Base de données - Femme enceinte

Sages-femmes et arrêts de travail à femmes enceintes
Isabelle Lucas-Baloup

Une sage-femme peut prescrire un arrêt de travail à une femme enceinte mais seulement en cas de grossesse non pathologique (arrêt du 3 mai 2012).


Les textes réglementaires opposables :

article D. 331-1 du code de la sécurité sociale :
« Les sages-femmes peuvent prescrire des arrêts de travail, conformément au 4° de l’article L. 321-1, à une femme enceinte en cas de grossesse non pathologique. »

article D. 331-2, même code :
«La durée de l’arrêt de travail prescrit en application de l’article D. 331-1 ne saurait excéder 15 jours calendaires. La prescription d’un arrêt de travail par une sage-femme n’est pas susceptible de renouvellement ou de prolongation au-delà de ce délai. »


Arrêt du 3 mai 2012, 5ème chambre de la Cour d’appel de Versailles :
(n° 11/00867)

La CPAM des Yvelines a refusé à une femme enceinte le bénéfice du paiement des indemnités journalières dues pendant un repos prescrit par une sage-femme, au motif qu’il était en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse.

L’arrêt énonce que « l’incapacité physique ne peut être constatée par la sage-femme que dans la limite de sa compétence professionnelle qui n’excède pas le domaine des grossesses non pathologiques, ce qui exclut les prescriptions en rapport avec des états pathologiques résultant de la grossesse, lesquelles sont réservées aux seuls médecins. Dès lors, l’arrêt de travail délivré par une sage-femme, en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse, […], ne répond pas aux exigences prévues par les dispositions susvisées. […] L’arrêt de travail établi par la sage-femme avait été immédiatement précédé et suivi de repos prescrits par des médecins, pour un état pathologique en rapport avec la grossesse. Il n’appartient ni aux services administratifs de la Caisse, ni à la juridiction du contentieux de la sécurité sociale d’émettre un avis d’ordre médical et en conséquence de décider que l’arrêt de travail litigieux délivré par la sage-femme était médicalement justifié. »

La Cour renvoie la femme enceinte à s’adresser au Médiateur de la République dans le cadre d’une éventuelle « intervention en équité »…

Gynéco Online - Juin 2012


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Arrêt de travail CPAM Femme enceinte Sage-femme

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Sages-femmes et arrêts de travail à femmes enceintes
(Cour d'appel de Versailles, 5ème ch., arrêt du 3 mai 2012, n° 11/00867)
Isabelle Lucas-Baloup

La CPAM des Yvelines a refusé à une femme enceinte le bénéfice du paiement des indemnités journalières dues pendant un repos prescrit par une sage-femme, au motif qu’il était en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse. L’arrêt énonce que « l’incapacité physique ne peut être constatée par la sage-femme que dans la limite de sa compétence professionnelle qui n’excède pas le domaine des grossesses non pathologiques, ce qui exclut les prescriptions en rapport avec des états pathologiques résultant de la grossesse, lesquelles sont réservées aux seuls médecins. Dès lors, l’arrêt de travail délivré par une sage-femme, en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse, […], ne répond pas aux exigences prévues par les dispositions susvisées. […]. »

Une application stricte des articles D. 331-1 et -2 du CSS. La Cour renvoie la femme enceinte à s’adresser au Médiateur de la République dans le cadre d’une éventuelle « intervention en équité »…

La lettre du Cabinet - Septembre 2012


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Violences sur femme enceinte
Isabelle Lucas-Baloup
Le médecin gynécologue auquel une patiente dénonce qu’elle est l’objet de violences émanant de son mari, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin, peut l’informer de la possibilité d’obtenir du juge aux affaires familiales (JAF) une ordonnance de protection.

