Base de données - Charge de la preuve

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Clinique privée : charge de la preuve
(arrêt Cour de cassation, 1ère civ., 8 février 2017, n° 16-11.527)
Vincent Guillot-Triller

Placée dans l’unité de surveillance continue d’une Clinique, une patiente opérée d’un cancer du sein décède pendant la nuit.

La Clinique et le praticien à l’origine de l’intervention sont assignés par les ayants droit de la victime qui invoquent devant les juges du fond un défaut de soins appropriés dans les heures qui précèdent le décès.

La Cour d’appel retient qu’aucun manquement du personnel aux règles de bonnes pratiques n’est établi en se fondant uniquement sur le compte rendu de l’infirmière et sur le rapport d’expertise relevant l’impossibilité de répondre à certaines questions de sa mission, en l'absence de transmission d'informations médicales durant la période précédant le décès mais concluant à l’absence de manquement du personnel sur la base de ce même compte rendu infirmier.

La Cour suprême casse la décision en retenant : « Qu’en statuant ainsi, alors qu’en l’absence de communication d’informations médicales relatives à la prise en charge du patient dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre 2009, il incombait à la Clinique d’apporter la preuve que les soins avaient été appropriés à son état de santé, la Cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Cette décision semble parfaitement compréhensible au regard de la situation d’espèce : en principe la Clinique ne répond que des soins courants, c’est-à-dire des soins que les auxiliaires médicaux peuvent pratiquer sans le contrôle d’un médecin.

La responsabilité de la Clinique relève alors de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui. La charge de la preuve de la ou des fautes commises incombe dans ce cas à la victime, mais l’établissement doit être en mesure de produire toutes les informations relatives à la prise en charge du patient pendant son hospitalisation. A défaut, c’est à lui de prouver que les soins délivrés étaient appropriés à l’état de santé du malade.

La Lettre du Cabinet - Septembre 2017


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Charge de la preuve Clinique Etablissement de santé

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Infections nosocomiales : la charge de la preuve incombe au patient
(Cass. Civ. 1, 30 octobre 2008, n° 07-13.791, Clinique Chantecler, EFS)
Anne-Sophie Grobost

Dans le cadre de la contamination d’une patiente par le virus de l’hépatite C suite à des transfusions sanguines reçues lors d’une intervention chirurgicale, la Cour de cassation censure l’arrêt d’une cour d’appel qui retient qu’en matière d’infections nosocomiales la charge de la preuve n’incombe pas au patient.
L’arrêt rappelle qu’au contraire il appartient au patient ou à ses ayants droit de démontrer le caractère nosocomial de l’infection, fût-ce par présomptions graves, précises et concordantes.

La Lettre du Cabinet - Juin 2009
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Le patient doit démontrer le caractère nosocomial de l’infection
Isabelle Lucas-Baloup

La 1ère chambre civile de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 30 octobre 2008, confirme sa précédente jurisprudence en matière de charge de la preuve qui incombe au patient demandeur à une réparation du préjudice subi en raison d’une infection nosocomiale :
« Vu les articles 1147 et 1315 du code civil ; Attendu qu’il incombe au patient ou à ses ayants droit de démontrer le caractère nosocomial de l’infection, fût-ce par présomptions graves, précises et concordantes. »
Les hauts magistrats cassent et
annulent un arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence qui avait affirmé, au contraire, qu’en matière d’infection nosocomiale la charge de la preuve n’incomberait pas au patient...
La loi Kouchner n’ayant créé, sur ce point, aucune exception aux grands principes de droit commun selon lesquels la charge de la preuve incombe au demandeur et que celui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver, cet arrêt pourra être invoqué dans la plupart des contentieux relatifs aux infections liées aux soins.

