Base de données - Radiologie

Accès aux plateaux techniques d’imagerie médicale : l’Autorité de la concurrence intervient
(Décision n° 11-D-18 du 15 décembre 2011)
Isabelle Lucas-Baloup

Un radiologue a saisi l’Autorité de la concurrence en soutenant qu’un groupement de coopération sanitaire, le centre hospitalier, une clinique locale et un groupement de radiologues libéraux « abusaient de leur position dominante sur le marché des examens de scanner et d’IRM sur le territoire de santé d’Arcachon et se seraient entendus pour lui refuser l’accès aux vacations de scanner et d’IRM ». Au terme d’une instruction qui a duré 18 mois, pendant laquelle l’Autorité de la concurrence a rejeté les demandes de mesures conservatoires demandées par le radiologue, pour défaut d’urgence, une décision a été prononcée, le 15 décembre 2011. L’Autorité de la concurrence estimant que des pratiques relatives au refus d’accès à des vacations de scanner comme à l’IRM sont susceptibles de constituer soit une pratique concertée (art. L. 420-1 du code de commerce), soit un abus de position dominante (art. L. 420-2 du code de commerce), a invité les parties à s’entendre afin de lever les préoccupations de concurrence évoquées dans l’évaluation préliminaire des faits et du droit. Les entités mises en cause ont proposé et formalisé des engagements, notamment de nouveaux règlements intérieurs du scanner et de l’IRM, un avenant à la convention de co-utilisation du scanner et de nouveaux schémas d’organisation des EML concernés, lesquels ont été soumis au contrôle de l’Autorité de la concurrence qui les a acceptés et rendus obligatoires, sous réserve de l’obtention préalable des décisions d’autorisation et de visa de l’Agence Régionale de Santé d’Aquitaine.
Une tempête dans un verre d’eau ? Notre cabinet, avocat de l’hôpital et de la clinique, est heureux d’avoir activement contribué à trouver une solution négociée et validée par l’Autorité de la concurrence, mais observe avec stupéfaction et inquiétude les moyens mis en œuvre pour aboutir, le coût de l’opération pour les parties, qui ont eu à faire valoir leurs droits respectifs devant l’Autorité de la concurrence, qui siège à Paris et intervient dans le cadre d’une procédure très spécialisée que les médecins et établissements de santé ne sont pas habitués à pratiquer, mais que notre cabinet avait fréquenté déjà dans d’autres affaires de santé telles que celles impliquant les dons de lait dans les maternités ou les problèmes concurrentiels entre fabricants de dispositifs médicaux, implants en cardiologie, prothèses orthopédiques et autres.
La gestion des crises diverses que nous connaissons implique des constructions stratégiques qui s’écartent assurément du contenu historique de la simple trousse de secours autrefois suffisante : du dialogue et de l’intelligence relationnelle, éventuellement une assignation en référé. Quand les agresseurs des petites bijouteries de quartier s’arment de kalashnikov, à quel titre s’étonnerait-on que le radiologue de quartier saisisse l’A.C. pour obtenir une vacation de scanner !? Puisque les films muets ont enthousiasmé les foules en 2011, permettez-moi de finir l’année en remerciant encore M. Chaplin pour son analyse pertinente sur les gains d’efficacité dans Les Temps Modernes. Le futur (comme le pire) n’étant jamais certain, nous resterons, en 2012, plein d’espérance ! 

La Lettre du Cabinet - Décembre 2011


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Plateaux techniques Radiologie

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Chute de la table pendant un arthroscanner de l’épaule : pas de responsabilité du radiologue
(Cour d’appel de Rennes, 7ème ch., arrêt du 2 septembre 2009, LexisNexis 2009-379606)
Isabelle Lucas-Baloup

La Cour de Rennes rappelle que le radiologue n’est tenu qu’à une obligation de moyens. Sa responsabilité n’est pas retenue dans l’hypothèse d’une chute d’une patiente de la table d’examen au moment où elle a été verticalisée en présence du manipulateur, dos contre la table et pieds sur le marchepieds dès lors qu’elle n’avait montré aucun signe de malaise après les injections de xylocaïne et de 10 ml d’Hexabrix. Il ne saurait être reproché, d’après la Cour de Rennes, au radiologue de n’avoir pas utilisé de sangles dont la table était dépourvue. De même, le manipulateur n’avait pas à rester au moment des clichés du fait de la dangerosité des rayons. La chute de la victime était imprévisible.
Attention néanmoins, d’autres jurisprudences sont moins favorables aux médecins en cas de chute pendant les examens…, comme le prouve le tableau en pages 4 et 5.

