'est pas récidiviste.

Les sanctions disciplinaires ou professionnelles sont quant à elles amnistiées si les faits ont été commis avant le 17 mai 2002, sauf s'ils constituent des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs, ce que déterminent par exemple les Ordres des médecins, des chirurgiens dentistes, des sages-femmes, en fonction de la nature des comportements poursuivis.

Est amnistié, en raison de la nature de l'infraction, le délit d'exercice illégal de la médecine commis à l'occasion de la pratique d'une activité d'ostéopathie ou de chiropraxie, dans certaines conditions, mais pas les autres cas d'exercice illégal d'une profession réglementée (médecin, pharmacien, sage-femme, chirurgien dentiste, infirmier(ière) diplômé d'Etat et autres). Attention donc aux aides-soignants qui pratiquent des actes réservés au monopole des IDE lorsque les effectifs sont insuffisants !

Sont aussi exclus du bénéfice de l'amnistie les actes de discrimination et les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'un mineur de 15 ans, ou d'une personne particulièrement vulnérable, qui peut être un malade.

La corruption et le trafic d'influence ne sont pas amnistiés, même s'ils ont eu lieu à l'hôpital (par exemple, intervention pour favoriser le choix d'un fournisseur, en infraction avec le code des marchés publics) ; de même, l'abus de confiance (détournement partiel de la trésorerie d'une association loi 1901 par exemple).

Ne sont pas amnistiés non plus les infractions d'atteinte à l'exercice du droit syndical. 

Les délits d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse et d'interruption illégale de grossesse ne sont pas non plus pardonnés.

Enfin, si un chef de service ne sera pas amnistié pour avoir harcelé sexuellement et/ou moralement un inférieur hiérarchique, le délit de diffamation par voie de presse publique auquel il aura pu se livrer à l'encontre d'un confrère, de son directeur ou de celui de l'A.R.H. sera définitivement effacé.

Si vous avez, avant le 17 mai 2002, commis un acte de délinquance a priori non amnistié, il vous reste à solliciter, dans l'année, du Président de la République, une amnistie " par mesure individuelle ", en plaidant, par exemple, le sixième cas d'ouverture prévu par la loi : s'être distingué d'une manière exceptionnelle dans le domaine humanitaire, culturel, sportif, scientifique ou économique…

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier (HMH)
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Pas de libre choix du médecin à l’hôpital public (Cour adm. d’appel de Paris, 8ème ch., 27 mai 2013, n° 12PA01842)
Isabelle Lucas-Baloup

 

Un myopathe reproche à l’AP-HP de n’avoir pu, en temps utile et avant l’aggravation de son état, entrer en contact avec le neurologue qui le suivait habituellement à l’institut de myologie de La Pitié Salpêtrière, dont le secrétariat ne proposait aucun rendez-vous avant quatre mois.

 

La juridiction administrative déboute le demandeur en rappelant que « les patients d’un établissement public de santé ne sont placés dans une situation contractuelle ni avec cet établissement ni a fortiori avec un praticien dudit établissement, sauf à ce que celui-ci exerce pour partie en secteur privé. Ils ne sont donc pas en droit d’exiger qu’un médecin plutôt qu’un autre les prenne en charge. »

 

 
La Lettre du Cabinet - Janvier 2014


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Hôpital public Libre choix

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Port du voile à l'hôpital
Isabelle Lucas-Baloup

Par arrêt du 24 octobre 2003, le Conseil d'Etat a jugé : "le port du voile ou du foulard, par lequel les femmes de confession musulmane peuvent entendre manifester leurs convictions religieuses, peut faire l'objet de restrictions notamment dans l'intérêt de l'ordre public".

Le 8 juillet précédent, le Tribunal administratif de Lyon, dans un autre dossier, avait confirmé une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un fonctionnaire en considérant que le fait, pour elle, "de refuser d'obéir aux injonctions réitérées de sa hiérarchie et de transgresser délibérément, par le port d'un vêtement exprimant de manière ostentatoire dans le service sa dévotion à un culte particulier, le principe constitutionnel de laïcité de l'Etat, constitue une faute d'une particulière gravité, autorisant l'administration à mettre en œuvre, sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation, les dispositions de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983", laquelle permet la suspension à titre conservatoire.
A l'hôpital : le port du masque : oui ; le port du voile : attention !

