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Un ophtalmologiste condamné pénalement pour ouverture d’un centre autonome requalifié « établissement de santé », non autorisé par l’ARH
(Cour de cassation, ch. criminelle, arrêt du 9 mai 2007)
Isabelle Lucas-Baloup

Un ophtalmologiste exploitait un cabinet relevant d’une SARL dont il était le dirigeant effectif et l’arrêt précise que des brochures publicitaires présentaient les méthodes du Centre en matière de traitement chirurgical de la myopie, de l’hypermétropie, de l’astigmatisme et de la presbytie par utilisation d’un Lasik, et sur le traitement chirurgical de la cataracte ; l’objet statutaire de la société était la gestion d’une unité de diagnostic et de traitement ouverte aux médecins ophtalmologistes et d’autres spécialités ; par ailleurs « l’équipement, notamment celui du bloc opératoire, était conséquent ». La décision de la Cour d’appel attaquée par l’ophtalmologiste devant la Cour de cassation mentionnait « il résulte de ces constatations que, par la nature et la technique des actes pratiqués, par le niveau de ses équipements et installations et par le volume de son activité, le Centre constitue un établissement de santé privé, soumis à ce titre à l’autorisation du ministère chargé de la santé ou de l’agence régionale de l’hospitalisation ».
L’ophtalmologiste a été déclaré coupable du délit prévu et réprimé à l’article L. 6125-1 du code de la santé publique visant le fait d’ouvrir ou de gérer, sans l’autorisation prévue à l’article L. 6122-1 du même code, un établissement de santé défini par les articles L. 6111-1 et L. 6111-2.
La chambre criminelle de la Cour de cassation le déboute de son pourvoi à titre principal, en retenant qu’un tel établissement constitue une structure de soins alternative à l’hospitalisation permettant l’exercice de la chirurgie ambulatoire soumis, lors de sa création, à l’autorisation de l’ARH, dès lors qu’il a pour objet de dispenser, sans hébergement, des soins de courte durée en chirurgie, ce qui caractérise l’élément matériel de l’infraction poursuivie.
Ce délit est sanctionné par une peine de 150 000 € d’amende qui peut être assortie, en cas de récidive, de la confiscation des équipements installés sans autorisation. En l’espèce, le chirurgien a été condamné à une peine plus dissuasive que punitive de 80 000 € d’amende dont 60 000 € avec sursis.
Cette décision ne sera pas la dernière, les textes réglementaires n’étant pas assez précis sur la frontière entre cabinet médical bien équipé et établissement de santé constitué, si on suit cette jurisprudence, par un matériel permettant de diligenter des explorations, interventions et traitements, que les autorités sanitaires ont toléré pendant longtemps sans diligenter de poursuites à l’encontre de leurs fondateurs et exploitants. Le médecin revendiquait par ailleurs le droit à l’erreur, qui lui est clairement refusé.
En l’espèce, c’est une caisse primaire d’assurance maladie qui avait lancé la procédure. Ces mêmes caisses soutiennent aujourd’hui, dans le cadre de contrôles d’établissements de santé dûment autorisés par les ARH relatifs à la mise en œuvre de la nouvelle tarification (T2A), que certains actes, pourtant interventionnels, ne doivent pas être réalisés « en secteur ambulatoire autorisé » et donc pas pris en charge, mais en cabinet de ville... et lancent des procédures de récupération d’indus à l’encontre des établissements de santé dans lesquels ils sont pratiqués pour des raisons de sécurité dans l’intérêt des patients. Ainsi le GHS 8003 a été refusé, par la même CPAM, pour certains actes de chirurgie ophtalmologique, notamment les exérèses de lésions des sourcils et/ou paupières et résections bilatérales cutanées, musculaires et/ou graisseuses des paupières supérieures, actes cotés BAFA005, BAFA006, BAFA008 et BAFA013, au motif qu’ils relèvent des « actes externes » hors chirurgie ambulatoire.
D’autres arrêts ont déjà requalifié en établissements de santé soumis à autorisation de l’ARH un cabinet autonome de gastroentérologie dans lequel étaient diligentées des endoscopies digestives, ou une « maison de naissance ».

La Lettre du Cabinet - Septembre 2007


Mots clefs associés à cet article :
ARH Centre autonome GHS Ophtalmologie SARL T2A

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