Base de données - Sites distincts

Autorisation d'exercice sur sites distincts (médecins)
Isabelle Lucas-Baloup, Anne-Sophie Grobost

Avant de déposer une demande d’autorisation de site distinct ou de contester l’autorisation obtenue par un confrère, il peut être utile de mieux connaître la jurisprudence du Conseil national de l’Ordre des médecins, comme de relire les quelques textes fondamentaux qui régissent les sites d’activité, d’une part, ceux des sociétés d’exercice, d’autre part :
Article R. 4127-85 du code de la santé publique :
« Le lieu habituel d'exercice d'un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental, conformément à l'article L. 4112-1.
« Dans l'intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle :
« - lorsqu'il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l'offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;
« - ou lorsque les investigations et les soins qu'il entreprend nécessitent un environnement adapté, l'utilisation d'équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.
« Le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d'exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins.
« La demande d'ouverture d'un lieu d'exercice distinct est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l'activité envisagée. Elle doit être accompagnée de
toutes informations utiles sur les conditions d'exercice. Si celles-ci sont insuffisantes, le conseil départemental doit demander des précisions complémentaires.
« Le conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne un site situé dans un autre département.
« Le silence gardé par le conseil départemental sollicité vaut autorisation implicite à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d'information demandé.
« L'autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fin si les conditions fixées aux alinéas précédents ne sont plus réunies.
« Les recours contentieux contre les décisions de refus, de retrait ou d'abrogation d'autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions explicites ou implicites d'autorisation ne sont recevables qu'à la condition d'avoir été précédés d'un recours administratif devant le Conseil national de l'ordre. »
S’agissant des praticiens exerçant au sein de sociétés civiles professionnelles, l’article R. 4113-74 du code de la santé publique prévoit que :
« Les membres d'une société civile professionnelle de médecins ou de chirurgiens-dentistes ont une résidence professionnelle commune.
« Toutefois, la société peut être autorisée par le conseil départemental de l'ordre à exercer dans un ou plusieurs cabinets secondaires l'une ou plusieurs des disciplines pratiquées par ses membres si la satisfaction des besoins des malades l'exige et à la condition que la situation des cabinets secondaires par rapport au cabinet principal ainsi que l'organisation des soins dans ces cabinets permettent de répondre aux urgences.
« Pendant un an au maximum, la société peut en outre exercer dans le cabinet où exerçait un associé lors de son entrée dans la société, lorsque aucun médecin ou aucun chirurgien-dentiste n'exerce dans cette localité. »
Pour les sociétés d’exercice libéral, l’article R. 4113-23 autorise l’exercice sur différents sites dans les termes ci-après :
« L'activité d'une société d'exercice libéral de médecins ne peut s'effectuer que dans un lieu unique. Toutefois, par dérogation aux dispositions du code de déontologie médicale mentionnées à l'article R. 4127-85, la société peut exercer dans cinq lieux au maximum lorsque, d'une part, elle utilise des équipements implantés en des lieux différents ou met en œuvre des techniques spécifiques et que, d'autre part, l'intérêt des malades le justifie.
« Ces lieux d'exercice doivent être situés soit dans une zone géographique constituée de trois départements limitrophes entre eux, soit exclusivement dans la région d'Ile-de-France. »
En ce qui concerne les chirurgiens-dentistes, l’article R. 4113-24 précise que :
« Les membres d'une société d'exercice libéral de chirurgiens-dentistes ont une résidence professionnelle commune.
« Toutefois, la société peut être autorisée par le conseil départemental de l'ordre à exercer dans un ou plusieurs cabinets secondaires si la satisfaction des besoins des malades l'exige et à la condition que la situation des cabinets secondaires par rapport au cabinet principal ainsi que l'organisation des soins dans ces cabinets permettent de répondre aux urgences.
« Pendant un an au maximum, la société peut en outre exercer dans le cabinet où exerçait un associé lors de son entrée dans la société, lorsqu'aucun chirurgien-dentiste n'exerce dans cette localité. »
La mise en œuvre de ces principes réglementaires n’est pas toujours facile et dépend parfois de la manière plus ou moins pertinente avec laquelle la demande a été présentée. Voici un tableau récapitulatif des jurisprudences constituant des exemples de décisions de l’Ordre national des médecins et du Conseil d’Etat sur des requêtes en ouverture de sites distincts :

Pour consulter le tableau se reporter à la rubrique "La Lettre du Cabinet", cf. janvier 2010.

La Lettre du Cabinet - Janvier 2010


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Autorisation d'exercice Médecins Offre de soins Sites distincts

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Conditions d’autorisation multisites d’une SELARL : quelques précisions du Conseil d’Etat
(Conseil d’Etat, 23 mars 2011, n° 339086)
Jonathan Quaderi