Revue Hygiène en Milieu Hospitalier - Novembre-décembre 2008
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Perte du dossier médical = perte de chance ?
Isabelle Lucas-Baloup

Arrêt très intéressant de la Cour d’appel d’Aix en Provence rendu le 7 septembre 2011 : la clinique dans laquelle a eu lieu un accouchement, qui confie ses archives à une société extérieure, n’est pas en mesure de le produire à l’occasion d’un procès engagé par les parents de l’enfant qui a subi des lésions destructrices du cerveau acquises en période per et post-natale.
Qui est responsable ? la clinique, l’obstétricien, la société d’archivage qui a détruit le container dans lequel était le dossier médical ? 


Une parturiente est hospitalisée un 13 novembre dans une clinique de Marseille et le gynécologue-obstétricien lui prescrit, pour le déclenchement de l’accouchement le terme étant dépassé, une prostaglandine intra-vaginale et le lendemain matin une perfusion de Syntocinon. L’enfant naît à 10h50 avec un score d’Apgar bas, après aide à l’expulsion par spatules et épisiotomie. Il présente des convulsions dans l’après-midi, est transféré à l’Hôpital de la Timone en réanimation néonatale puis dans le service de neurologie.

L’expert nommé conclura que l’enfant a présenté des lésions destructrices acquises et non constitutionnelles du cerveau survenues et développées en période per et post-natale, l’élément déclenchant qui explique les crises initiales étant une hémorragie sous-durale, compliquée d’un état de mal épileptique prolongé à l’origine de lésions destructrices secondaires du cerveau, l’hémorragie pouvant s’expliquer par les contraintes exercées sur la boîte crânienne dans le pelvis, sa rotation, son expulsion et possiblement à l’extraction instrumentale. Les examens d’imagerie réalisés ultérieurement confirment la nature séquellaire destructrice post-natale des lésions cérébrales.

L’expert précise qu’après déclenchement de l’accouchement par perfusion de Syntocinon, rupture artificielle des membranes et analgésie péridurale, il ne peut déterminer du fait de l’absence des feuillets d’ERCF du travail, si une souffrance fœtale est apparue en cours de dilatation, qui aurait alors justifié une césarienne. La conduite de déclenchement de l’accouchement par maturation du col par mise en place de prostaglandine le 13 novembre semble avoir été réalisée selon les bonnes pratiques, mais l’expert ne peut déterminer si pendant les premières heures de la pose du gel de prostaglandine la surveillance clinique et l’ERCF par la sage-femme a été faite selon les bonnes pratiques en salle de travail et si le fœtus supportait bien les contractions, indiquant par ailleurs que les prostaglandines ne sont pas sans danger d’hypertonie utérine, cause de souffrance fœtale aiguë.

Le gynécologue-obstétricien a indiqué avoir pratiqué une aide à l’expulsion par spatules sous épisiotomie, tandis que la sage-femme l’aidait par une expression utérine, devant l’apparition sur une tête engagée de ralentissements qu’il qualifie de « ralentissements d’engagement ».

L’expert indique par ailleurs que la réalisation du forceps n’est pas critiquable, l’aide à l’expulsion n’ayant donné lieu à aucun traumatisme cutané ou osseux et que la prise en charge pédiatrique semble avoir été réalisée selon les bonnes pratiques.

L’arrêt du 7 septembre 2011 expose que la clinique n’a pas pu produire, pendant l’expertise, le dossier médical de la parturiente et de son fils en raison, soutenait la clinique, d’un « événement revêtant pour elle les caractères de la force majeure », dans la mesure où il était légitime pour elle de confier la gestion de ses dossiers à une société d’archivage, laquelle n’a pas été en mesure de restituer le dossier au moment où la clinique l’a demandé. Une enquête réalisée par la société d’archivage a conduit au constat que le container dans lequel le dossier médical était conservé a été détruit. Néanmoins, la clinique et la société d’archivage n’ont pas produit le contrat signé entre les deux sociétés de telle sorte que la Cour n’a pas pu analyser les obligations de la société d’archivage concernant la durée de conservation et les modalités de destruction des dossiers dont elle avait la charge.