La Lettre du Cabinet - Décembre 2009
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Dégénérescence discale lombaire : absence d’information non sanctionnée sur les risques de la nucléorthèse à l’Hexatrione
(arrêt Cour de Cassation, 11 décembre 2008, n° 08-10.255)
Isabelle Lucas-Baloup

Souffrant d’une discarthrose et de calcifications épidurales imputées aux injections d’Hexatrione prescrites par un rhumatologue et pratiquées en 1987 par un radiologue, le patient agit en recherche de leur responsabilité et est débouté au terme de l’argumentation ci-après :
« Attendu qu’ayant retenu que le rhumatologue et le radiologue ne s’étaient pas livrés à une recherche hasardeuse ou à une expérimentation isolée, mais qu’ils avaient appliqué un traitement innovant, pratiqué dans les milieux hospitaliers, et dont les effets indésirables n’étaient pas encore connus, qu’en outre le recours à la nucléorthèse avait été décidé comme traitement alternatif, compte tenu de l’absence de traitement chirurgical indiqué et de l’échec du traitement médical classique déjà suivi, la cour d’appel a pu en déduire que ce choix de prescription, eu égard au contexte des connaissances acquises de l’époque, ne constituait pas une faute ; (…) il n’est pas démontré que, mieux informé, le patient aurait refusé la technique proposée, sachant qu’une intervention chirurgicale n’était pas indiquée, que les souffrance étaient grandes et déjà anciennes, et que la technique proposée était alors sans risque connu et réputée apporter fréquemment un soulagement réel, la cour d’appel en a souverainement déduit que l’absence d’information n’avait causé au patient aucune perte de chance. »
L’information des médecins sur la jurisprudence sanctionnant l’absence d’information sur les risques devient très risquée pour le juriste spécialisé en droit de la santé…

La Lettre du Cabinet - Juin 2009
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Emprunt professionnel : taux effectif global erroné, remboursement de l’indu par la banque
(Cour de Cassation, 1ère ch. civ., 13 mars 2007)
Isabelle Lucas-Baloup

Un radiologue ayant emprunté de fortes sommes à son banquier pour acquérir les droits de présentation à la clientèle d’un confrère et son matériel découvre l’irrégularité du calcul du taux effectif global. La Cour d’Aix en Provence a relevé, à bon droit, que la sanction du taux effectif global erroné était la substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel prévu et la restitution par la banque à l’emprunteur des sommes trop versées en remboursement du prêt en principal et intérêts, à l’exclusion de tous les frais et accessoires liés au prêt (à l’exclusion notamment des cotisations d’assurance qui ne faisaient pas partie du taux conventionnel). La Cour de cassation confirme.
Un encouragement pour les médecins et directeurs d’établissements de santé à faire vérifier – même postérieurement à leur conclusion - les conditions des prêts souvent négociés dans la précipitation et l’enthousiasme d’un projet à concrétiser urgemment !

La Lettre du Cabinet - Septembre 2007


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Emprunt Radiologie Remboursement

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GIE de radiologie : distribution conflictuelle des vacations d’IRM entre les cabinets de radiologues après le départ de certains
(Cour d’appel de Rouen, arrêt du 22 juin 2011)
Isabelle Lucas-Baloup