La requête doit être adressée au JAF, au tribunal de grande instance territorialement compétent (lieu du domicile du couple). Le JAF convoque pour audition les deux personnes impliquées (la victime et l’auteur présumé des violences), qui peuvent se faire assister d’un avocat. Les auditions peuvent se tenir séparément, en chambre du conseil (audience non publique), en présence d’un représentant du ministère public (Procureur ou substitut du Procureur).

L’article 515-11 du code civil prévoit que l’ordonnance de protection est délivrée dans les meilleurs délais par le JAF, s’il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés.

Les mesures sont valables 6 mois et peuvent être renouvelées dans certaines conditions prévues à l’article 515-12 du code civil.

Pour exemple, un arrêt de la Cour d’appel de Paris rendu le 13 octobre 2016, qui a considéré bien fondée une femme, enceinte de 8 mois, admise en urgence à l’hôpital à la suite de violences conjugales, à obtenir une ordonnance de protection. Elle a pu produire un certificat médical de l’unité médico-judiciaire, concluant à une incapacité de travail temporaire (ITT) de 5 jours. Elle a bénéficié d’un suivi psychologique jusqu’à l’accouchement.

En l’espèce, elle avait produit un compte-rendu de consultation de son médecin traitant mentionnant que la femme « vient en pleurant disant que son mari […] la tape régulièrement, sans raison depuis deux mois ».

Le rôle du médecin auquel on demande une attestation dans ce cadre est très délicat, car il doit observer plusieurs textes légaux, réglementaires et déontologiques qui l’exposent à des risques différents :

- en présence de son obligation de respecter le secret médical : article R. 4127-4 du code de la santé publique, qui couvre « tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris », la violation du secret médical constituant également un délit pénal (cf. article 226-13, code pénal), réprimé par un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende ;

- mais aussi de l’obligation prévue à l’article R. 4127-44 du même code « Lorsqu’un médecin discerne qu’une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection. » ;

- et l’article 226-14 du code pénal prévoit que le délit de violation du secret professionnel du médecin n’est pas applicable « à celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique » ;

- l’interdiction de délivrer une attestation pouvant être requalifiée « de complaisance », sur plainte de la personne qu’elle accuse si elle contient des affirmations non prouvées dont le médecin n’a pas été directement le témoin, n’ayant fait que répéter ce qu’il a entendu de la victime des violences (article R. 4127-28 prohibant la délivrance par un médecin d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance) ;

- le médecin ne devant pas « s’immiscer sans raison professionnelle dans les affaires de famille ni dans la vie privée de ses patients », impose l’article R. 4127-51 du code de la santé publique.

Les chambres disciplinaires régionales et nationale de l’Ordre des médecins prononcent fréquemment des sanctions sévères (souvent une suspension d’exercice pouvant atteindre plusieurs mois) réprimant les infractions à ces dispositions issues du code de déontologie médicale.

Isabelle Lucas-Baloup
Avocat à la Cour de Paris


ARRÊT : Cour d’appel Paris, Pôle 3, 3ème chambre,
13 octobre 2016, n° 16/07762


« Mme Imane A. et M. Soufiane M. se sont mariés le 7 mars 2015 à Clichy-sous-Bois (93). De leur union est issue une enfant, Yasmina, née le 14 janvier 2016.

Par ordonnance rendue le 26 février 2016, à laquelle la cour se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a notamment :

- délivré une ordonnance de protection en faveur de Mme A. ;
- admis provisoirement Mme A. à l'aide juridictionnelle ;
- fait interdiction à M. M. de recevoir ou de rencontrer Mme A. ainsi que d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit ;
- constaté la résidence séparée des époux ;
- attribué à Mme A. la jouissance du domicile conjugal à charge pour elle de régler les frais et charges correspondants ;
- constaté l'autorité parentale conjointe sur l'enfant Yasmina ;
- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile maternel ;