Par un arrêt du 23 mars 2011, le Conseil d’Etat, appelé à se prononcer sur la légalité d’une décision de la formation restreinte du Conseil national de l’Ordre des médecins faisant, notamment, injonction à une SELARL de cesser son activité sur un des trois sites au titre desquels elle était régulièrement inscrite au Tableau de l’Ordre, a apporté deux séries de précisions sur l’application de l’article R. 4113-23 du code de la santé publique.
En premier lieu, la Haute juridiction a confirmé sa compétence en la matière en faisant valoir que, « à la nature d’une décision prise pour l’inscription au Tableau, celle par laquelle les instances de l’Ordre se prononcent sur la conformité des statuts des sociétés demandant leur inscription au Tableau de l’Ordre aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l’exercice de la profession ; qu’il en est ainsi notamment des décisions par lesquelles le Conseil national de l’Ordre des médecins apprécie si les lieux d’exercice d’une société d’exercice libéral de médecins répondent aux conditions fixées à l’article R. 4113-23 du code de la santé publique ».
En second lieu, le juge administratif a purement et simplement censuré la décision querellée au motif que les dispositions de l’article dont s’agit « impliquent, indépendamment de la condition d’intérêt des malades, soit que la société d’exercice libéral utilise des équipements implantés sur différents sites, soit qu’elle mette en œuvre des technologies spécifiques [mais en aucun cas] une condition liée à l’utilisation d’équipements particuliers, [comme le prévoit] l’article R. 4127-85 du même code […] pour les médecins exerçant à titre individuel sur un site distinct ».
Le Conseil d’Etat conclut, en conséquence, que le CNOM « ne pouvait légalement soumettre l’exercice [de ladite société] à une telle condition ».
Cet arrêt sera bien utile pour les demandeurs de sites distincts, membres de sociétés d’exercice libéral.

La Lettre du Cabinet - Septembre 2011


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SELARL Sites distincts

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Cumul d'exercice dans une SEL + une SCP, sur sites différents
(Arrêt du 21 septembre 2001, Conseil d'Etat)
Isabelle Lucas-Baloup

On sait combien les ordres départementaux distribuent avec parcimonie les autorisations prévues à l'ancien article 3 du décret du 3 août 1994 sur les SEL de médecins, aujourd'hui codifié au CSP. Cet exemple le confirme :
Légalement, un associé ne peut exercer la profession de médecin qu'au sein d'une seule société d'exercice libéral et ne peut cumuler cette pratique avec l'exercice à titre individuel ou au sein d'une société civile professionnelle, excepté dans le cas où l'exercice de sa profession "est lié à des techniques médicales nécessitant un regroupement ou un travail en équipe ou à l'acquisition d'équipements ou de matériels soumis à autorisation en vertu de l'article L. 712-8 du CSP ou qui justifient des utilisations multiples" (nouvel article R. 4113-3).
Le Conseil d'Etat juge qu'il résulte de ces dispositions que le principe qu'elles posent est celui du non-cumul de la pratique de la profession demédecin au sein d'une société d'exercice libéral avec l'exercice à titre individuel ou au sein d'une sociétécivile professionnelle et que si ce principe est assorti d'exceptions, celles-ci doivent être interprétées strictement.
Deux spécialistes en ophtalmologie exerçant chacun à titre individuel, le premier à Bastia au sein d'une société civile professionnelle, le second à Marseille dans une clinique, avaient constitué entre eux une SELARL en vue de pratiquer dans une clinique à Bastia, sous la condition suspensive de son inscription au tableau de l'ordre. Celle-ci a été refusée par l'ordre de la Haute-Corse, par une décision confirmée par le conseil régional de l'ordre de Provence-Côte d'Azur-Corse, puis par le conseil national.
Les deux ophtalmologistes soutenaient que la SEL qu'ils entendaient constituer, en sus de leur activité individuelle, entrait dans le cadre des exceptions prévues par l'article R. 4113-3 susvisé à la règle du non-cumul de l'exercice à titre individuel avec celui au sein d'une SEL.
Le refus est confirmé par le Conseil d'Etat au motif "qu'ils n'établissent ni mettre en œuvre des techniques médicales nécessitant un regroupement ou un travail en équipe, ni devoir procéder à l'acquisition d'équipements et de matériels soumis à autorisation ou justifiant des utilisations multiples."

La Lettre du Cabinet - Janvier 2005


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SCP SEL Sites distincts

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Exercice en site distinct de l’ophtalmologie par une société d’exercice libéral
(Arrêt Conseil d’Etat, sous-section 4, 30 janvier 2012, n° 337985)
Isabelle Lucas-Baloup

L’intégralité de l’arrêt n’est pas publiée, mais le site LexisNexis a rendu public le résumé ci-après (www.lexisnexis.com, 2012-001856) :
« Jusqu’à l’autorisation litigieuse, seuls trois ophtalmologistes étaient en exercice dans la communauté de communes de Pornic, qui compte 33 000 habitants hors de la période estivale. S’il est allégué que l’on dénombre 66 ophtalmologistes dans un rayon de 40 kilomètres autour de Pornic, le Conseil national de l’Ordre des médecins, eu égard aux distances à parcourir et à la localisation pour atteindre nombre de ces cabinets situés dans le périmètre précité incluant l’agglomération de Nantes, n’a pas fait une inexacte application de l’article R. 4113-23 du code de la santé publique en estimant que l’intérêt des malades justifiait l’ouverture d’un cabinet supplémentaire d’ophtalmologie à Pornic. »

SAFIR - Mars 2012


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Ophtalmologie SEL Sites distincts

