Le Conseil d'Etat précise la définition de l'infection nosocomiale

Titre complément
(arrêt Conseil d'Etat, 23 mars 2018, n° 402237)
Auteur(s)
Mathilde Darricau
Contenu

   Dans un arrêt remarqué du 23 mars 2018, le Conseil d’Etat précise les contours du renversement de la présomption de responsabilité qui pèse sur les établissements de santé publics en matière d’infection nosocomiale.

   Madame C. avait été admise au service des urgences d’un centre hospitalier intercommunal en raison d’un accident vasculaire cérébral, puis transférée en réanimation pour détresse respiratoire liée à une inhalation broncho-pulmonaire et avait par la suite fait l’objet de nombreuses hospitalisations et présenté des complications de nature infectieuse.

   Ensuite de son décès, sa fille a saisi le Tribunal administratif de Rouen aux fins de voir condamner l’établissement à lui verser des indemnités en réparation des préjudices subis par sa mère au titre, notamment, des infections contractées dans le centre hospitalier. Le Tribunal a fait pour partie droit aux demandes de la requérante retenant que sa mère avait bien été victime d’une infection nosocomiale qui n’était toutefois pas à l’origine du décès mais qui avait entraîné des souffrances et un déficit fonctionnel temporaire.

   La Cour administrative d’appel de Douai, saisie par les parties, a annulé le jugement au motif que le préjudice subi par la patiente n’était pas imputable à une infection nosocomiale. Elle s’est fondée sur la circonstance que l’infection avait été provoquée par la régurgitation du liquide gastrique qui avait pénétré dans les bronches de Madame C. en raison d’un trouble de la déglutition résultant de son accident vasculaire cérébral. Dès lors, la Cour a relevé que « cet épisode infectieux, dont les hommes de l'art indiquent au demeurant qu'il aurait pu survenir de la même manière en dehors de toute hospitalisation, n'est pas en rapport, ne fût-ce que partiellement ou indirectement, avec les soins prodigués ».

   Le Conseil d’Etat a confirmé l’arrêt de la Cour administrative d’appel et a ainsi précisé la définition du caractère nosocomial de l’infection issue d’un arrêt du 21 juin 2013 (CH du Puy-en-Velay, n° 347450) laquelle devait être regardée, au sens de l’article L. 1142-1 I alinéa 2 du code de la santé publique, comme « une infection survenant au cours ou au décours d’une prise en charge et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci » à moins que la preuve d’une cause étrangère soit rapportée, c’est-à-dire d’un évènement extérieur, imprévisible et irrésistible, ce qui rendait compliquée l’exonération des établissements de leur responsabilité.

   Par l’arrêt commenté, la Haute cour administrative reprend la définition adoptée par décision du 21 juin 2013 en permettant toutefois aux établissements concernés d’établir que l’infection présente une autre origine que la prise en charge du patient pour se dégager de toute responsabilité. Concernant les établissements privés de santé, la Cour de cassation, de son côté, retient uniquement la cause étrangère comme exonératoire de responsabilité.

Source
La Lettre du Cabinet - Mai 2018