- dit que le droit de visite de M. M. s'exercerait, à défaut de meilleur accord, notamment grâce aux services de l'association, dans l'espace rencontre offert par l'association ADEF Médiation Enfance Famille, deux jours par mois pendant une durée de 2 heures au plus, et sans possibilité de sortir des locaux de l'association, en fonction des possibilités d'accueil de l'association ;
- dit que ce droit de visite s'exercerait suivant ces modalités tant qu'aucune autre décision de justice ne serait intervenue à la demande du parent le plus diligent ;
- dit que ce droit s'exercerait y compris pendant les vacances scolaires, la première moitié des vacances les années paires et la seconde moitié les années impaires ;
- dit que M. M. aurait la charge de prendre contact avec l'association pour connaître les heures auxquelles son droit de visite pourrait s'exercer ;
- dit que Mme A., ou un tiers digne de confiance désigné par elle, conduirait l'enfant auprès de l'association et viendrait l'y rechercher ;
- dit que l'association établirait un compte rendu sur les circonstances de l'exercice de ce droit de visite ;
- fixé à 150 euro par mois la contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant, avec indexation ;
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires ;
- dit que les mesures prévues par cette ordonnance étaient prises pour une durée de six mois à compter de sa notification et pourraient être prolongées au-delà si, durant ce délai, une requête en divorce ou en séparation de corps était déposée ;
- condamné M. M. aux dépens.

M. M. a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 1er avril 2016.

Mme A. a constitué avocat.

Par avis du 27 avril 2016, communiqué aux parties, le ministère public a conclu à la confirmation de l'ordonnance entreprise, sous réserve, au vu de l'article 515-12 du code civil, de vérifier qu'une requête en divorce avait été déposée auprès du juge aux affaires familiales de Bobigny.

Vu les dernières conclusions de M. M., remises par voie électronique le 29 avril 2016, aux termes desquelles celui-ci demande à la cour de :

- le recevoir en son appel et l'en déclarer bien fondé ;

à titre principal,

- infirmer purement et simplement l'ordonnance entreprise ;
- dire n'y avoir lieu à ordonnance de protection ;
à titre subsidiaire,
- infirmer partiellement l'ordonnance entreprise ;
- fixer un droit de visite et d'hébergement à son profit, à défaut de meilleur accord de la manière suivante :
* le samedi de 10 heures à 18 heures, pendant une durée de trois mois,
* puis, un droit de visite et d'hébergement classique à raison d'une fin de semaine sur deux et de la moitié des vacances scolaires,
* compte tenu du jeune âge de l'enfant, la première quinzaine du mois de juillet et du mois d'août chez le père, les années paires et la seconde quinzaine de ces mêmes mois les années impaires ;
- confirmer l'ordonnance de protection pour le surplus ;

en tout état de cause,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
- condamner Mme A. au paiement de la somme de 2.000 euro sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de Mme A., remises par voie électronique le 9 mai 2016, aux termes desquelles celle-ci prie la cour de :

- confirmer l'ordonnance de protection entreprise ;
- faire interdiction à M. M. d'entrer en relation avec elle, de quelque façon que ce soit ;
- lui attribuer la jouissance du domicile conjugal ;
- rappeler l'autorité parentale conjointe ;
- fixer la résidence habituelle de l'enfant au domicile de la mère ;
- dire que le droit de visite dont disposera M. M. sera exercé dans un point de rencontre associatif ;
- condamner M. M. à verser à titre de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant la somme de 150 euro par mois ;
- prononcer son admission à titre provisoire à l'aide juridictionnelle ;
- statuer ce que de droit sur les dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2016.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Sur la demande de Mme A. d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article 515-12, 7° du Code civil de prononcer l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle de Mme Imane A. épouse M. ;

Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant que l'ordonnance entreprise ayant été signifiée le 29 mars 2016, l'appel formé par M. M. le 1er avril 2016 est recevable pour avoir été effectué dans le délai de quinze jours prévu à l'article 1136-11 du code de procédure civile ;

Sur l'ordonnance de protection :

