Il est extrêmement fréquent que les patients se plaignent des modalités, de la brutalité, du manque de délicatesse avec lesquels un médecin leur apprend qu'ils sont atteints d'un cancer. Cet arrêt en constitue une nouvelle manifestation, mais en l'espèce : la patiente est déboutée de sa critique.
Atteinte d'un cancer du col de l'utérus, elle estimait qu'il était la conséquence directe des comportements minimalistes et négligents de son gynécologue et du médecin ayant procédé aux analyses des frottis et des biopsies. Si les experts ont relevé que le gynécologue avait commis des négligences dans le suivi gynécologique et des maladresses dans la prescription des investigations nécessaires à l'établissement du diagnostic et l'appréciation des lésions, conduisant à proposer une attitude thérapeutique d'emblée radicale sans concertation pluridisciplinaire, ils ont conclu qu'il n'y avait pas eu de retard dans le diagnostic, un cancer invasif pouvant se développer même en cas de contrôles réguliers par frottis. Ils ont également considéré que la prise en charge de la lésion avait été conforme aux données acquises de la science.
La Cour d'appel de Paris réforme en revanche le jugement en ce qu'il avait accordé une indemnité à la patiente pour le préjudice moral subi en raison de la maladresse avec laquelle le gynécologue lui avait annoncé immédiatement une hystérectomie. L'arrêt retient que si, devant les résultats des frottis et des biopsies, la patiente a très mal vécu l'information donnée par son médecin, en raison de facteurs strictement personnels (notamment son âge de 48 ans et le fait qu'elle n'avait pas eu d'enfant), l'annonce d'une telle pathologie constitue toujours un choc pour la patiente. "L'orientation vers un chirurgien pour une hystérectomie devant l'échec d'un traitement moins radical ne peut être constitutive d'une faute, d'autant que les experts ont admis que la prise en charge de la lésion avait été conforme aux données acquises de la science".
Il n'empêche que, dans la critique des performances de certains médecins en matière de communication, les patients n'ont pas toujours tort…
Titre complément
(Arrêt du 10 novembre 2005, Cour d'appel de Paris, 1ère chambre)
Auteur(s)
Isabelle Lucas-Baloup
Contenu
Source
La Lettre du Cabinet - Décembre 2005
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