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Décembre 2003


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Hôpital public Port du voile

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Président de CLIN / président de CME : la fin du mandat
Isabelle Lucas-Baloup

Les choses de la vie (hospitalière) ne sont pas toujours aussi simples qu'elles le pourraient et, régulièrement, je suis interrogée sur l'interruption et/ou le renouvellement, en un mot les limites dans le temps, de la durée du mandat du président du Comité de lutte contre les infections nosocomiales lorsqu'il est en même temps président de la CME.

Obligatoirement un praticien hospitalier, le président de CLIN cesse son mandat, par application des articles R. 711-1-4 et 5, issus du décret n° 99-1034 du 6 décembre 1999, en même temps que prennent fin les fonctions au titre desquelles il a été désigné.
La durée du mandat est de quatre ans, renouvelable. Le décret ne prévoit pas que la présidence du CLIN est modifiée, en même temps, que celle de la CME.

S'il n'est pas le président de la CME, le président du CLIN le demeure pendant les quatre années qui suivent sa nomination, tant que perdurent les fonctions au titre desquelles il a été désigné, par exemples : médecin biologiste de l'établissement, responsable de l'équipe opérationnelle d'hygiène, DIM, médecin responsable de la médecine du travail dans l'établissement, pharmacien etc., et ce même si, entre temps, la présidence de la CME a changé.

Si, en revanche, c'est le président de la CME qui a été élu président du CLIN parmi les membres de celui-ci, et que la CME suivante ne le renouvelle pas comme président de CME, il perd la " fonction au titre de laquelle il a été désigné ".

On doit également envisager le cas où le président du CLIN n'est pas le président de la CME mais son représentant. Le nouveau président de la CME peut désigner un autre représentant, cette désignation valant révocation de la précédente. Aucune jurisprudence n'existe, à ma connaissance, ayant statué sur la caducité de plein droit de la désignation du représentant du président de la CME dans l'hypothèse d'un changement de ce dernier.

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Juin 2003


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CLIN Hôpital public Président de C.L.I.N. Président de C.M.E.

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Quitter l’hôpital public pour le secteur privé : une liberté sous contrôle
Anne Boyer
Crise de confiance de l’hôpital, accroissement continu des tâches administratives, manque de moyens et contraintes budgétaires, gardes à répétition, recherche d’une meilleure rémunération, etc. : autant de raisons qui peuvent expliquer qu’un médecin décide de délaisser l’hôpital public pour le secteur privé.
S’il existe une liberté de choix du praticien entre exercice public ou privé, cette liberté est relative car très encadrée. Ce passage est parfois un « parcours du combattant », la direction de l’établissement ayant les moyens de retenir l’intéressé.
Afin de quitter le service public hospitalier pour intégrer, définitivement ou non, le secteur libéral, deux options sont possibles : être placé en disponibilité pour convenances personnelles ou démissionner. Il convient de bien comprendre les enjeux d’une telle décision et d’en appréhender les conséquences sur le nouveau « statut » du médecin devenu libéral.
La disponibilité pour convenances personnelles
En premier lieu, le praticien hospitalier (PH) - pour quitter l’hôpital - peut demander que lui soit accordée une disponibilité pour convenances personnelles.