Un GIE pour l’exploitation d’une IRM est constitué entre cinq cabinets de radiologie. Deux se retirent, entraînant une nouvelle répartition des vacations entre les cabinets restants et le constat que le règlement intérieur adopté à l’origine ne faisait pas le bonheur des radiologues malgré eux.
Le coût et la longueur des procédures aidant souvent à l’intelligence confraternelle, les parties se mettent d’accord, après un premier jugement, en adoptant à l’unanimité en assemblée générale une nouvelle répartition des plages horaires d’utilisation de l’IRM pour l’avenir.
Demeurait litigieuse la discussion sur les demandes indemnitaires devant réparer le préjudice (manque à gagner) invoqué par certains radiologues pour la période antérieure, dont la conclusion dépendait principalement de savoir quelles dispositions mettre en œuvre : celles de l’article 1-C du règlement intérieur qui prévoyait la situation d’un groupe toujours présent au sein du GIE mais qui n’utiliserait pas provisoirement les plages horaires qui lui sont octroyées, ou celles de l’article 15 des statuts du GIE imposant que l’approbation et les modifications du règlement intérieur ou toute modification du calendrier d’utilisation et de planning relevaient de la compétence de l’assemblée générale extraordinaire statuant à l’unanimité des membres moins un ?
La Cour confirme le jugement du Tribunal de Rouen qui avait tranché en faveur de l’article 15 et déclare n’y avoir lieu à condamnation pour « abus de minorité » à l’encontre des radiologues ayant invoqué le non-respect des règles statutaires à l’appui d’une demande de nullité de résolution de l’assemblée générale.
Les conflits de cette nature sont fréquents, et très souvent ils résultent de la mauvaise rédaction des contrats, statuts, règlements intérieurs ou procès-verbaux d’assemblées générales adoptés dans la joie et la bonne humeur avant les soucis, les retraits, les exclusions et autres évènements non pacificateurs qui contraignent à relire ce qui a été mal maîtrisé juridiquement, dans d’autres temps…

La Lettre du Cabinet - Septembre 2011


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GIE IRM Radiologie Vacations

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Infection nosocomiale en centre libéral : pas de responsabilité sans faute
(Cour d’appel de Caen, 1ère ch., arrêt du 30 janvier 2007)
Isabelle Lucas-Baloup

Les juges caennais ont commencé l’année 2007 en rendant un arrêt qui mérite d’être cité en exemple de parfaite application et respect du droit en matière d’infection à l’occasion des soins. En décembre 2001, un radiologue procède, dans son centre d’imagerie libéral, à une arthrographie de genou. Complications douloureuses dès le lendemain, avec diagnostic d’arthrite septique à streptococus oralis. Il résulte de l’expertise judiciaire sollicitée par le patient demandeur de dommages-intérêts que ce dernier était porteur de plusieurs foyers dentaires infectieux au moment de l’acte, et l’expert en déduit, sans exclure totalement que le germe ait pu être introduit lors de l’examen, qu’ils ont pu essaimer des bactéries dans le sang et entraîner l’atteinte du genou, ajoutant que le germe a pu profiter d’une réaction inflammatoire locale secondaire à l’injection du produit de contraste pour infecter le genou.
Pour la cour de Caen « c’est à juste titre que les radiologues soutiennent que le caractère endogène de l’infection ne fait pas obstacle à ce qu’elle soit reconnue comme constituant une infection nosocomiale dès lors qu’elle a un lien de causalité avec l’examen invasif ». Cependant, en l’espèce, ce n’est pas la responsabilité d’un établissement qui est recherchée par le patient, mais celle du radiologue ayant pratiqué l’examen. En application de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, un médecin ne peut être condamné qu’en cas de faute prouvée. Le rapport d’expertise ayant au contraire estimé que la technique de réalisation et les précautions d’asepsie respectent « le minimum exigible », et aucune faute caractérisée n’étant démontrée, le radiologue n’a pas lieu d’être sanctionné du chef de cette infection nosocomiale intervenue en dehors d’un établissement de santé.
Une bonne nouvelle pour l’ensemble des médecins qui interviennent, explorent, traitent, quel que soit le type d’investigations, en cabinet libéral autonome (ophtalmologistes, gastro-entérologues, dermatologistes, petite chirurgie en office surgery, etc.). La Loi Kouchner les protège : pas de responsabilité sans faute, même en cas d’infection nosocomiale... tant qu’il ne sera pas dans la culture des patients français de choisir leur site d’explorations en tenant compte des chances d’être indemnisé dans l’hypothèse de telles complications !

