Transfert du contrat de travail (Cour de cassation, ch. soc., arrêt du 24 avril 2013, n° 11-26.388,769)

Auteur(s)
Céline Hullin
Contenu
Selon l’article L. 1224-1 du code du travail :

 

« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. »

 

La mise en œuvre de cette disposition est soumise à deux conditions :

 

- l’existence d’une entité économique autonome,

 

- le maintien de l’identité et la poursuite de l’activité de l’entité économique.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 24 avril 2013, a jugé que l’article L. 1224-1 du code du travail devait s’appliquer concernant le contrat de travail d’un chef cuisinier salarié d’une société de restauration et affecté à la cuisine d’une maison de retraite. En l’espèce, cette dernière avait résilié le contrat la liant à la société de restauration, employeur du salarié. Celle-ci avait alors informé la maison de retraite du transfert des contrats de travail de ses trois salariés travaillant sur son site, en application de l’article L. 1224-1 du code du travail. La maison de retraite n’ayant pas repris le contrat de travail de l’intéressé, ce dernier a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société de restauration. La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Nîmes du 13 septembre 2011 qui jugeait qu’il n’y avait lieu à application de l’article L. 1224-1 du code du travail aux motifs que : 

 

 « Attendu que pour mettre hors de cause la société Les Jardins de Trelis [la maison de retraite], prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X. aux torts exclusifs de la société Avenance [la société de restauration] avec effet au 10 juin 2010, condamner celle-ci à payer à Monsieur X. certaines sommes au titre de la rupture du contrat de travail et à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient que la société Avenance n’avait fourni et mis à la disposition de sa cliente, à l’exclusion des locaux et autres équipements dont cette dernière disposait, que son personnel, son savoir-faire en matière de restauration et les seuls matériels de cuisine, lessive et restauration, nécessaires à la réalisation de sa prestation, que la rupture de celle-ci ne s’est pas accompagnée du transfert d’éléments d’exploitation corporels ou incorporels significatifs et n’a pas entraîné le transfert du contrat de travail du salarié, et que la société Avenance est restée jusqu’au 9 avril 2009, date de la requête en résiliation judiciaire du contrat de travail, le seul employeur juridique du salarié ;

 

« Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que les moyens nécessaires à l’exercice de l’activité étaient mis à la disposition des prestataires successifs par le donneur d’ordre, qui en avait repris l’usage à la suite de la résiliation du marché, pour poursuivre la même activité, la Cour d’appel a violé le texte susvisé […] » (Cour de cassation, ch. soc., 24 avril 2013, n° 11-26.388, 769).

 

En effet, il ressortait des conditions générales du contrat que la maison de retraite mettait à disposition les locaux comprenant les chambres froides, les congélateurs, la cuisine, les espaces de stockage, les offices relais, la salle de restauration, ainsi que des locaux sanitaires.

 

Il demeure difficile de concilier protection du salarié et liberté contractuelle.

 

 
Source
La Lettre du Cabinet - Janvier 2014