Responsabilité médicale hospitalière : demande préalable indemnitaire, devoir d’information, infection nosocomiale et hépatite C

Titre complément
(Conseil d’Etat, 16 mars 2011, n° 320734 ; 20 avril 2011, n° 336721 ; 4 mai 2011, n° 339983 et 11 juillet 2011, n° 328183)
Auteur(s)
Jonathan Quaderi
Contenu

Comme le précise l’article R. 421-1 du code de justice administrative, « sauf en matière de travaux publics, la juridiction [administrative] ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision […] », que celle-ci soit intervenue explicitement ou implicitement. Il résulte de l’application de ce texte qu’un patient ne saurait rechercher, devant le juge, la responsabilité d’un établissement public de santé sans avoir formé auprès de son directeur une demande préalable indemnitaire. Aux termes d’un arrêt du 4 mai 2011, le Conseil d’Etat a précisé, s’agissant de cette réclamation, que « seule la notification d’une décision expresse [de l’hôpital] rejetant une demande d’indemnité valablement présentée au nom [de la patiente] pouvait faire courir à l’encontre de cette dernière le délai pour former une action en réparation devant la juridiction administrative ». Cependant, ne sauraient être regardés comme une telle demande les courriers rédigés par l’assureur de la victime à l’attention du directeur d’établissement, se bornant « à demander les coordonnées de l’assureur de l’hôpital » ou, encore, « à interroger le destinataire sur la prise en charge de ce dossier, sans autres précisions ». En conséquence, le centre hospitalier n’a pu utilement faire valoir que la requête présentée par la requérante n’était plus recevable, car tardive, la décision expresse mentionnée plus haut ne pouvant être regardée comme une réponse à une demande de la plaignante.
En ce qui concerne le devoir d’information, le 11 juillet 2011, la Haute juridiction, rappelant « qu’un manquement des médecins à leur obligation d’information n’engage la responsabilité de l’hôpital que dans la mesure où il a privé le patient de la possibilité de se soustraire au risque lié à l’intervention », a purement et simplement annulé l’arrêt d’une cour administrative d’appel au motif que « bien qu’ayant à bon droit recherché si [l’intervention litigieuse] présentait un caractère indispensable, [ladite cour] a toutefois dénaturé les faits de l’espèce en reconnaissant un tel caractère à l’ostéotomie subie par M. A alors qu’elle relevait seulement la circonstance qu’une abstention thérapeutique aurait comporté un risque de complication cardio-vasculaire sensiblement supérieur à la moyenne, d’asthénie prononcée et de somnolence diurne et qu’il n’existait pas d’alternative thérapeutique moins risquée ; que l’arrêt attaqué doit, par suite, être annulé en tant qu’il statue sur la responsabilité [de l’hôpital] au titre d’un manquement à [son] obligation d’information ».
Enfin, par deux décisions des 16 mars et 20 avril 2011, le Conseil d’Etat a jugé, d’une part, qu’en matière de contamination par le virus de l’hépatite C, « le juge ne [peut] se fonder, pour rejeter la demande d’indemnité dont il est saisi, sur une hypothèse qui, à la supposer exacte, aurait engagé la responsabilité de la même [structure de santé] à laquelle le requérant imputait l’origine de son dommage » (en l’espèce, la cour administrative d’appel s’était fondée sur la circonstance que le requérant avait été exposé à d’autres sources de contamination que les transfusions de produits élaborés par le centre de transfusion sanguine de l’hôpital, alors qu’il ressortait des pièces du dossier que ces autres sources de contamination en cause, et tout particulièrement la séance de dialyse, correspondaient à des actes pratiqués dans le même établissement) ; d’autre part, et sur le terrain des infections nosocomiales, la responsabilité de l’établissement public de santé ne saurait être engagée quand « les prélèvements et examens bactériologiques effectués par le centre hospitalier, [la] veille de la sortie de la patiente, ont établi l’absence d’infection à cette date ».

Source
La Lettre du Cabinet - Septembre 2011