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Exercice sur plusieurs sites : la concurrence facilitée entre spécialistes
(décret du 23 mai 2019, n° 2019-511)
Isabelle Lucas-Baloup
La Lettre du Cabinet ne publiera plus de revue de jurisprudence du CNOM sur les autorisations accordées ou refusées selon les critères savamment mis en œuvre depuis plusieurs décennies. Par décret du 23 mai 2019, il a été fait table rase de l’obligation de solliciter une autorisation avant d’ouvrir ce qu’il y a quelques années on dénommait un « cabinet secondaire ». Désormais, le médecin n’a plus à obtenir une autorisation mais à remplir par voie électronique une déclaration préalable d’ouverture d’un lieu d’exercice distinct de celui de sa résidence professionnelle habituelle au titre de laquelle il est inscrit au tableau du Conseil départemental. Il peut également envoyer son dossier par lettre recommandée de manière à s’assurer de la date de réception, qui fait courir le délai de réponse des autorités ordinales. La déclaration est envoyée deux mois avant l’ouverture envisagée, au Conseil départemental géographiquement compétent pour ce nouveau cabinet. C’est lui qui communique, « sans délai » dit le décret, au Conseil départemental auprès duquel le médecin est inscrit, si ce n’est pas le même. Il convient de remplir néanmoins avec soin la déclaration et de l’accompagner de toutes informations utiles, car le Conseil de l’Ordre du département d’accueil peut s’y opposer pour des « motifs tirés d’une méconnaissance des obligations de qualité, sécurité et continuité des soins et des dispositions législatives et règlementaires ». Une description attentive de l’activité sur le nouveau site (consultation ou pas, interventions chirurgicales ou pas et dans cette hypothèse description des autorisations du site - la chirurgie demeurant interdite en ambulatoire en dehors d’un établissement de santé -, examens d’imagerie médicale, explorations et traitements ophtalmologiques, etc.), du matériel utilisé ou prévu, des locaux et du personnel in situ, mais surtout un exposé de la présence effective du demandeur, ou de son collaborateur ou associé, est requise, aux fins de démontrer sa capacité à assurer la continuité des soins, critère très observé par les Conseils départementaux. Pendant les deux mois d’instruction du dossier, l’activité ne doit pas commencer sur le nouveau site déclaré. A défaut de réponse après deux mois de réception de la déclaration par le CDOM, l’activité peut démarrer sur le nouveau site. Il est prévu que les Conseils départementaux adressent une « simple attestation formalisant l’absence d’opposition » d’après le site du CNOM, ce qui n’est pas mentionné dans le décret, mais facilitera la preuve du respect des formalités en cas de besoin par le médecin. Le Conseil départemental peut évidemment délivrer cette attestation sans attendre le délai de deux mois, s’il a pu instruire le dossier et se prononcer plus rapidement. La réforme concerne tant les médecins exerçant à titre personnel (article R. 4127-85 du code de la santé publique), que les sociétés d’exercice libéral (article R. 4113-23) et les sociétés civiles professionnelles (article R. 4113-74). Il n’existe plus de nombre maximum de sites autorisés (le décret n’a rien changé sur ce point). Si le CDOM s’oppose à l’ouverture, il doit motiver son refus et le demandeur peut saisir le CNOM d’un recours, puis ensuite, si l’opposition perdure, le tribunal administratif territorialement compétent. Nul doute que le contentieux perdurera, même si la procédure est simplifiée : appréciation divergente sur la capacité d’assurer la continuité des soins, refus motivé par une pratique chirurgicale hors établissement de santé autorisé par l’Agence régionale de santé, etc., le CNOM s’est déjà prononcé, depuis six mois, sur les principaux cas de conflits. Les tiers peuvent également s’opposer à l’ouverture ou à la poursuite de l’exercice en site distinct, mais ne peuvent plus invoquer « l’offre de soins » locale pour étayer leur opposition, ce critère a disparu, libérant ainsi la concurrence locorégionale. Est-ce une bonne chose ? Les avis sont partagés : telle SELAS de quarante radiologues pourra ouvrir facilement un site distinct dans une commune où peinait un confrère à maintenir une faible activité pendant quelques années jusqu’à sa retraite, sans lui proposer de racheter sa patientèle et sans que le médecin isolé et sans ressources suffisantes ne puisse invoquer des arguments pour s’y opposer entrant dans les critères du nouveau décret. De même les établissements de santé au sein desquels les praticiens ne sont pas protégés par des contrats d’exclusivité (aujourd’hui d’exercice « privilégié ») pourront accueillir des concurrents locaux sans obtenir préalablement l’agrément des installés historiques, ce qui selon les circonstances présentera des avantages en termes de qualité des soins (nouvelle équipe structurée et plus nombreuse venant de l’hôpital public voisin) et des injustices en termes de captation d’une activité isolée mais assurée par des praticiens n’ayant jamais démérité, voire ayant assuré à bout de bras la permanence des soins quand il était impossible de recruter pendant des années avant un redéploiement local des structures. Certains chirurgiens considèrent naïvement pouvoir compter sur la reconnaissance des directeurs d’établissements, mais ils changent souvent, et sur la confraternité de leurs concurrents, deux mots sur lesquels on pourrait gloser au delà de l’espace réservé à ce commentaire. Cette réforme n’est pas en faveur de la valorisation des éléments transmissibles de leurs cabinets : les cliniques ne signent plus de contrat d’exclusivité (ou alors très rarement dans des circonstances particulières) et les portes s’ouvrent facilement désormais pour les nouveaux entrants. Il sera prudent de ne plus compter sur le produit de la vente de son patrimoine professionnel pour compléter la pension de retraite que servira généreusement le régime universel aux lieu et place de la CARMF ! Enfin, la disparition de tout critère lié à l’offre de soins locale est-elle bien raisonnable en présence des déserts médicaux que chacun regrette et que la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé a pour ambition d’atténuer par diverses mesures notamment par la maîtrise des « conditions dans lesquelles les médecins participent à la réduction des inégalités territoriales dans l'accès aux soins ». Ce n’est pas avec le décret du 23 mai qu’on incitera des spécialistes à s’installer dans des départements sous-dotés en professionnels et établissements de santé… Contrairement à l’Ordre des médecins, l’Ordre national des chirurgiens-dentistes a refusé clairement que la réforme des autorisations de sites distincts des médecins soit appliquée à l’identique pour les chirurgiens-dentistes. Il est intéressant de rapporter la lettre envoyée, le 7 mars 2019, par le Docteur Serge Fournier, Président du CNO, au ministère de la Santé, dans le cadre de la concertation préalable à la réforme : « Contrairement au Conseil national de l’Ordre des médecins, le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes ne souhaite pas substituer un régime purement déclaratif avec un droit d’opposition au régime d’autorisation existant pour l’ouverture d’un ou plusieurs cabinets secondaires. En effet, le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes s’efforce de faire installer des chirurgiens-dentistes en zones sous-dotées. L’article R. 4113-74 du code de la santé publique tel qu’il est applicable pour notre profession répond à cette demande puisque l’ouverture d’un ou plusieurs cabinets secondaires est autorisée "si la satisfaction des besoins des malades l’exige et à la condition que la situation des cabinets secondaires par rapport au cabinet principal ainsi que l’organisation des soins dans ces cabinets permettent de répondre aux urgences". Il apparaît difficile de réguler l’ouverture des cabinets secondaires et de répondre aux besoins des patients dans le cadre d’un régime déclaratif avec un droit d’opposition de la part du Conseil départemental intéressé basé sur des motifs tirés d’une méconnaissance des obligations de qualité, de sécurité et de continuité des soins sans tenir compte des besoins de santé publique. Enfin, la position du Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes concernant l’article R. 4113-74 est également valable pour l’article R. 4113-24 du CSP réglementant l’ouverture d’un ou plusieurs cabinets secondaires pour les SEL de chirurgiens-dentistes. » Les chirurgiens-dentistes doivent en conséquence continuer à solliciter l’autorisation d’ouverture d’un cabinet secondaire et ne sont pas concernés par la réforme du 23 mai 2019. La Lettre du Cabinet - Décembre 2019


