Base de données - Loyer

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Bail professionnel, SCM c/ SCI, augmentation du loyer (non)
(Cour de cassation, 3ème ch. civ., arrêt du 28 juin 2011)
Isabelle Lucas-Baloup

Initialement les radiologues associés sont les mêmes dans la SCI propriétaire de l’immeuble et la SCM locataire. Mais tout a une fin, deux se retirent et les ennuis commencent quand la SCI décide d’augmenter le loyer. Le bail était « professionnel », article 57A de la loi 89-462, qui ne prévoit pas de modalités d’évolution du loyer. Le bail, d’une durée de neuf ans, renouvelé, contenait la clause ci-après : « Le loyer du bail renouvelé sera fixé d’un commun accord entre les parties ou à défaut à dire d’expert nommé par chacune d’elles ou désigné par le tribunal compétent à la requête de la partie la plus diligente. », que la Cour de Paris avait considéré « manquer de clarté car son modus operandi est indéterminable : expert unique choisi d’un commun accord comme le singulier le laisserait supposer, ou dualité d’experts comme la désignation distincte conduirait à le considérer, quid alors d’avis contradictoires des deux experts » ? L’orthographe, l’orthographe vous dis-je… L’arrêt ajoute : « Ensuite, le contrat n’a pas organisé une méthode de détermination du loyer. Ainsi, alors que la référence à « un expert » renvoie clairement à une appréciation technique, celle-ci ne peut avoir lieu faute de repères légaux ou contractuels. A cet égard, il sera souligné que les deux prorogations précédentes sont intervenues sans que soit appliqué l’article 18 du bail, le loyer ayant été maintenu strictement au même montant depuis l’origine (du fait de l’identité des personnes physiques contractant sous le couvert des personnes morales) et que de la sorte l’on ne peut même pas se référer à un usage antérieur susceptible de tisser des normes contractuelles. » Les juges du second degré avaient donc débouté la SCI de sa demande d’augmentation du loyer.
La Cour de cassation rejette son pourvoi en rappelant que « le juge ne peut se substituer aux parties pour fixer les modalités de la révision du loyer » et que dès lors la Cour d’appel a pu « sans commettre de déni de justice et sans méconnaître l’étendue de son pouvoir de juger, débouter la SCI de ses demandes de fixation du loyer révisé ».
Renouvellement pour neuf ans au tarif d’antan ; pour une fois que quelque chose n’augmente pas…

La Lettre du Cabinet - Septembre 2011


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Bail professionnel Loyer SCI SCM

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Contentieux entre un ophtalmologiste et une orthoptiste, rupture de bail verbal (Arrêt Cour d’appel Toulouse, 2ème chambre, 16 mars 2011, n°67, 09/0627)
Isabelle Lucas-Baloup

Après avoir exercé pendant plusieurs années, l’orthoptiste, Mme C. D., rencontrant des problèmes de santé, s’est fait remplacer dans les lieux pendant trois ans par d’autres orthoptistes, puis elle aurait annoncé à l’ophtalmologiste, le Dr D., qu’elle cessait définitivement d’exercer et souhaitait trouver un repreneur pour sa clientèle. En l’absence de remplaçante pendant plusieurs semaines, la dernière étant partie en congé maternité, le chirurgien « prend les dispositions nécessaires pour remédier au mauvais fonctionnement de son cabinet sur le plan orthoptique » et installe dans les lieux une orthoptiste nouvelle de son choix.
En l’absence de contrat écrit entre les parties, l’orthoptiste soutenait qu’il existait un bail professionnel verbal, tandis que l’ophtalmologiste évoquait un contrat de mise à disposition d’un secrétariat, de matériel professionnel et de locaux sans jouissance privative. Néanmoins la Cour relève que, dans ses courriers, le médecin évoquait bien des loyers, il versait aux débats des quittances de loyer et un document stipulant que les parties convenaient d’une « augmentation triennale du loyer d’un local professionnel ».
L’arrêt conclut en conséquence qu’il existait bien un bail conclu verbalement pour un local à usage exclusivement professionnel.
Le bail a été résilié brutalement par l’ophtalmologiste qui a installé une autre orthoptiste de son choix dans les lieux, la Cour le condamne à des dommages-intérêts à ce titre.
Le médecin est également condamné à 10 000 € de dommages-intérêts pour avoir privé l’orthoptiste évincée des lieux et remplacée par une autre, de pouvoir céder sa patientèle. 