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Septembre-octobre 2007
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LA RADIOLOGIE PHAGOCYTEE PAR LES FINANCIERS
Isabelle Lucas-Baloup

   Depuis une vingtaine d’années, toutes les entreprises de santé y passent en coupes réglées. Les cliniques privées d’abord, vendues à des groupes relevant de fonds de pension ou d’investissement internationaux qui excellent dans la pratique des LBO du « private equity ». Le nombre d’établissements à but lucratif détenus par quelques groupes préoccupe l’Autorité de la concurrence qui s’emploie à chasser les positions dominantes locorégionales « susceptibles d’affecter le bien-être des patients en réduisant leur liberté de choix et la qualité de l’offre de soins disponible ». Les chirurgiens propriétaires de leurs cliniques ont cédé la place à de nouveaux directeurs à l’œil rivé sur leurs tableaux Excel de taux d’occupation et de rentabilité. Idem dans les EHPAD, à l’ingénierie financière élaborée, dont la concentration conduit à des excès malheureusement pas de confort pour les résidents scandaleusement nourris au niveau 0 de la gastronomie. Les profits réalisés en font un des Eldorado parmi les plus convoités aujourd’hui par les fonds d’investissement puisque s’inscrivant dans le secteur médico-social français le plus rentable. Pas besoin de commenter l’évolution des parts de marché et du reste à charge, qui ont en commun d’augmenter, comme le vieillissement de la population qu’on invite à s’installer, quand les établissements et les listes d’attente sont saturés, dans les filiales du Maghreb ou de l’Europe de l’Est.

   Aujourd’hui, les financiers s’intéressent aux établissements privés spécialisés dans le SSR[1] et la  psychiatrie. Les opérations sur l’immobilier de ces structures de santé sont également pertinemment orchestrées entre les acteurs du marché.

    Concomitamment à leur implication dans les établissements de santé, les financiers envahissent les spécialités médicales et pharmaceutiques à plateaux techniques onéreux. On a d’abord assisté à la restructuration capitalistique des laboratoires de biologie médicale. Le coût exorbitant des procédures d’accréditation, le prix du renouvellement des automates, la baisse de la nomenclature et l’augmentation de l’âge des biologistes historiquement propriétaires de leurs cabinets, les ont conduits à accepter des fusions-acquisitions au profit d’industriels et groupes financiers offrant des prix de parts sociales ou actions de leurs sociétés d’exercice qu’ils ne pouvaient raisonnablement refuser faute de successeurs professionnels capables d’investir à ce niveau tant les valorisations ont monté (on a vu jusqu’à 4 fois le chiffre d’affaires du cabinet). Une gymnastique juridique savante pour contourner les impératifs de la loi sur les sociétés d’exercice libéral (SEL) a permis là encore le développement de la biologie médicale industrielle, au détriment des professionnels « associés » ultra-minoritaires dont l’indépendance – pourtant garantie par la loi et leur code de déontologie - a totalement disparu en pratique à l’arrivée des capitaux extérieurs. Les LBM indépendants qui résistent et se battent pour le maintien de leur autonomie doivent en outre faire face à des pratiques concurrentielles souvent déloyales, sans toujours avoir la disponibilité et la trésorerie pour lancer les actions judiciaires et disciplinaires que le comportement de certains groupes mériterait.  

    Actuellement, après les centres dentaires, ce sont les cabinets médicaux d’anatomo-pathologie, les plateaux techniques de radiothérapie, de médecine nucléaire et d’imagerie médicale que ciblent des groupes extérieurs toujours plus enclins à développer leurs investissements dans des secteurs de la santé stables et à fort potentiel de rentabilité.