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Sites distincts

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Le Conseil d’Etat annule une décision du CNOM en matière d’autorisation de site distinct
(Conseil d’Etat, sous-section n° 4, 9 juin 2008, n° 299843, CDOM de l’Hérault)
Isabelle Lucas-Baloup

Le contentieux portant sur les autorisations et/ou refus de sites d’exercice distincts de la résidence professionnelle habituelle des médecins augmente.
Un orthopédiste de Béziers avait demandé l’autorisation d’exercer deux demi-journées par semaine, en alternance avec un confrère, sur un site distinct de sa résidence professionnelle, situé à Agde, commune sur laquelle un seul orthopédiste était installé précise l’arrêt, et dans laquelle la densité de médecins exerçant cette spécialité était sensiblement inférieure à celle constatée au niveau national. Enfin, une partie de la clientèle à mobilité réduite était obligée de se rendre à Béziers, à 25 kilomètres.
Le Conseil d’Etat en déduit, contrairement au Conseil national de l’Ordre des médecins qui est déclaré avoir fait une inexacte application du droit, que, dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques de la discipline en cause, l’offre de soins dans ce domaine doit être regardée, au sens des dispositions de l’article R. 4127-85 du code de la santé publique, comme présentant une insuffisance au regard des besoins de la population et de la nécessité de la permanence des soins.
L’Ordre doit payer 3000 euros à l’orthopédiste de Béziers qui peut donc s’installer à Agde comme il le souhaitait.

La Lettre du Cabinet - Juin 2009
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Les sites multiples d'une SEL doivent se trouver dans des départements limitrophes
(Arrêt du 4 avril 2001, Conseil d'Etat)
Isabelle Lucas-Baloup

Aux termes de l'article R. 4113-23 du CSP (ancien article 14 du décret du 3 août 1994) : "L'activité d'une société d'exercice libéral ne peut s'effectuer que dans un lieu unique. Toutefois, par dérogation aux dispositions du code de déontologie médicale mentionnées à l'article R. 4127-85, la société peut exercer dans cinq lieux au maximum lorsque, d'une part, elle utilise des équipements implantés en des lieux différents ou met en œuvre des techniques spécifiques et que, d'autre part, l'intérêt des malades le justifie. Ces lieux d'exercice doivent être situés soit dans une zone géographique constituée de trois départements limitrophes entre eux, soit exclusivement dans la région d'Ile-de-France."
Le Conseil d'Etat a jugé que "trois départements sont limitrophes entre eux lorsque chacun d'eux est limitrophe des deux autres". Il a, par voie de conséquence, annulé une décision du Conseil national ayant autorisé l'inscription d'une SEL dénommée "Société médicale de la Vallée de la Durance" exerçant dans les villes de Manosque et Aix-en-Provence, situées respectivement dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence et des Bouches-du-Rhône, qui, bien que départements très proches ne sont pas limitrophes l'un de l'autre.
Attention : le CNOM a jugé plusieurs fois que toute extension d'activité d'une SEL implique une modification des statuts à communiquer au CDOM du siège social et non de celui du nouveau site, déclaré incompétent (cf. notamment décision CNOM, 1er février 2001, n° 993).