--> Il faut maîtriser soigneusement les conditions juridiques de mise à disposition de locaux et les décisions de résiliation. La culture du « tout verbal » réserve trop souvent de mauvaises surprises aux parties. Il est difficile d’échapper à une requalification en bail professionnel d’une mise à disposition de locaux si le bénéficiaire paie « un loyer » ! Le statut des baux professionnels (article 57A, loi du 23 décembre 1986) est d’ordre public (durée minimum 6 ans, encadrement légal des conditions de résiliation)…

SAFIR - Avril 2011
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Locaux mis à disposition par la Clinique aux Médecins : bail ou pas ?
(Cour d’appel de Rouen, arrêt du 7 octobre 2010, Clinique des Ormeaux ; Cour de cassation, 3ème ch. civ., arrêt du 14 septembre 2010, Clinique du Libournais)
Isabelle Lucas-Baloup

Le sujet a généré déjà de la jurisprudence et çà continue : il convient d’être extrêmement vigilant aux mots utilisés lorsqu’un établissement de santé privé met à la disposition de médecins des locaux pour l’exercice de leur spécialité, en présence d’un contrat d’exercice libéral, écrit ou verbal.


Dans la première affaire, la redevance fixée par l’assemblée générale de la Clinique était fixée pour les actes facturés via le bordereau 615 (aujourd’hui S 3404) et prévoyait « un loyer pour la mise à disposition des locaux sans mise à disposition de personnel ».


Contrairement à ce qu’avait jugé le tribunal d’instance du Havre, il existait donc un bail verbal concernant les locaux à usage professionnel, indépendamment du contrat d’exercice libéral. La Cour de Rouen juge en conséquence que le tribunal d’instance était compétent, alors que ce dernier avait renvoyé la cause devant le tribunal de grande instance.


On connait les conséquences du bail professionnel : sa durée, son renouvellement relèvent d’un statut d’ordre public. Si la Clinique est fondée alors à facturer « un loyer » (et non une indemnité d’occupation pour la mise à disposition de locaux accessoires au contrat d’exercice libéral), en revanche elle perd sa liberté de récupérer les locaux du seul chef de la résiliation du contrat d’exercice libéral. Elle peut donc se retrouver, en attendant l’expiration de la durée en cours du bail professionnel, tenue de respecter la présence d’un médecin qui pourra continuer à consulter dans les lieux, alors que son contrat d’exercice libéral a été résilié…


Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, la situation contractuelle entre la Clinique et le médecin avait été déstabilisée par une cession du fonds de commerce de la Clinique, sans reprise des conventions d’exercice antérieurement conclues. Les Hauts magistrats confirment l’arrêt de la Cour de Bordeaux et jugent que « le praticien se trouvant maintenu dans les lieux à compter du 26 février 2002 et continuant de bénéficier de certains services, une convention locative s’était ainsi nouée entre les parties, et la Clinique, en désaccord avec sa locataire sur le montant d’un nouveau loyer, avait, en la changeant de local dans des conditions anormales, en la privant des services annexes qui lui étaient, jus-qu’à cette date, assurés et en lui notifiant, le 9 juillet 2004, d’avoir à quitter les lieux au plus tard le 1er septembre suivant, a manqué à ses obligations contractuelles et en devait réparation. » Le médecin reçoit donc des dommages-intérêts.

La Lettre du Cabinet - Décembre 2010


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Bail Clinique Locaux Loyer Redevance

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Louer du matériel défaillant n’exonère pas de payer le loyer (Cour d’appel de Reims, ch. civ., arrêt du 12 mars 2013, n° 11/01689)
Isabelle Lucas-Baloup

Siemens Lease Services conclut avec un médecin un contrat de location de 72 mois portant sur un appareil « skin station radiancy » destiné notamment à l’épilation longue durée et au photorajeunissement, moyennant un loyer mensuel de 1 156 €. Plusieurs patients du médecin se plaignent que les résultats ne sont pas concluants, le médecin décide unilatéralement, après 10 mois de location, d’interrompre le paiement des loyers. Siemens Lease Services, qui avait acquis ce matériel auprès d’un fournisseur et n’avait qu’un rôle de loueur, l’assigne en exécution du contrat qui prévoit la résiliation pour défaut de paiement avec une clause imposant une pénalité égale aux loyers dus jusqu’à l’échéance contractuelle majorés de 6 %.

Le médecin soutenait que le contrat était léonin et invoquait l’article L. 132-1 du code de la consommation sur les clauses abusives, écarté puisque non applicable entre professionnels.

 

Il est totalement débouté de ses arguments et le jugement de première instance est confirmé, la résolution du contrat de location prononcée, comme le paiement des indemnités prévues au contrat sans réduction et la restitution de l’appareil ordonnée sous astreinte de 50 € par jour de retard, conduisant au paiement d’une indemnité de privation de jouissance, avec capitalisation des intérêts et paiement des frais irrépétibles du loueur.

 

L’arrêt est conforme à la jurisprudence : le locataire ne peut se prévaloir auprès du loueur, qui n’est pas le fournisseur, de l’exception d’inexécution du contrat fondée sur le vice caché ou sur un défaut de conformité de la chose, ce qui était expressément prévu par les conditions générales du contrat.  
La Lettre du Cabinet - Janvier 2014


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Loyer Matériel défaillant

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