 

L’imagerie médicale dans l’œil du cyclone « capital investissement » :

   A l’instar de ce qui s’est passé pour leurs amis biologistes, nombre de radiologues cèdent au chant des sirènes et en même temps leur cabinet à des entités diverses, parfois non encore inscrites au registre du commerce et des sociétés mais pourtant présentées comme des équipes de « radiologues compétents et expérimentés qui se consacrent désormais à la gestion des cabinets de leurs confrères dans leur intérêt supérieur ». Une surévaluation des actifs cessibles des médecins vulnérables, la capacité offerte comme un avantage de réinvestir le prix de vente dans les structures de l’acquéreur aussi nébuleuses soient-elles, le refus ou la difficulté des plus jeunes à emprunter pour s’impliquer dans l’économie du cabinet et dans la reprise de sa gestion, conduisent les plus anciens au bord de la retraite et de la crise de nerfs à vendre au plus offrant, craignant de fermer la porte en bradant à un broker le matériel à un prix proche de l’euro symbolique tout en supportant le coût des licenciements des secrétaires et des manipulateurs.

Si le vendeur cesse d’exercer, son principal souci est le montant du prix de vente. En revanche, lorsqu’il envisage de continuer à pratiquer au sein de la structure à laquelle il cède les éléments de son patrimoine professionnel, il doit poser, avant de signer une lettre d’intention (la fameuse L.O.I. qui l’empêchera de regarder ce qu’on lui propose ailleurs en raison de ses clauses d’exclusivité de négociation), quelques questions au groupe candidat à l’acquisition, afin d’obtenir immédiatement des informations essentielles pour apprécier, au bon moment, la qualité du candidat et du projet présentés :

  • l’organigramme du groupe : pour savoir si le radiologue vendeur a affaire à un investisseur extérieur au milieu de la radiologie, un financier, un fonds de pension ou d’investissement, ou au contraire à un groupe de confrères qui souhaitent se développer,
  • les statuts de la société non exerçante et la répartition de son capital : les financiers se cachent derrière des sociétés par actions simplifiées (les SAS) qui laissent une grande liberté de rédaction et d’adoption d’obligations qui leur sont totalement favorables et confiscatoires des droits essentiels des associés professionnels exerçants et qui s’emboîtent les unes dans les autres au gré de contrats de prestations de services onéreux, de filiales, de holding, etc.

Ce sont là deux points majeurs à vérifier avant de signer toute lettre d’intention ou d’intérêt. Ensuite, le candidat va demander de nombreux documents au cabinet vendeur, qui ne doit pas pour autant manquer de son côté d’obtenir rapidement d’autres informations précises du groupe candidat, notamment :