Considérant que, selon les dispositions de l'article 515-9 du Code civil, lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection ;

Qu'aux termes de l'article 515-11 du même code, l'ordonnance de protection est délivrée par le juge aux affaires familiales s'il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblable la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime est exposée ;

Considérant qu'au soutien de son appel, M. M., qui reconnaît n'avoir porté qu'une seule gifle à son épouse, le 18 novembre 2015, lors d'une dispute au domicile conjugal, et admet que cet acte est nécessairement constitutif d'une violence, conteste en revanche avoir tenté de l'étrangler comme celle-ci l'a prétendu, de même qu'il conteste avoir jamais commis quelque autre violence que ce soit depuis le début du mariage contrairement à ce que l'attestent mensongèrement, selon lui, les membres de la famille de Mme A. ; qu'il dénie en outre avoir proféré dans des messages SMS les menaces et les insultes dénoncées par son épouse à l'appui du complément de plainte qu'elle a déposée le 10 décembre 2015 ; qu'il se prévaut des témoignages de son entourage familial et amical le décrivant comme un homme au tempérament plutôt calme, gentil et serviable, n'ayant jamais été agressif ou menaçant ; qu'il fait valoir que les pièces versées aux débats par Mme A. en première instance ne permettent pas de démontrer le danger auquel elle serait exposée, de sorte que la seconde condition prévue à l'article 515-11 du Code civil n'étant pas accomplie, l'ordonnance de protection n'est pas justifiée et doit être infirmée ;

Considérant que lors de son dépôt de plainte, le 25 novembre 2015, Mme A. a fait état à l'encontre de son époux d'insultes, d'une «grosse claque'» sur la joue gauche lui ayant laissé un léger hématome et d'une tentative d'étranglement, précisant qu'elle pleurait beaucoup, qu'elle avait eu ensuite de fortes contractions et fait appel au SAMU' ; qu'elle a par ailleurs déclaré que si elle n'avait jamais déposé plainte auparavant, son mari avait commencé à la frapper un mois après leur mariage pour diverses raisons ;

Considérant que, malgré les dénégations de M. M. et sa volonté de minimiser les faits, pour ceux qu'il reconnaît, il est établi par les pièces versées aux débats, notamment par l'attestation de Mme B., sage-femme, et les bulletins d'hospitalisation de l'Hôpital privé de Marne-la-Vallée que Mme A., alors enceinte de 8 mois, a été transportée en urgence le 18 novembre 2015 par le SAMU, déclarant avoir été victime de violences conjugales, et que son état a nécessité son hospitalisation au service maternité jusqu'au 20 novembre 2015 ; que si le certificat médical de l'unité médico-judiciaire de l'hôpital Jean Verdier de Bondy établi le 27 novembre 2015 sur réquisition d'un officier de police judiciaire ne constate aucune lésion physique, il sera relevé, d'une part, que l'examen médical a été réalisé à une distance de neuf jours après les faits, et d'autre part, que les violences à prendre en compte au sens de la loi sont les violences tant physiques que psychologiques et, qu'en l'espèce, le certificat note la présence de troubles psychiques apparents au moment de l'examen, marqués par des pleurs spontanés et une tristesse et conclut à une ITT au sens pénal de 5 jours à compter des faits ; que la réalité des faits de violence reconnus par leur auteur et de l'hospitalisation qui en est résultée est en elle-même incontestable ; qu'il est encore attesté par une assistante sociale et par une psychologue clinicienne exerçant à l'hôpital privé Marne-la-Vallée que Mme A. a bénéficié d'un suivi psychologique à la maternité à la suite de son hospitalisation du 18 novembre 2015 qui s'est poursuivi jusqu'à son accouchement et à son orientation vers des professionnels de secteur ; qu'enfin, si les nombreuses attestations produites par chacune des parties, qui émanent pour la plupart de membres de la famille proche et dans leur grande majorité ne sont ni précises ni circonstanciées, n'emportent pas la conviction de la cour, en revanche, le compte rendu de consultation du 12 juin 2015 établi par le Dr E., médecin traitant de Mme A., qui indique qu' Imane vient en pleurant disant que son mari (...) la tape régulièrement, sans raison depuis 2 mois, est un document objectif ne pouvant être suspecté d'avoir été établi pour les besoins de la cause puisqu'antérieur de six mois aux faits litigieux, et qui permet de conforter les déclarations de l'intéressée sur l'existence de violences de son conjoint remontant sinon au début du mariage au moins au début de sa grossesse ;

