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Affaire : Prothèses PIP et matériovilance Bref rappel juridique sur le délit d’omission de signalement à l’Afssaps
Isabelle Lucas-Baloup

Un certain nombre de journalistes, prétendument « spécialisés » en santé, ayant fait circuler des affirmations erronées sur les aspects strictement juridiques du dossier, il est utile de rappeler les quelques textes invoqués au décours de la procédure des prothèses mammaires PIP relatifs à la « matériovigilance » :


Le délit de non signalement à l’Afssaps d’un incident sur un implant :

- Un professionnel de santé ayant eu personnellement connaissance, dans l’exercice de ses fonctions, d’un incident ou d’un risque d’incident « mettant en cause un dispositif médical ayant entraîné ou susceptible d’entraîner la mort ou la dégradation grave de l’état de santé d’un patient, d’un utilisateur ou d’un tiers » doit le signaler sans délai à l’Afssaps.

L’abstention constitue un délit prévu et réprimé par l’article L. 5461-2 du code de la santé publique, de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

La même peine frappe le fabricant, l’importateur ou le distributeur de l’implant.

Pour un implant mammaire, dispositif médical de classe III, le médecin qui constate le vice de la prothèse le déclare au correspondant de matériovigilance de l’établissement de santé (public, privé ou ESPIC) dans lequel l’intervention chirurgicale a eu lieu.

Il pouvait lui-même également déclarer directement l’incident à l’Afssaps, en utilisant le formulaire Cerfa n° 10246*03 qu’on trouve sur le site de l’Agence : www.afssaps.fr.


Déclaration obligatoire ou facultative ?

- 140 incidents de vigilance ont été déclarés sur les implants PIP en gel de silicone de 2001 à fin 2009 (cf. Rapport de la DGS et de l’AFSSAPS du 1er février 2012, intitulé « Etat des Lieux des contrôles opérés par les autorités sanitaires sur la société Poly Implant Prothèse », de 170 pages, disponible sur le site www.sante.gouv.fr). 

- Les médecins qui ont omis de réaliser ce signalement ont parfois considéré qu’il n’était pas obligatoire, en raison du fait que le vice des prothèses mammaires concernées n’avait pas pour effet une « dégradation grave de l’état de santé » de la patiente implantée, les implants viciés pouvant être remplacés, d’après ces praticiens, « sans dommages importants ». 

- D’autres médecins n’ayant pas fait la déclaration, expliquent avoir caractérisé le dysfonctionnement dans la catégorie des « signalements facultatifs », donc non obligatoires, prévus à l’article R. 5212-15 du code de la santé publique, ainsi rédigé :

« Donnent lieu facultativement à un signalement les incidents suivants :

« 1° réaction nocive et non voulue se produisant lors de l’utilisation d’un dispositif médical conformément à sa destination ;
2° réaction nocive et non voulue résultant d’une utilisation d’un dispositif médical ne respectant pas les instructions du fabricant ;
3° tout dysfonctionnement ou toute altération des caractéristiques ou des performances d’un dispositif médical ;
4° toute indication erronée, omission et insuffisance dans la notice d’instruction, le mode d’emploi ou le manuel de maintenance. »


- Aucune jurisprudence n’étant publiée sur le délit d’abstention de signalement d’incident grave de dispositif médical, le classement de l’incident fera évidemment l’objet de plaidoiries nourries, le droit pénal étant d’interprétation stricte et le texte manquant de précision au regard de la qualification de la gravité. 


- L’Afssaps change de nom, elle devient l’« Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ». La loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 « relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé » modifie sensiblement ses pouvoirs et obligations.

Gynéco Online - Mars 2012
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