  • les statuts ou le projet de statuts de la société à intégrer s’il entend continuer à pratiquer,
  • l’existence ou non d’un pacte d’actionnaires et son contenu éventuel, systématiquement piégeant pour les minoritaires,
  • les modalités de calcul du prix de cession : des cédants s’engagent auprès d’un candidat plutôt que les autres en raison d’un prix supérieur aux offres concurrentes lequel va fondre dès la mise en œuvre de formules mathématiques incompréhensibles au premier abord  de calcul du « prix définitif » à la date de réalisation de l’opération voire payable les années suivantes ; il arrive en effet que le prix ne soit pas réglé en totalité à la date de cession du cabinet mais sur plusieurs années avec une obligation pour le radiologue « racheté » s’il continue à exercer de réaliser un certain montant de recettes annuelles en dessous duquel il sera privé d’encaisser « le solde du prix de vente », complément de l’acompte ou du prix de base payé à la signature du Protocole,
  • les détails du projet, holding ou pas, combien d’actions et de quelle nature obtient le radiologue vendeur dans la SELAS dans laquelle il est admis ? Existe-t-il des actions de préférence ? Dans l’affirmative quels avantages confèrent-elles, en sachant que les actions de préférence peuvent signifier « préférence négative », des pertes de pouvoir, par exemple une limitation du droit de vote de leurs titulaires. Les actions de préférence confèrent le plus souvent des droits de vote double ou des dividendes supplémentaires, qui ne sont que rarement concédés aux radiologues rachetés, auxquels on propose plus volontiers des actions ordinaires s’ils ne réinvestissent pas leur prix de vente dans le groupe acquéreur ; si bien que sous l’apparence d’une SELAS[2] démocratique se cache un système ôtant tout pouvoir de gestion aux titulaires des actions ordinaires ;
  • s’il existe une holding, SPFPL[3] ou autre, les cédants sont-ils invités à y obtenir des actions, à quel niveau et à quel prix ? Les considérations fiscales ne doivent pas être négligées ;
  • dans nombre de SELAS, du chef du contrôle des droits financiers par la société non exerçante, les dividendes remontent dans la holding et les radiologues associés exerçants dans la SEL n’en voient pas la couleur ; parfois, il est mentionné dans le pacte d’associés qu’il ne sera délivré aucun dividende pendant une période de croissance de plusieurs années au sein de la SELAS ;
  • en cas de demande de scanner/IRM, voir comment les radiologues vendeurs demeurent éligibles aux fruits de leur exploitation, comment récupérer leur part de bénéfices sur forfaits techniques fréquemment confisqués au motif d’une structuration du groupe qui éloigne de la distribution du résultat d’exploitation les radiologues qui les ont générés par leur travail intellectuel ; il faut alors comparer le bénéfice/risque d’investir dans des sociétés qui portent le matériel, les autorisations des ARS et les frais d’exploitation. Certains opérateurs se sont spécialisés dans l’investissement dans ce type de structures, achètent les plateaux techniques des cabinets d’imagerie médicale pour les relouer ensuite aux radiologues vendeurs en en assurant la gestion opérationnelle, le plus souvent à des tarifs évidemment non favorables aux médecins exerçants ;
  • en ce qui concerne la gouvernance, on rencontre souvent, lorsque le groupe discrimine droits de vote et droits financiers, une concentration des pouvoirs dans une structure, comité de direction, ou comité stratégique peu importe le vocabulaire, au sein de laquelle les décisions sont prises, mais les cédants minoritaires, même présents, n’ont aucune influence sur les décisions. En fait, c’est la holding ou société extérieure financière qui gouverne, avec un médecin nommé président pour que la SELAS soit présentable à l’Ordre des médecins, mais sans autres pouvoirs que ceux que lui confère le comité de direction ou le comité stratégique au sein duquel le pacte d’associés assure la maîtrise du pouvoir aux financiers. Ce comité non seulement décide de tout mais a seul compétence pour convoquer les assemblées générales, si bien que les médecins exerçants perdent toute indépendance, n’ont souvent pas accès aux comptes de la SELAS et leurs voix ne pèsent rien au sein de la gouvernance. Si le radiologue vendeur est en fin de carrière et travaille seulement quelques années, il supportera la situation, mais ce sera moins acceptable pour un plus jeune médecin n’ayant pas imaginé en entrant dans de telles structures qu’il y serait privé de ses droits les plus élémentaires, comme par exemple la perte de la protection réglementaire au moment d’une procédure d’exclusion de la SELAS, remplacée par des clauses à la faveur du groupe dans un contrat d’exercice entre la SELAS et le radiologue qu’il n’a légalement aucune obligation de signer, sa seule qualité d’associé professionnel exerçant lui permettant de pratiquer l’imagerie médicale sans nécessité de signer un contrat supplémentaire entre la SELAS et lui-même, qui pourtant lui a été présenté comme indispensable avant son agrément ;
  • le règlement intérieur est également à analyser, tant il peut être confiscatoire de droits au détriment des associés minoritaires exerçants ;
  • le projet médical, la capacité des médecins exerçants à poursuivre ou pas des activités qu’ils diligentaient dans leur précédent cabinet,
  • les modalités de rémunération des vacations et leur nombre annuel, la prise en charge ou pas par la SELAS des charges sociales, des cotisations à l’Ordre, des assurances, des frais professionnels.

Bref, entrer en négociation aujourd’hui avec un acquéreur de cabinets d’imagerie médicale impose des précautions, de la patience, et, à défaut d’expérience, d’être bien entouré par un expert-comptable et un avocat spécialisés pour lire entre les lignes des contrats savamment préparés par des cabinets d’affaires rompus à ce type d’opérations.