Définition
Rappelons tout d’abord que la disponibilité est la position administrative d’un agent qui quitte temporairement son administration d’origine et a vocation à la retrouver à l’issue de la disponibilité.
Cette position est réglementée par les articles R. 6152-62 à R. 6152-69 du code de la santé publique (CSP) pour les praticiens hospitaliers temps plein et les articles R. 6152-242 à R. 6152-246 du CSP pour les PH temps partiel.
Demande
Pour y être admis, tout PH doit :
avoir validé sa période probatoire (nomination à titre permanent),
prendre l’attache de son directeur d’établissement préalablement à toute demande afin de l’en informer et de s’entendre sur une date de départ,
adresser au directeur général du Centre national de gestion (CNG) sa demande sous couvert du directeur de l’établissement.
Effets, durée
Le PH en disponibilité cesse de bénéficier des émoluments fixés au 1° des articles R. 6152-23 et R. 6152-220 du CSP, ainsi que de ses droits à avancement.
Pour le reste, il n’est plus soumis aux règles posées par son statut.
La durée de la disponibilité pour convenances personnelles varie selon que le praticien exerce à temps plein ou à temps partiel :
Pour les PH temps plein : 3 ans maximum renouvelables pour la même durée dans la limite d’une durée de 10 années pour l’ensemble de la carrière du praticien,
Pour les PH temps partiel : la durée ne peut excéder un an renouvelable pour la même durée dans une limite de 10 ans sur l’ensemble de la carrière.
Une disponibilité conditionnée
La difficulté vient du fait que les articles R. 6152-245 et -246 du CSP prévoient que la disponibilité pour convenances personnelles (comme tous les cas de disponibilité accordés sous réserve des nécessités de service fixés au point II de l’article R. 6152-245 du CSP) n’est pas de droit et peut être accordée par la Directrice générale du CNG après avis du Président de la Commission médicale d’établissement, du chef de pôle et du directeur du centre hospitalier « sous réserve des nécessités du service ». Ces avis doivent être motivés en cas de refus.
La mise en disponibilité relève ensuite du pouvoir d’appréciation de la Directrice générale du CNG en fonction de ces trois avis motivés. Si l’autorité décisionnaire n’est pas liée par ces avis locaux, il est cependant rare qu’elle ne les suive pas. En cas de refus, sa décision doit bien entendu être fondée sur une motivation détaillée.
Le risque est effectivement qu’un refus soit opposé au demandeur et justifié par le fait que son départ compromettrait le bon fonctionnement du service et mettrait en péril l’intérêt du service public hospitalier et, plus précisément, la continuité de la prise en charge de telle ou telle spécialité médicale.
Il faut bien comprendre que les « nécessités du service » sont une notion dont le juge administratif fait une appréciation très extensive et qui ne sont pas contraires à la liberté d’entreprendre parce que justifiées par l’intérêt général qui s’attache au bon fonctionnement des établissements publics de santé (CE, 3 juin 2013, nos 344595, 344622, 344623 et 344624).
De plus, la commission de déontologie de la fonction publique (ins-taurée par l’article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques) peut être saisie par le directeur de l’établissement lorsqu’un PH l’informe de son souhait d’exercer dans le privé (article L. 6152-4 du CSP instauré par la loi HPST). Si sa saisine n’est pas obligatoire pour les agents souhaitant intégrer le secteur privé, il ne faut pas cependant oublier cette possibilité offerte à l’établissement.
Solliciter une disponibilité pour convenances personnelles n’est donc pas une simple formalité dans la mesure où les textes donnent au directeur de l’établissement les moyens de contraindre le PH à rester en poste ou, au moins, à retarder son départ.
Par la suite, la réglementation impose de déclarer le poste vacant une fois seulement que la disponibilité supérieure à six mois a été accordée et prononcée par le Directeur général du CNG (article R. 6152-246 du CSP).
Renouvellement
Le PH doit, deux mois avant le terme de la disponibilité, faire part de ses intentions au CNG, de renouveler ou non la disponibilité, avec copie à son établissement d’affectation.
A défaut de manifester ses intentions à l’issue de sa disponibilité et après mise en demeure par le CNG et information des risques qu’il encourt, le PH est radié des cadres (PH à temps plein) ou licencié (PH à temps partiel).
Réintégration
Par la suite, la réintégration est de droit sur le poste précédemment occupé si la demande intervient avant l’achèvement des six mois du détachement ou de la disponibilité en cours, quelle que soit la durée initiale accordée au PH. Le praticien doit en faire la demande au moins deux mois à l’avance, simultanément au directeur de son établissement et au Directeur général du CNG.
Attention : le droit à être réintégré ne signifie pas que le PH retrouvera obligatoirement le même poste. Le juge administratif a eu l’occasion de le préciser :
« […] Ce droit ne saurait cependant faire obstacle au pouvoir général d’organisation du service dont dispose le directeur et n’implique, par ailleurs, pas l’exercice de fonctions identiques à celles précédemment exercées avant la mise en disponibilité. Ainsi, malgré la modification substantielle apportée aux conditions matérielles d’exercice des fonctions d’un praticien hospitalier en raison de la réorganisation de son ancien service, opérée dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme dite de la « nouvelle gouvernance », dans les établissements publics de santé, intervenue pendant sa disponibilité, la réintégration de ce praticien hospitalier sur son poste budgétaire et dans des fonctions correspondant à sa spécialité ne méconnaît pas ses droits » (TA Amiens, 10 mars 2011, n° 0900190).
Ce sont, là encore, les « nécessités du service » qui seront invoquées et justifieront que le PH retrouve ou non son ancien poste.
L’agent qui sollicite sa réintégration de manière anticipée ou au terme de sa disponibilité et qui se voit opposer un refus de réintégration par son administration faute de poste vacant, doit être regardé comme involontairement privé d’emploi au sens de la réglementation de l’assurance chômage. Cette situation ouvre droit à la perception d’allocations chômage (CE, 30 novembre 2002, n° 216912).