Considérant, au regard de l'ensemble de ces éléments, que le premier juge a fait une exacte appréciation des faits de la cause en constatant qu'il existait des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables les violences alléguées par Mme A. et que celles-ci la mettaient en danger ;

Considérant en conséquence que c'est à juste titre que le premier juge, compte tenu des éléments de danger concernant la situation de Mme A., a fait interdiction à M. M. de la recevoir ou de la rencontrer ainsi que d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit, en application des dispositions de l'article 515-11, 1° du Code civil ;

Que l'ordonnance entreprise sera confirmée de ces chefs ;

Sur les mesures familiales :

Considérant que l'article 515-11, 3° du Code civil prévoit qu'à l'occasion de la délivrance de l'ordonnance de protection, le juge aux affaires familiales est compétent pour statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal et sur les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement ; que sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences ; que cet article prévoit en son 5° que le juge aux affaires familiales est compétent notamment pour se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, et sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants ;

Considérant que bien que l'appel soit général, les parties ne discutent pas les dispositions de la décision relatives à l'attribution du logement conjugal à l'épouse, à l'exercice conjoint de l'autorité parentale et à la contribution de 150 euro par mois que doit verser le père à la mère pour l'entretien et l'éducation de l'enfant ;

Que l'ordonnance entreprise sera confirmée de ces chefs ;

Considérant que M. M. sollicite l'infirmation de cette décision quant aux mesures relatives à son droit de visite et d'hébergement à l'égard de sa fille ; que, pour décider la mise en place d'un droit de visite médiatisé, le premier juge a retenu que l'enfant n'était âgée que d'un mois et demi, qu'elle n'avait encore jamais été en contact avec son père et que les violences commises à l'encontre de la mère l'avaient été alors qu'elle était enceinte ; que, contrairement à ce soutient M. M., la motivation du premier juge n'est pas inopérante et il ne s'agit pas de faire un quelconque amalgame entre les violences qu'il a commises sur son épouse et de potentielles violences qu'il pourrait exercer sur l'enfant, l'ordonnance entreprise trouvant son fondement dans les dispositions de la Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux mesures de protection des victimes de violences qui a modifié l'article 373-2-10 du Code civil afin de prendre en compte cette situation de violence familiale en ajoutant un 6° aux critères devant être pris en considération par le juge aux affaires familiales lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, à savoir 'les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre' ; qu'eu égard aux circonstances particulières dans lesquelles les violences ont été commises, sur une femme enceinte et donc particulièrement vulnérable, c'est à juste titre que le premier juge les a prises en considération pour organiser le droit de visite du père dans un espace de rencontre, en application des dispositions de l'article 373-2-9, alinéa 3, du même code, ces modalités étant propres à assurer un maintien de relations de qualité entre M. M. et sa fille dans un lieu offrant toute garantie de sécurité ;

