Valeur des parts de SCP : en cas de refus de l’offre par le retrayant, la Cour de cassation impose l’évaluation par le juge après expertise

Titre complément
(Cour de cassation, 1ère ch. civ. 30 octobre 2008, n° 07-19.459)
Auteur(s)
Isabelle Lucas-Baloup
Contenu

Un radiologue membre d’une société civile professionnelle est malade pendant plus de huit mois, ce qui permet, d’après les statuts, à ses associés de le mettre en demeure de céder ses parts ou de se retirer de la SCP. Une offre de rachat lui est notifiée, laquelle est refusée. L’associé assigne alors la SCP en rachat de ses parts et subsidiairement en paiement d’une provision à valoir sur le prix. La Cour d’appel de Nîmes avait entériné l’évaluation faite par une précédente assemblée générale des associés fixant, comme il est prévu aux statuts, la valeur unitaire des parts.
La Cour de cassation annule cette décision et juge « qu’en cas de refus, par le retrayant, du prix proposé pour la cession ou le rachat de ses parts, la valeur au jour du retrait en est fixée par le juge après expertise selon la procédure particulière et impérative prévue à cet effet » par l’article 1843-4 du code civil.
Cette position est regrettable pour ses effets en pratique : très souvent les experts nommés ne sont pas rompus à l’évaluation des cabinets médicaux, qui doit tenir compte d’éléments propres à la spécialité, à la concurrence locale, à la réputation du cabinet, aux conventions qu’il a passées avec divers autres acteurs, à la démographie médicale au moment de la cession etc. Si bien que la valeur déterminée par expertise s’éloigne souvent de la valeur vénale, c’est-à-dire celle qu’un candidat à la succession est réellement prêt à payer.
On sait, contrairement aux juges parfois, que beaucoup de patientèles ne trouvent pas de repreneurs à titre onéreux. Est-il légitime et équitable de faire payer aux associés restants des prix excessifs, alors qu’ils ne trouveront pas plus de candidat pour le retrayant que pour eux-mêmes ultérieurement ? Dans certains cas, certains cabinets, certains statuts… il faut mieux être le premier que le dernier à quitter la SCP ! Conclusion : on ne doit y entrer que prudemment.

Source
La Lettre du Cabinet - Juin 2009