La démission
En second lieu, le PH souhaitant intégrer le secteur privé peut envisager de démissionner de l’hôpital.

Etapes
Elle se déroule en trois étapes :
le PH présente sa démission au Directeur général du CNG en respectant un préavis de 3 mois (présenter sa demande au moins 3 mois avant la date envisagée de son départ).
le CNG notifie sa décision dans un délai de 30 jours à réception de la demande (arrêté notifié au praticien demandeur ou acceptation implicite),
tout en acceptant la démission, le Directeur général du CNG peut demander au praticien de continuer d’exercer ses fonctions pendant une durée maximale de 6 mois à compter de la date de réception de la demande de démission dans l’attente du remplacement du praticien démissionnaire.
Il est donc clair que démissionner de son poste ne permettra pas toujours de quitter l’hôpital rapidement et d’intégrer le privé à la date espérée puisque la direction peut retenir le PH six mois jusqu’à son remplacement. Là encore, le pouvoir exorbitant de l’administration s’explique par la satisfaction de l’intérêt général et la continuité du service public hospitalier.
Saisine facultative de la Commission de déontologie
Par ailleurs, les articles L. 6152-5-1 et R. 6152-97 du CSP prévoient que la Commission de déontologie est compétente pour se prononcer sur la situation des PH démissionnaires au même titre que tout agent public qui envisage d’exercer une activité dans le secteur privé et dans le secteur public concurrentiel.
La Commission de déontologie peut rendre un avis sur la compatibilité de l'activité que se propose d'exercer le démissionnaire dans le privé avec les fonctions précédemment exercées, et ce afin d'éviter que l’activité envisagée par le praticien constitue une prise illégale d’intérêt ou qu’elle soit de nature à porter « atteinte à la dignité des fonctions précédemment exercées » ou tout « risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service ».
Si sa saisine - dans les deux ans suivant la démission - est facultative, il ne faut pas négliger la possibilité qu’a la Commission de déontologie d’émettre un avis d’incompatibilité empêchant le PH démissionnaire d’exercer une activité privée si le bon fonctionnement du service et l’offre de soins publique s’en trouvent, selon elle, entachés (exemple : interdiction d’exercer pendant trois ans dans une clinique de la même commune, Avis n° 11A0457 du 16 mars 2011). Il faut bien comprendre que les avis d’incompatibilité lient la décision de l’administration, contrairement aux avis de comptabilité qui laissent le choix de la décision à l’administration.
En conséquence, une décision qui doit être réfléchie et des risques bien évalués.
Démissionner est évidemment une décision définitive qui empêche tout retour au secteur public, contrairement à une mise en disponibilité. Une telle option présente donc un risque qu’il faut bien évaluer.
Ainsi et en l’état actuel du droit, il est clair que le statut de PH lie ce dernier à l’hôpital pour une durée parfois méconnue, la réglementation permettant effectivement à l’établissement de le retenir, soit en avançant le motif général des « nécessités du service » dans le cadre de la demande de mise en disponibilité, soit en retardant son départ de peut-être sept mois en cas de démission.
Enfin, une fois que le praticien a pesé le pour et le contre des options offertes à lui pour quitter le public et que l’une ou l’autre a été validée par son administration d’affectation ou d’origine, son installation dans le secteur privé est libre.
S’il est en position de disponibilité, le PH n’est plus soumis aux règles imposées par son statut. Il est donc libéré de toute sujétion administrative.
NB : les décrets d’application sur une éventuelle clause de non-concurrence des praticiens souhaitant intégrer le privé n’ont jamais été publiés depuis leur annonce par la loi HPST de juillet 2009, en se fondant sur l’évidente liberté d’entreprendre.
Pour conclure, en fin de carrière, le PH ayant exercé à la fois en public et en privé percevra la somme des pensions pour lesquelles il a accumulé des droits dans les différents régimes de base et complémentaires auxquels il a été affilié, chacun des deux régimes prenant en considération le nombre de trimestres validés chez lui pour évaluer le montant de la retraite. Notons que, pour avoir droit à une pension de la fonction publique, il faut y avoir travaillé au minimum deux ans (quinze ans avant la réforme de 2010). En-dessous de cette durée, l’ex-administration est tenue de procéder au rétablissement de ces deux années au régime général d’assurance vieillesse de la sécurité sociale.