La Lettre du Cabinet - Janvier 2005


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SEL Sites distincts

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Pas de chirurgie réfractive en cabinet de ville ? (décision du CNOM, 26 juin 2014)
Isabelle Lucas-Baloup

   Une SELARL d’ophtalmologie sollicite une autorisation de site distinct, sur le fondement de l’article R. 4113-23 du code de la santé publique :

« Le lieu habituel d’exercice d’une société d’exercice libéral de médecins est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle elle est inscrite au tableau de l’ordre. Toutefois, dans l’intérêt de la population, la société peut être autorisée à exercer son activité sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle :

 

1° lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ; ou

 

2° lorsque les investigations et les soins à entreprendre nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants. (...) »

 

   L’Ordre national confirme la décision de rejet de la demande prononcée par le Conseil départemental de l’Ordre des médecins. Sur le critère géographique, le motif n’est pas spécialement intéressant, en revanche l’Ordre national des médecins motive le refus en ce qui concerne la mise en œuvre de techniques spécifiques et l’utilisation d’équipements particuliers qui n’existaient pas localement ainsi qu’il suit :

 

« La SELARL a indiqué pouvoir au sein de ce site disposer de matériel de laser pour réaliser notamment des actes de chirurgie de la presbytie. Ces actes réalisés dans le cadre de la chirurgie réfractive sont des actes chirurgicaux. Dès lors, cette chirurgie, effectuée sans hébergement, relève des dispositions applicables en matière de chirurgie ambulatoire ; la chirurgie ambulatoire ne peut être réalisée que dans des établissements de santé ou dans des structures de soins alternatives à l’hospitalisation rattachées aux établissements de santé et il n’est pas avancé que la SELARL bénéficie d’une autorisation d’exercice en qualité d’établissement de santé au site envisagé.

 

« En conséquence, il y a lieu de considérer que l’exercice de la chirurgie réfractive envisagé par la SELARL dans une structure qui n’a pas la qualité d’établissement de santé ne répond pas aux conditions posées à l’article R. 4113-23 du code de la santé publique selon lesquelles le médecin doit notamment justifier de la qualité et de la sécurité des soins. »

 

   L’autorisation est à obtenir de l’Agence régionale de santé et transforme le cabinet d’ophtalmologie en établissement de santé privé doté d’une autorisation d’activité de chirurgie, prévue à l’article L. 6122-1 du code de la santé publique, avec toutes les charges et obligations d’une clinique privée, si l’autorisation est consentie ce qui est rare car les syndicats représentatifs d’établissements de santé publics et privés donnent un avis négatif à l’occasion de la procédure préalable à la décision du directeur de l’ARS, préférant conserver en leur sein cette activité de chirurgie ambulatoire, pour laquelle ils facturent à l’assurance maladie des forfaits de séjour et de soins fixés par un tarif calculé d’après les GHS (groupes homogènes de séjour) dans le cadre de la tarification à l’activité (T2A).

 

   La Cour de cassation refuse la prise en charge des interventions relevant des alternatives à l’hospitalisation réalisées en cabinet de ville, en application de l’article L. 162-21 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, et a cassé un jugement du TASS de Cahors auquel les hauts magistrats faisaient grief « de ne pas avoir recherché si le cabinet d’ophtalmologie dans lequel le chirurgien pratiquait des opérations de la cataracte sous anesthésie locale par instillation de collyre constituait un établissement de santé soumis à autorisation » (cf. arrêt Cassation, 2ème ch. civ. 20 mai 2010, n° 09-14-145).

 

   Un autre ophtalmologiste a été condamné pénalement (cf. arrêt Cass. ch. crim, 9 mai 2007) pour avoir exploité un « centre d’ophtalmologie autonome », en application de l’article L. 6125-1 du code de la santé publique : « Le fait d'ouvrir ou de gérer un établissement de santé privé ou d'installer dans un établissement privé concourant aux soins médicaux des équipements matériels lourds définis à l'article L. 6122-14 en infraction aux dispositions des articles L. 6122-1 et L. 6122-7 est puni de 150000 euros d'amende.Est puni de la même peine le fait de passer outre à la suspension ou au retrait d'autorisation prévus à l'article L. 6122-13.En cas de récidive, la peine peut être assortie de la confiscation des équipements installés sans autorisation. »

 

   On se souvient que Madame Bachelot, ancien ministre de la Santé, avait annoncé pendant deux ans la promulgation d’une réforme du droit des autorisations d’établissements de soins, prévoyant des autorisations adaptées aux centres autonomes (en ophtalmologie mais également en gastro-entérologie, en médecine et petite chirurgie esthétique), réforme ajournée grâce au lobbying des syndicats d’établissements de santé. Madame Touraine, qui vient d’être reconduite dans sa mission dans le nouveau Gouvernement de M. Valls, réouvrira-t-elle le dossier, rien n’est sûr…

 

   L’acuité du problème n’échappera à personne : il est mis à la disposition du consommateur, dans certains centres autonomes de spécialistes, des matériels, du personnel et une organisation des soins d’une qualité parfois supérieure à ce qu’on trouve dans des établissements de santé publics ou privés, dument autorisés pour l’activité de soins « chirurgie », mais sans service spécialisé dans la discipline concernée. Un sujet qu’il convient de traiter avec discernement, dans l’intérêt supérieur des patients. Evidemment.
La Lettre du Cabinet - Septembre 2014


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Cabinet de ville Chirurgie réfractive SELARL Sites distincts

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Site distinct : annulation d’une autorisation à des cardiologues
(Conseil national de l’Ordre des médecins, décision du 5 avril 2012)
Isabelle Lucas-Baloup

La Lettre du Cabinet a déjà présenté à plusieurs reprises la jurisprudence ordinale sur les autorisations/refus de sites distincts, en application de l’article R. 4127-85 du code de la santé publique :

« Le lieu habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental, conformément à l’article L. 4112-1.

