Transfert d’embryons : facturation légale en GHS (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 janvier 2016, n° 14BX01338)

Auteur(s)
Jonathan Quadéri
Contenu
Si le codage des tarifs de séjours hospitaliers constitue parfois, pour les établissements de santé, un exercice délicat, la circonstance que dans le cadre d’opérations de contrôle leur autorité de tutelle sanitaire, prise aujourd’hui en la personne des directeurs généraux d’agences régionales de santé, remette en cause la facturation y afférente ne signifie pas pour autant que celle-ci se trouvait erronée ni qu’une sanction pouvait leur être infligée de ce chef.
C’est ce qu’a réaffirmé récemment la Cour administrative d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 12 janvier 2016 (n° 14BX01338), au sujet de prises en charge hospitalières de patientes venues dans les services d’une Clinique pour bénéficier de techniques d’assistance médicale à la procréation, en l’espèce d’actes de transferts embryonnaires intra-utérins.
En effet, jusqu’à la publication d’un arrêté ministériel du 18 février 2013, l’acte de transfert d’embryons, objet, depuis longtemps, d’une rémunération distincte pour le praticien libéral qui l’exécute, ne trouvait toutefois pas, au bénéfice de la structure de soins qui accueillait l’intéressée, de code précis - portant cet intitulé - dans la réglementation française.
Dès lors, soit la Clinique ne demandait pas à être payée, soit, si elle considérait légitime et légal son droit à contrepartie financière pour la mise à disposition de ses locaux, personnels et équipements, valorisait cette prestation d’ensemble en utilisant le seul forfait tarifaire susceptible de s’y rapporter, dénommé « GHS 8285 » et relatif aux « affections de la CMD13 : séjours de moins de 2 jours, sans acte opératoire de la CMD13 » - « CMD13 » ayant trait à l’appareil génital féminin -.
En 2008, la Clinique dont s’agit avait fait ce choix mais s’était vue sanctionnée pour « manquements » au motif que les « conditions de facturation énoncées à l’article 6 1 10° de l’arrêté du 27 février 2007 n’étaient pas remplies ».
Trois ans plus tard, elle écopait d’une peine de plus de 75 000 €.
Ladite Clinique, se sentant injustement condamnée, a donc saisi le Juge administratif qui, pour vices de forme et selon jugement du 4 mars 2014 (TA Bordeaux, n° 1101794), a bien voulu prononcer l’annulation de cette mesure pécuniaire.
Mais l’affaire n’en est pas restée là puisque, dans la foulée, la Ministre de la Santé, intervenant en lieu et place du Directeur général de l’ARS à ce stade de la procédure, en a immédiatement interjeté appel, arguant notamment que la sanction en cause ne souffrait d’aucun défaut de motivation.
Le 12 janvier 2016, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a probablement estimé qu’il n’était pas utile de se prononcer sur ce dernier point puisque, selon elle et sur le fond, l’activité de transfert d’embryons satisfaisait bien aux trois conditions cumulatives dudit article 6 1 10° de l’arrêté précité, « autorisant la facturation d’un supplément GHS et non d’un simple forfait « sécurité et environnement hospitalier » […], dispositif qui n’a d’ailleurs été prévu pour les transferts intra-utérins d’embryons qu’en 2013 » (cf. supra).
Elle rejetait en conséquence le recours en appel de la Ministre.
Il aurait ainsi été dommage de ne pas entamer ce procès même si, il est vrai, du côté des juridictions judiciaires, et spécifiquement de la Cour de cassation (cf., par exemple, cass. civ. 2ème, 4 avril 2013, nos 12-16593 à 12-16598), compétentes sur le terrain des répétitions d’indus au regard de la facturation de ces même séjours hospitaliers pour transferts d’embryons, une telle issue n’apparaissait pas évidente.
Source
La Lettre du Cabinet - Janvier 2016