Les juges caennais ont commencé l’année 2007 en rendant un arrêt qui mérite d’être cité en exemple de parfaite application et respect du droit en matière d’infection à l’occasion des soins. En décembre 2001, un radiologue procède, dans son centre d’imagerie libéral, à une arthrographie de genou. Complications douloureuses dès le lendemain, avec diagnostic d’arthrite septique à streptococus oralis. Il résulte de l’expertise judiciaire sollicitée par le patient demandeur de dommages-intérêts que ce dernier était porteur de plusieurs foyers dentaires infectieux au moment de l’acte, et l’expert en déduit, sans exclure totalement que le germe ait pu être introduit lors de l’examen, qu’ils ont pu essaimer des bactéries dans le sang et entraîner l’atteinte du genou, ajoutant que le germe a pu profiter d’une réaction inflammatoire locale secondaire à l’injection du produit de contraste pour infecter le genou.
Pour la cour de Caen « c’est à juste titre que les radiologues soutiennent que le caractère endogène de l’infection ne fait pas obstacle à ce qu’elle soit reconnue comme constituant une infection nosocomiale dès lors qu’elle a un lien de causalité avec l’examen invasif ». Cependant, en l’espèce, ce n’est pas la responsabilité d’un établissement qui est recherchée par le patient, mais celle du radiologue ayant pratiqué l’examen. En application de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, un médecin ne peut être condamné qu’en cas de faute prouvée. Le rapport d’expertise ayant au contraire estimé que la technique de réalisation et les précautions d’asepsie respectent « le minimum exigible », et aucune faute caractérisée n’étant démontrée, le radiologue n’a pas lieu d’être sanctionné du chef de cette infection nosocomiale intervenue en dehors d’un établissement de santé.
Une bonne nouvelle pour l’ensemble des médecins qui interviennent, explorent, traitent, quel que soit le type d’investigations, en cabinet libéral autonome (ophtalmologistes, gastro-entérologues, dermatologistes, petite chirurgie en office surgery, etc.). La Loi Kouchner les protège : pas de responsabilité sans faute, même en cas d’infection nosocomiale... tant qu’il ne sera pas dans la culture des patients français de choisir leur site d’explorations en tenant compte des chances d’être indemnisé dans l’hypothèse de telles complications !
Base de données - Streptococus oralis
Infection nosocomiale en centre libéral : pas de responsabilité sans faute
(Cour d’appel de Caen, 1ère ch., arrêt du 30 janvier 2007)
Isabelle Lucas-Baloup
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Arthrographie Infections nosocomiales Radiologie Streptococus oralis
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