« Dans l’intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle :

- lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;

- ou lorsque les investigations et les soins qu’il entreprend nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants ;

- le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins. »

Le Conseil départemental de la Gironde avait accordé un site supplémentaire d’exercice à cinq cardiologues, par rotation tous les jours de la semaine, à Castelnau de Médoc, pour un secteur géographique correspondant à un bassin de vie comprenant 13 000 habitants environ. Deux cardiologues exerçaient trois demi-journées par semaine dans la même ville et il n’était pas fait état de délais d’attente pour les patients supérieurs à une semaine, en urgence, ni de non réponse à la prise en charge en cardiologie. Les deux cardiologues avaient donc contesté devant le Conseil national de l’Ordre des médecins statuant en matière administrative l’autorisation d’un site supplémentaire délivrée par le Conseil départemental à leurs cinq confrères. Le Conseil national a considéré qu’aucun des deux critères susceptibles de justifier l’autorisation d’un site distinct n’était rempli et qu’il y a lieu d’annuler la décision du Conseil départemental, en mettant fin à l’autorisation accordée aux cinq cardiologues auxquels il est laissé trois mois pour fermer leur site distinct.

La lettre du Cabinet - Septembre 2012


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Autorisation de site distinct Cardiologue Sites distincts

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Site distinct : PH urgentiste et activité libérale
(Conseil national de l’Ordre des médecins, décision du 9 décembre 2011)
Jonathan Quaderi

Saisie d’un recours dirigé contre une décision d’un Conseil départemental de l’Ordre des médecins, ayant refusé d’autoriser, sur le fondement de l’article R. 4127-85 du code de la santé publique, un praticien hospitalier (PH), disposant d’une autorisation d’activité réduite, à exercer par ailleurs son art, à titre libéral, sur le site d’une clinique, la Commission d’étude des appels en matière administrative du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) a censuré l’opposition contestée, en soulignant, toutefois et pour la première fois, que l’intéressé devait « justifier que cet exercice […] remplit toutes les conditions […] résultant de l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 [portant droits et obligations des fonctionnaires] ».

Pour mémoire, le mécanisme relativement complexe résultant du texte précité, applicable aux PH par renvois des dispositions issues de loi HPST du 21 juillet 2009 et du décret n° 2010-1141 du 29 septembre 2010 relatif aux personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques hospitaliers (cf. art. L. 6152-4 et R. 6152-46 du CSP), tend à proscrire, sauf exceptions, tout exercice « à titre professionnel, [d’une] activité privée lucrative […], à l’extérieur de l’établissement » dans lequel le praticien a été nommé.

C’est donc l’issue d’une séance du 9 décembre 2011, de plaidoiries et de débats animés sur l’application de cette réglementation devant l’Ordre, et d’une décision du même jour, que ladite Commission a fait droit à la demande de ce professionnel de santé, en relevant, pour le surplus et de manière classique en la matière, que « le site d’exercice souhaité […] contribue à réduire l’insuffisance de l’offre de soins […] sur le secteur géographique concerné ».

La lettre du Cabinet - Septembre 2012


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Activité libérale PH urgentiste Sites distincts

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SITES D'ACTIVITE du médecin libéral : depuis la suppression des CABINETS SECONDAIRES
Isabelle Lucas-Baloup

Le décret en Conseil d’Etat du 17 mai 2005 a réformé l’article R. 4127-85 du code de la santé publique (ancien article 85 du code de déontologie médicale), en supprimant la notion de « cabinets » et par voie de conséquence la distinction classique entre cabinet « principal », cabinet « secondaire » et "prolongement technique d’activité".
Cepandant, la possibilité offerte au médecin d’exercer sur plusieurs sites professionnels demeure très encadrée.

Ancien texte : art. 85, code déontologie médicale
(décret n° 95-1000 du 6-9-1995)
« Un médecin ne doit avoir, en principe, qu’un seul cabinet.
Il y a cabinet secondaire lorsqu’un médecin reçoit en consultation de façon régulière ou habituelle des patients dans un lieu différent du cabinet principal ; la création ou le maintien d’un cabinet secondaire, sous quelque forme que ce soit, n’est possible qu’avec l’autorisation du conseil départemental de l’ordre intéressé.
Cette autorisation doit être accordée si l’éloignement d’un médecin de même discipline est préjudiciable aux malades et sous réserve que la réponse aux urgences, la qualité et la continuité des soins soient assurées.
L’autorisation est donnée à titre personnel et n’est pas cessible.
Elle est limitée à trois années et ne peut être renouvelée qu’après une nouvelle demande soumise à l’appréciation du conseil départemental.
L’autorisation est révocable à tout moment et doit être retirée lorsque l’installation d’un médecin de même discipline est de nature à satisfaire les besoins des malades.
En aucun cas, un médecin ne peut avoir plus d’un cabinet secondaire.
Les dispositions du présent article ne font pas obstacle à l’application, par les sociétés civiles professionnelles de médecins et leurs membres, de l’article 50 du décret n° 77-636 du 14 juin 1977 et par les sociétés d’exercice libéral, de l’article 14 du décret n° 94-680 du 3 août 1994.
Les interventions ou investigations pratiquées pour des raisons de sécurité dans un environnement médical adapté ou nécessitant l’utilisation d’un équipement matériel lourd soumis à autorisation ne constituent pas une activité en cabinet secondaire. »