Voir tableau dans La Lettre du Cabinet - Septembre 2015La Lettre du Cabinet - Septembre 2015


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Hôpital public Liberté Praticien hospitalier Secteur privé

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Secteur privé à l’hôpital public : détermination du juge pour trancher le litige
(Tribunal des conflits, 31 mars 2008, n° 08-03616, CH de Voiron)
Bertrand Vorms

Quel est le Tribunal compétent pour statuer sur une demande d’indemnisation d’un patient désireux d’obtenir l’indemnisation des préjudices qu’il a subis à la suite d’une intervention chirurgicale pratiquée par un médecin hospitalier dans le cadre de son secteur privé à l’hôpital public ?
On sait que les juridictions en France, hors système répressif, se répartissent selon deux grandes familles, celle de l’ordre judiciaire (principalement tribunal de grande instance, cour d’appel, Cour de cassation), et celle de l’ordre administratif (tribunal administratif, cour administrative d’appel, Conseil d’Etat). Leur compétence est exclusive l’une de l’autre, de sorte que la saisine irrégulière d’un tribunal de l’un des deux ordres conduit à ce qu’il décline sa compétence au profit de l’autre.
En principe, un patient accueilli au sein d’un établissement public, pris en charge par un praticien hospitalier et recevant les soins des agents de cet établissement, ne peut, s’il est victime de dommages, s’adresser qu’aux juridictions administratives.
Dans l’espèce qui nous intéresse, le chirurgien étant intervenu, de manière régulière, dans le cadre de son « secteur privé » et l’analyse des faits conduisait au constat d’une absence de manquement à l’occasion de l’intervention chirurgicale, les fautes résultant d’un défaut d’information altérant le consentement éclairé, de l’indication opératoire et de défaillances dans le suivi postopératoire.
Sur ce constat, le tribunal de grande instance de Grenoble, saisi en premier, a rejeté la demande présentée par le patient et l’a invité à se pourvoir devant le tribunal administratif lequel, six mois plus tard, l’en a également débouté en considérant, implicitement, qu’il appartenait aux juridictions civiles de trancher le litige.
C’est dans ces conditions que le Tribunal des conflits, qui regroupe des magistrats de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat, a statué, par arrêt du 31 mars 2008, et a considéré : « Que les actes accomplis par les médecins, chirurgiens et spécialistes au profit des malades hospitalisés dans le service privé d’un hôpital public le sont en dehors de l’exercice des fonctions hospitalières ; que les rapports qui s’établissent entre les malades admis dans ces conditions et les praticiens relèvent du droit privé ; que si l’hôpital peut être rendu responsable des dommages subis par de tels malades lorsqu’ils ont pour cause un mauvais fonctionnement résultant soit d’une mauvaise installation des locaux, soit d’un matériel défectueux, soit d’une faute commise par un membre du personnel auxiliaire de l’hôpital mis à la disposition des médecins, chirurgiens et spécialistes, ceux-ci doivent répondre des dommages causés par leurs propres manquements dans les conditions du droit privé ; qu’il n’appartient qu’à la juridiction judiciaire de connaître d’une action dirigée à leur encontre ; que c’est à tort que le tribunal de grande instance de Grenoble s’est déclaré incompétent pour en connaître. »
Il a alors annulé le jugement de cette juridiction en ce qu’elle s’était déclarée incompétente pour statuer sur des fautes pré et post-opératoires imputées au chirurgien, pour lesquelles elle avait estimé que, n’étant pas détachables du service, elles devaient être examinées par le tribunal administratif.
On doit en conclure que, lorsqu’un patient entre à l’hôpital par la filière de recrutement privé d’un praticien hospitalier il relève du droit privé, à l’exclusion, éventuellement, de la possibilité d’engager la responsabilité de l’établissement public si une faute lui est directement imputable du fait de ses locaux, de ses matériels, ou de ses personnels paramédicaux. D’où l’importance de souscrire un contrat d’assurance de responsabilité civile professionnelle pour les praticiens hospitaliers concernés.