La clinique soutenait néanmoins que les destructions étaient conditionnées par un ordre préalable de sa part, la société d’archivage produisait un courrier listant des containers à détruire mais n’a pas justifié de l’ordre de destruction qu’elle soutenait avoir reçu de la clinique pour le container contenant le dossier litigieux.

La Cour d’Aix-en-Provence a donc jugé qu’en procédant à cette destruction de sa propre initiative, la société d’archivage a commis une faute à l’égard de son cocontractant, la clinique. Cette faute ne peut toutefois revêtir les caractères de la force majeure pour la clinique, la conservation du dossier médical étant une obligation incombant à l’établissement et les conséquences de son non-respect devant être supportées par celui-ci vis-à-vis du patient, la destruction du dossier par la société d’archivage à laquelle elle avait choisi de confier l’exécution de sa propre obligation ne présentant pas les caractères d’irrésistibilité et d’extériorité de la force majeure.

L’arrêt du 7 septembre juge néanmoins que la perte du dossier par la clinique n’a pas pour effet d’inverser la charge de la preuve ni de dispenser les parents de démontrer que les éléments contenus dans ce dossier étaient susceptibles de leur permettre d’établir les fautes commises par l’obstétricien, qui n’était pas le préposé de la clinique exerçant à titre libéral, aucun défaut de prise en charge par le personnel médical de la clinique n’étant par ailleurs démontré par les demandeurs aux dommages et intérêts.

La Cour d’Aix juge en conséquence :

« Il résulte de ces éléments que l’absence du dossier médical de la parturiente, établi à partir du 13 novembre, a supprimé pour l’expert toute source de renseignements médicaux directs pour l’accouchement et les premiers soins à l’enfant dans le service de maternité, et ne lui a pas permis d’exclure totalement la possibilité d’une souffrance fœtale s’étant produite suite au déclenchement de l’accouchement et pas seulement en fin de travail, le résumé d’observations effectué par l’Hôpital de la Timone où l’enfant a été hospitalisé le 18 novembre (mentionnant en particulier ?pas de SFA retrouvées sur le monitoring en dehors de quelques DIP 1?) étant insuffisant pour déterminer avec précision la date d’apparition de la souffrance fœtale, le résumé d’accouchement établi par le gynécologue-obstétricien ne pouvant être pris en compte puisque émanant de la partie dont la responsabilité est susceptible d’être mise en cause, […].

« L’existence d’une souffrance fœtale effective apparue avant la phase d’expulsion aurait dû conduire le gynécologue-obstétricien à pratiquer une césarienne, ce qui aurait évité les difficultés de l’expulsion et la formation d’un hématome sous-dural.

« L’absence des éléments du dossier d’accouchement prive par conséquent les parents d’une chance de pouvoir démontrer la faute de l’obstétricien, perte de chance que le Tribunal a exactement fixée à 50 %.

« La responsabilité de la clinique est en conséquence engagée à l’égard des parents dans cette proportion, sans que la société d’archivage puisse utilement soutenir que l’obstétricien aurait dû lui-même conserver un double des enregistrements litigieux, l’obligation des médecins d’établir une fiche d’observation pour chacun de ses patients n’impliquant pour eux celle de solliciter des établissements de soins dans lesquels ils exercent à titre libéral un duplicata des enregistrements qui y ont été réalisés pour les joindre à leur dossier. »

En conclusion : les obstétriciens doivent être vigilants à la bonne conservation des dossiers médicaux qu’ils confient aux cliniques, particulièrement lorsque celles-ci les archivent en les confiant à des sociétés extérieures, avec lesquelles les relations contractuelles ne sont pas toujours parfaitement maîtrisées. C’est à l’occasion de procédures de cette nature qu’on le constate, et le regrette, dans l’intérêt de toutes les parties en cause : l’obstétricien, la clinique, la société d’archivage mais également et surtout les parents et l’enfant !

Gyneco Online - Septembre 2011
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