Nouveau texte : article R. 4127-85, code de la santé publique
(décret n° 2005-481 du 17-5-2005)
« Le lieux habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental, conformément à l’article L. 4112-1 du code de la santé publique.
Dans l’intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle :
- lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;
- ou lorsque les investigations et les soins qu’il entreprend nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.
Le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins.
La demande d’ouverture d’un lieu d’exercice distinct est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée. Elle doit être accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d’exercice. Si celles-ci sont insuffisantes, le conseil départemental doit demander des précisions complémentaires.
Le conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne un site situé dans un autre département.
Le silence gardé par le conseil départemental sollicité vaut autorisation implicite à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d’information demandé.
L’autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fin si les conditions fixées aux alinéas précédents ne sont plus réunies.
Les recours contentieux contre les décisions de refus, de retrait ou d’abrogation d’autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions explicites ou implicites d’autorisation ne sont recevables qu’à la condition d’avoir été précédés d’un recours administratif devant le Conseil national de l’ordre. »

Pluralité de sites autorisée :
Le principe « un cabinet principal/un cabinet secondaire éventuellement, et pas plus », a vécu, comme la notion rencontrée en pratique de « prolongement technique d’activité », qui ne constituait pas un cabinet secondaire si le médecin s’abstenait d’y consulter. On distingue aujourd’hui la « résidence professionnelle habituelle au titre de laquelle le médecin est inscrit à un tableau d’un ordre départemental » et les « sites distincts », qui sont soumis eux-mêmes à autorisation ordinale préalable.
Le critère déterminant est celui de l’inscription au tableau, et non l’importance respective en temps que le médecin consacre à chacun des sites où il consulte ou opère.
L’article R. 5127-85 ne limite ni le nombre de sites, ni le périmètre géographique des sites sur lequel le médecin exerce (contrairement aux dispositions applicables aux SEL, art. R. 4113-23 du CSP).

Conditions de fond pour obtenir l’autorisation ordinale :
La première condition, commune à toutes les situations, est la conformité du projet à « l’intérêt de la population ». Voici une notion dont la définition s’avère protéiforme, certainement parce que le texte a été initialement prévu pour augmenter la démographe dans des zones géographiquement sinistrées en matière de généralistes. En ce qui concerne les spécialistes, l’intérêt du patient est différent et le but ne devrait pas seulement consister à lui éviter de parcourir une distance, dont la mesure varie selon qu’on se trouve en montagne ou dans les arrondissements d’une grande agglomération.
Si le critère de « l’intérêt du patient » demeure prédominant, la qualité du praticien dans une « hyper spécialité » devrait permettre une installation, même si des plaques dans la spécialité sont déjà vissées alentour. La démarche est plus compliquée alors pour l’ordre départemental, qui devra apprécier, en toute objectivité, la demande d’autorisation de site distinct en ne s’arrêtant pas à l’examen du tableau, mais en s’interrogeant sur la prestation effectivement procurée par le spécialiste en place et celle offerte par le requérant, qui devra savoir convaincre… Formellement, on n’est pas alors en présence d’une « carence » de l’offre de soins, il existe à proximité un spécialiste, mais il est permis de revendiquer que l’intérêt des patients serait qu’un confrère de la même discipline s’installe car il offrirait à ces derniers une compétence différente. D’ailleurs, l’intérêt des patients n’est-il pas de pouvoir choisir et ne pourrait-on dès lors soutenir qu’un monopole local leur est systématiquement préjudiciable ? Cette deuxième condition de l’existence d’une carence ou d’une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins dans le secteur géographique implique évidemment de définir ce dernier. Le texte en vigueur n’impose aucune contrainte formelle de s’en tenir à une division administrative quelconque, que ce soit celles mises en œuvre dans les SROS, par les agences régionales de l’hospitalisation (les bassins de population, les territoires de santé), ou par le découpage électoral (cantons et autres circonscriptions). L’ordre départemental n’est pas non plus tenu de limiter la zone qu’il observe à celle de sa compétence territoriale. A l’époque des patients européens « transfrontaliers », on doit c’est un minimum apprécier l’intérêt d’un malade, en cette matière, en allant regarder jusque et y compris de l’autre côté de la frontière départementale si elle s’avère à proximité. On trouve ainsi des praticiens consultant en cabinet de ville dans un département et opérant en exercice libéral dans deux établissements privés respectivement dans le même département et dans un département voisin, sans que la sécurité ou la continuité des soins en soit altérée. Pourquoi les empêcher alors de consulter dans le deuxième département ou plus généralement sur le deuxième site ? Le texte nouveau devrait permettre d’en finir avec les restrictions qui ne trouvent pas leur justification dans la stricte application des textes mais plus souvent dans l’Histoire locale des installations et des bassins de recrutement…
Le troisième élément permettant l’exercice en site distinct concerne les investigations et les soins nécessitant un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants. On imagine facilement l’exercice en établissement de santé privé (bloc opératoire, service d’hospitalisation, plateau d’imagerie scanner, IRM, etc.), mais le texte n’impose pas de s’arrêter aux établissements autorisés par l’ARH. Ainsi tel cabinet d’ophtalmologie ou de gastro-entérologie équipé en matériels permettant des investigations doit être pris en considération même sans être soumis à autorisation de la tutelle sanitaire.
L’article R. 4127-85 impose enfin au médecin de justifier qu’il est apte à assurer « la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins ». C’est bien normal mais il convient de ne pas être plus exigeant, pour les autorisations de site distinct, que les autorités ordinales ne le sont pour la résidence professionnelle au titre de laquelle le praticien est inscrit au tableau ! On observe curieusement que certains dossiers sont rejetés en raison d’un examen particulièrement intransigeant de ce chef. L’accueil « immédiat » et « de toutes les urgences » n’a jamais été imposé par les textes et le site distinct ne relève pas sui generis de l’UPATOU, malgré ce à quoi aboutissent certaines affirmations contraires.

