L'Ordre des chirurgiens-dentistes condamné pour entente illicite ou prohibée, en matière de nettoyage des prothèses dentaires

Titre complément
(Cour d'appel de Paris, arrêt du 7 mars 2006)
Auteur(s)
Isabelle Lucas-Baloup
Contenu

En adressant une lettre circulaire à l'ensemble des maisons de retraite d'un département faisant état de sa position en matière de nettoyage des prothèses dentaires, l'Ordre profes-sionnel des chirurgiens dentistes est sorti de sa mission de service public. En effet, en déclarant que " seul un chirurgien dentiste est habilité et possède la compétence nécessaire pour faire face à toutes les situations qui peuvent être créées par le nettoyage de prothèses ", l'Ordre s'est livré à une interprétation de la législation applicable à son activité, en prenant position sur un point de technique médicale, sous une forme qui ne peut être considérée comme un simple avis.
Le Conseil de la concurrence était donc compétent pour apprécier ce comportement, au regard des textes réprimant les pratiques abusives en matière de concurrence.
La 1ère chambre de la Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 7 mars 2006, juge que le Conseil de la concurrence a pu justement relever qu'il existait deux types de nettoyage :
- le nettoyage quotidien au moyen de comprimés ou par brossage,
- et le nettoyage ponctuel utilisant des procédés particuliers et destiné à une remise en état d'une prothèse mal entretenue, lesquels constituent deux marchés différents.
L'envoi de la lettre circulaire, le refus de déférer à un rappel de la loi par la DGCCRF et la qualification dénigrante de la prestation effectuée par un prothésiste constituent des pratiques d'action concertée entrant dans les prévisions de l'arti-cle L. 420-1 du code de commerce.
La Cour de Paris constate que le Conseil National et le Conseil départemental de l'Ordre des chirurgiens-dentistes du Puy-de-Dôme ont manifestement voulu, en intégrant dans le champ de leur monopole l'activité de nettoyage des prothèses amovibles, en fermer l'accès à d'autres professionnels. Cette pratique a eu pour effet de priver les consommateurs d'un service de soins à domicile utile et même indispensable à l'hygiène buccale.
La sanction pécuniaire infligée au Conseil départemental est réduite à un euro, dès lors qu'il a suivi la position du Conseil National et la mesure de publication est confirmée par la Cour d'appel de Paris.

Source
Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Juillet-Août 2006