La Lettre du Cabinet - Juin 2009
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Un PH à l’hôpital ne peut créer une SEL pour exercer en secteur privé dans le même hôpital
(arrêts Conseil d’Etat, 3 septembre 2007, n°s 295344, 295403 et 291887)
Isabelle Lucas-Baloup

Un médecin associé ne peut exercer qu’au sein d’une seule société d’exercice libéral et ne peut cumuler cette forme de pratique avec l’exercice à titre individuel ou au sein d’une société civile professionnelle, excepté dans le cas où l’exercice de sa profession est lié à des techniques médicales nécessitant un regroupement ou un travail en équipe ou à l’acquisition d’équipements ou de matériels soumis à l’autorisation en vertu de l’article L. 6122-1 ou qui justifient des utilisations multiples, prévoit en substance l’article R. 4113-3 du code de la santé publique, posant ainsi le principe du non-cumul de l’exercice au sein d’une SEL avec un exercice à titre individuel. Jusque là tout va bien, rien de nouveau.
Mais, le Conseil d’Etat vient de juger qu’il convient de comprendre par « exercice individuel » au sens de l’article R. 4113-3 « non pas exclusivement l’exercice libéral mais également l’exercice salarié d’un médecin dans un établissement de santé ».
Dans l’espèce concernée, un chirurgien spécialiste en urologie, qui exerçait dans un CHU en qualité de praticien hospitalier, chef de service d’urologie et de néphrologie, avait décidé de constituer une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) pour pratiquer en secteur privé dans l’hôpital, conformément au contrat d’activité libérale qu’il avait conclu avec le CHU. Il constitue sa société et en demande l’inscription au tableau de l’ordre départemental qui, comme l’ordre national, la lui refuse, au motif qu’il n’a pas démontré que l’intéressé entende mettre en œuvre des techniques médicales nécessitant un regroupement ou un travail en équipe ou procéder à l’acquisition d’équipements et de matériels soumis à autorisation, alors même qu’il dispose du concours des personnels et de l’usage des équipements de l’hôpital dans lequel il exerce ; que ce faisant il ne peut cumuler l’exercice au sein d’une société d’exercice libéral avec son exercice à titre individuel, juge le Conseil d’Etat.
En revanche, si les conditions de regroupement, travail en équipe, ou matériels soumis à autorisation, sont établies, le cumul est possible dans les deux sens : SEL + exercice individuel, ou exercice individuel + SEL, contrairement à la position adoptée jusqu’à présent par l’Ordre des médecins, vient de juger le Conseil d’Etat dans un deuxième arrêt (n° 291887) du 3 septembre 2007.
Compte tenu de cette dernière jurisprudence, de nombreuses situations, qui étaient jusqu’à présent bloquées par l’Ordre des médecins, vont pouvoir évoluer notamment au profit de radiologues exerçant sur plusieurs sites.

La Lettre du Cabinet - Janvier 2008
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