Procédure pour obtenir l’autorisation ordinale :
Avant le commencement de l’activité sur un autre site, le médecin saisit (la lettre recommandée est le moyen le plus simple) l’ordre départemental compétent pour le site où la nouvelle activité est envisagée. La plupart des ordres diffusent des formulaires, qui impliquent sur certains points, des réponses « très adaptées » aux textes en vigueur et à la jurisprudence. Le requérant joint à sa demande « toutes informations utiles sur les conditions d’exercice », auxquelles le conseil départemental pourra faire ajouter des précisions complémentaires. La décision doit être prise dans les trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d’information si le dossier était incomplet. Le silence gardé par le conseil départemental sollicité vaut autorisation implicite. Tout recours contre une décision implicite ou explicite d’autorisation, de refus, de retrait ou d’abrogation d’autorisation, doit être porté devant le Conseil national de l’Ordre, dans le délai de deux mois.
Il est recommandé de consulter un avocat non pas tardivement au moment du recours, mais dès la constitution initiale du dossier, tant il est difficile de revenir ensuite sur une présentation des éléments de fait et de droit contraire aux intérêts du requérant.

Sites multiples et sociétés d’exercice :
Pour l’Ordre national des médecins, si la demande de site distinct est obtenue par une SCP, tous les médecins de la SCP sont autorisés à exercer sur le site (article R. 4113-74). En revanche, les SEL ne sont pas concernées par l’article R. 4127-85, mais seulement par l’article R. 4113-23 du CSP qui lui permet d’exercer « dans cinq lieux au maximum lorsque, d’une part elle utilise des équipements implantés en des lieux différents ou met en œuvre des techniques spécifiques et que, d’autre part, l’intérêt des malades le justifie. Ces lieux d’exercice doivent être situés dans une zone géographique constituée de trois départements limitrophes entre eux, soit exclusivement dans la région Ile-de-France. »

La Lettre du Cabinet - Décembre 2006
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Sites distincts et contrôle du juge administratif (TA Bordeaux, 7 novembre 2013, jugements nos 1201997, 1201998, 1201999, 1202000, 1202001)
Jonathan Quaderi

En application de l’article R. 4127-112 du code de la santé publique, les décisions prises par les conseils départementaux peuvent être réformées ou annulées par le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) soit d’office, soit à la demande des intéressés.

C’est le cas, notamment, des mesures fondées sur l’article R. 4127-85 du même code, qui permet d’autoriser « un médecin [à] exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle ».

 

Jusqu’à l’intervention du décret n° 2010-164 du 22 février 2010, relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives, les décisions rendues par le CNOM en la matière ne pouvaient qu’être déférées au Conseil d’Etat, par la voie de la cassation. Toutefois, depuis cette date, l’article R. 312-10 du code de justice administrative a été modifié et prévoit désormais que « les litiges relatifs aux législations régissant […] les professions libérales […], relèvent, lorsque la décision attaquée n’a pas un caractère réglementaire, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve, soit l’établissement ou l’exploitation dont l’activité est à l’origine du litige, soit le lieu d’exercice de la profession ».

 

Le contentieux des sites distincts était et demeure bien connu de la Haute Juridiction administrative mais est suffisamment nouveau pour souligner cinq jugements récents de la 3ème Chambre du Tribunal administratif de Bordeaux, en date du 7 novembre 2013.

 

L’issue de ces affaires s’est traduite par le rejet des recours formés par plusieurs praticiens libéraux contre des décisions du CNOM qui avait annulé les autorisations d’exercice en sites distincts précédemment délivrées par un Conseil départemental de l’Ordre, dans la discipline cardiologique.

 

A l’examen desdits jugements, il a été satisfaisant de constater que le Tribunal s’était correctement inspiré de la jurisprudence du Conseil d’Etat et avait fait une exacte application des règles de droit résultant de l’article R. 4127-85, en retenant par exemple que, en estimant que le secteur géographique considéré devait être celui du bassin de vie, « tel que défini par l’INSEE, validé par le maire de la commune et retenu aussi bien par l’ARS, pour apprécier les besoins ambulatoires de la population, que par l’Ordre des médecins, pour évaluer la réponse aux besoins de premiers recours », le CNOM n’a pas entaché ses décisions d’erreur d’appréciation.

 

Pour mémoire, la pratique d’une activité médicale ne peut s’étendre au-delà d’un « secteur géographique » plus ou moins restreint ou étendu. Cependant, celui-ci ne connaît aucune définition légale ou réglementaire et ne trouve de limites que dans une appréciation souveraine de l’autorité ordinale ou, à défaut et par substitution, du juge administratif.
La Lettre du Cabinet - Janvier 2014


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Secteur géographique Sites distincts

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