Considérant cependant, qu'aux termes de ses conclusions, M. M. indique que bien qu'il ait pris attache avec l'association ADEF Médiation Enfance Famille, celle-ci n'a pu lui fixer un droit de visite compte tenu de son encombrement et des délais d'attente actuels ; qu'à la date des écritures de l'appelant, l'enfant Yasmina était âgée de 3 mois et demi ; que Mme A. justifie avoir déposé une requête en divorce auprès du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny le 3 février 2016 ; qu'il s'ensuit que la mesure organisant le droit de visite du père est prolongée au-delà du délai de six mois fixé dans la décision entreprise et continue de produire ses effets jusqu'à la notification de l'ordonnance de non-conciliation, conformément à l'article 1136-13 du code de procédure civile ; qu'à ce jour, Yasmina a atteint l'âge de 10 mois mais la cour ignore si l'association ADEF Médiation Enfance Famille a depuis lors été en mesure de mettre en place le droit de visite de M. M., aucune des parties n'ayant estimé nécessaire d'actualiser ses écritures en vue d'éclairer la cour sur ce point ;

Considérant que chacun des père et mère doit maintenir des relations avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ;

Qu'il est de l'intérêt de l'enfant et du devoir de chacun des parents de favoriser ces relations ;

Que selon les dispositions de l'article 373-2-1 du Code civil, l'exercice du droit de visite et d'hébergement ne peut être refusé à l'autre parent que pour des motifs graves' ;

Considérant que Mme A. qui demande que le droit de visite du père soit exercé dans un point de rencontre associatif n'invoque pas d'autre raison que les violences dont elle a été victime ; que si cette situation de violence a légitimement été prise en compte par le premier juge pour encadrer l'exercice du droit de visite du père dans un premier temps, elle ne saurait produire des effets perpétuels ; qu'il n'est pas soutenu par la mère qu'elle aurait fait l'objet depuis l'ordonnance entreprise d'autres violences de la part de M. M. ;

Considérant que M. M., qui justifie résider au domicile de sa mère, locataire d'un appartement situé à Clichy-sous-Bois, dispose donc des conditions matérielles lui permettant d'héberger l'enfant ; qu'il convient, dès lors, de lui accorder un droit de visite et d'hébergement qui s'exercera au domicile de Mme Houria M., grand-mère paternelle, de manière progressive selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision ; qu'il y a lieu de prévoir, à défaut de meilleur accord, qu'un tiers digne de confiance désigné par la mère conduira l'enfant chez le père et viendra l'y rechercher ;

Que l'ordonnance entreprise sera infirmée de ce chef ;

Sur l'exécution provisoire :

Considérant que par application de l'article 1136-7 du Code de procédure civile, l'ordonnance qui statue sur la demande de mesures de protection des victimes de violences est exécutoire à titre provisoire à moins que le juge en dispose autrement ;

Considérant dès lors que la demande d'exécution provisoire formée par M. M. est dépourvue de tout objet et qu'il convient de la rejeter ;

Sur les frais et dépens :

Considérant que l'ordonnance de protection étant prise en faveur de Mme A., les dépens seront mis à la charge de M. M. ;

Que par conséquent celui-ci sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;


PAR CES MOTIFS,

Prononce l'admission provisoire de Mme A. à l'aide juridictionnelle,

Confirme l'ordonnance de protection rendue le 26 février 2016 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny en toutes ses dispositions, à l'exception de celles relatives au droit de visite et d'hébergement du père,

Statuant à nouveau de ce chef,

Accorde au père un droit de visite et d'hébergement qui s'exercera au domicile de Mme Houria M., [...] selon les modalités suivantes :

- le samedi, de 10 heures à 18 heures, pendant une durée de trois mois,

puis,

- les première et troisième fins de semaine de chaque mois, du samedi 10 heures au dimanche 18 heures,

- durant la première moitié des petites vacances scolaires, les années paires et la seconde moitié, les années impaires,

- la première quinzaine des mois de juillet et d'août, les années paires et la seconde quinzaine de ces mêmes mois les années impaires.

Dit que, sauf meilleur accord, un tiers digne de confiance désigné par Mme A. conduira l'enfant au domicile de Mme Houria M. et viendra l'y rechercher,
Déboute chacune des parties de ses autres demandes,

Condamne M. M. aux entiers dépens de la procédure d'appel. »

Gynéco-Online - Décembre 2016


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