Mais, je le répète, il convient pour le radiologue de déterminer rapidement avec qui il entre en négociation :

  • des confrères loyaux dont le projet consiste à accroître leur périmètre d’intervention locorégional afin d’être suffisamment dotés de fonds propres pour perdurer, avec lesquels il pourra continuer un exercice confraternel de son cœur de métier avec des droits et des devoirs équilibrés dans le respect de la déontologie médicale,
  • ou à des investisseurs externes à la profession qui ont pour obsession la progression à tout prix de leur part de marché et du niveau des bénéfices à distribuer avec comme projet à moyen terme la revente du groupe avec la meilleure plus-value possible, laquelle ne sera pas partagée, quelques années plus tard, avec le radiologue ultra-minoritaire et démotivé pour avoir perdu son indépendance et la maîtrise de son outil de travail.

Un groupe de financiers tentant avec une agressivité stupéfiante de se développer dans le paysage français de l’imagerie médicale a voulu imposer récemment à un de mes clients un pacte d’associés aux termes duquel, quelles que soient les circonstances, le radiologue était privé de communiquer avec autrui y compris l’Ordre des médecins, sur tout fait relatif à son exercice au service d’une structure complexe au sein de laquelle il perdait tous ses droits, sauf celui de remplir les vacations imposées avec des normes de rendement aux antipodes de la déontologie médicale et clairement incompatibles avec l’épanouissement professionnel.

Pas la peine de dénoncer la déshumanisation de la radiologie médicale qui se profile dans ce type de structures, elle est déjà requalifiée par ces acteurs sans scrupules « adaptabilité à l’évolution scientifique et économique », la téléimagerie et l’intelligence artificielle remplaçant avantageusement soutiennent-ils le colloque singulier entre le radiologue faillible du 20ème siècle et son patient de demain. C’est donc aujourd’hui qu’il convient de s’en soucier et de privilégier les groupes d’imagerie médicale à taille humaine en tentant de se prémunir contre les effets pervers des clauses notamment dites de drag along, qui contraignent les associés minoritaires à céder leurs actions en cas d’offre de rachat de 100% du capital par un tiers non désiré.

Quand bien même le pire n’est jamais certain, la financiarisation galopante du secteur mérite bien, du côté des radiologues vendeurs, un peu de prudence, de réflexion, voire de résistance, avant le clic du doigt sur le clavier qui délivrera une signature électronique dont il est préférable que les effets soient parfaitement connus et anticipés aux fins que le consentement du radiologue ne soit pas vicié. Information, consentement, des obligations que les médecins connaissent bien dans leurs relations avec chacun de leurs patients, mais qu’ils négligent - de temps en temps - lorsqu’il s’agit de la défense de leurs propres intérêts.  

 

[1] soins de suite et de réadaptation

[2] société d’exercice libéral de médecins par actions simplifiée

[3] société de participations financières de professions libérales

 
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Radiologue en liquidation judiciaire
(Cour d’appel de Besançon, 2ème ch., 29 avril 2009)
Isabelle Lucas-Baloup

Les procédures collectives frappent de plus en plus de professionnels libéraux.
Un radiologue du Jura ne pouvait faire face immédiatement à l’ensemble de ses dettes fiscales et sociales et l’Urssaf a demandé la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire dès lors que « pour apurer le passif il fallait un règlement annuel correspondant aux bénéfices dégagés avant impôt sur le revenu et prélèvements personnels » et qu’un plan de continuation aurait été trop long compte tenu de l’âge de 62 ans du médecin.
La proposition de son épouse de vendre deux appartements lui appartenant en propre a également été jugée insuffisante « à combler le passif résiduel ».
Voilà pourquoi d’autres professionnels moins scrupuleux créent des sociétés d’exercice (SEL ou SCP) pour s’en retirer prématurément et ainsi faire supporter le passif par leurs associés tenus de leur rembourser la valeur de leurs parts…

La Lettre du Cabinet - Juin 2009


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Liquidation judiciaire Procédure collective Radiologie URSSAF

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