Base de données - Cataracte

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Cataracte apparaissant après pose d’implants. Aléa thérapeutique. Mais condamnation pour information préopératoire insuffisante.
(Arrêt Cour d’appel de Bourges, ch. civile, 30 juin 2011, n° 10/00368)
Isabelle Lucas-Baloup

Un patient est victime d’une cataracte à la suite de la pose d’implants oculaires. L’ophtalmologiste n’est responsable ni de la conception ni de la fabrication.
En revanche, il a manqué à son devoir d’information quant au risque de développer une cataracte en réaction à la pose des implants faisant ainsi perdre au patient une chance de renoncer à l’opération envisagée, perte de chance que les juges ont évaluée à 70% .
La société qui a vendu les implants doit en être considérée comme le « producteur », peu important qu’elle en ait confié la fabrication à une autre société. Le problème que tranche l’arrêt est de définir si l’implant était défectueux, au sens de l’article 1386-4 du code civil : « Un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. ». En l’espèce, le défaut de l’implant n’était pas établi et ne saurait résulter du seul développement d’une cataracte par le patient suite à son implantation, ce développement étant qualifié par l’expert nommé d’aléa thérapeutique en raison de la réaction de ce patient en particulier. Le fait que les implants aient fait l’objet d’un rappel puis d’un arrêt de commercialisation, 3 années après l’intervention pratiquée, est sans effet, dès lors que cet arrêt de commercialisation n’est pas consécutif à l’apparition soudaine d’une cataracte chez des patients mais à une perte de cellules endothéliales dans les 2 ou 3 années suivant l’intervention constatée chez plusieurs patients.

SAFIR - Mars 2012
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Cataractes opérées en dehors d’un établissement de santé : pas de prise en charge par la CPAM
(Arrêt Cour de cassation, 2ème chambre civile, 20 mai 2010, n° 09-14.145)
Isabelle Lucas-Baloup

La Cour de cassation annule un jugement du TASS de Cahors, qui avait ordonné la prise en charge, par la CPAM locale, d’une intervention chirurgicale de la cataracte réalisée par un chirurgien ophtalmologiste en son cabinet libéral en ville, en retenant :
« que le conseil régional de l’ordre des médecins du Limousin avait, après une visite du cabinet médical du Dr Y., vérifié que les moyens en matériel et en personnel de la structure correspondaient aux besoins des interventions chirurgicales qui y étaient réalisées, que les obligations de prudence et de comportement étaient respectées par le praticien, que la caisse n’établissait pas que les conditions avaient changé et que tous les patients dépendant du cabinet avaient été remboursés jusqu’à l’automne 2006 et depuis juin 2008, de telles incohérences administratives ne pouvant être opposées aux assurés qui doivent bénéficier sur l’ensemble du territoire d’une égalité de traitement ».
La Cour de cassation ne partage pas cette opinion et, très classiquement !, rappelle que la prise en charge est prévue et organisée par les articles L. 162-21 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, et les articles L. 6111-1 et -2 et L. 6122-1 du code de la santé publique et « qu’en vertu du premier de ces textes, l’assuré ne peut être couvert de ses frais de traitement dans les établissements de santé de toute nature que si ces établissements sont autorisés à dispenser des soins aux assurés sociaux ; qu’il résulte de la combinaison de trois derniers que constituent des établissements de santé soumis à autorisation de l’agence régionale d’hospitalisation [aujourd’hui de santé] les structures alternatives à l’hospitalisation qui ont pour objet de dispenser avec ou sans hébergement des soins de courte durée en chirurgie ou des soins de chirurgie ambulatoire. » L’arrêt conclut qu’en se déterminant comme il l’a fait le jugement, sans rechercher si le cabinet d’ophtalmologie du Dr Y., dans lequel il pratiquait des opérations de la cataracte sous anesthésie locale par instillation de collyre, constituait un établissement de santé soumis à autorisation, n’a pas donné de base légale à sa décision. L’affaire est envoyée au TASS d’Agen.

--> Les ophtalmologistes doivent être prudents dans la position qu’ils adoptent au regard de leur exercice de la chirurgie (mais où commence et où s’arrête la définition de l’acte chirurgical, c’est tout le problème non parfaitement réglé à ce jour, en droit). Il convient de se souvenir à ce titre de la condamnation, par la chambre criminelle de la Cour de cassation, d’un ophtalmologiste qui exploitait un « centre d’ophtalmologie autonome » jugé coupable du délit prévu et réprimé à l’article L. 6125-1 du code de la santé publique visant le fait d’ouvrir ou de gérer, sans l’autorisation prévue à l’article L. 6122-1 du même code, un établissement de santé défini par les articles L. 6111-1 et L. 6111-2.
(cf. site web lucas-baloup.com, La Lettre du Cabinet de septembre 2007, archives, « ophtalmologie », arrêt du 9 mai 2007).
Madame Bachelot, ancien ministre de la Santé, a annoncé pendant au moins deux ans, la promulgation d’une réforme du droit des autorisations, avec la possibilité d’autorisations adaptées aux centres autonomes (qui existent aussi dans d’autres spécialités que l’ophtalmologie, telles que les centres d’explorations en gastro-entérologie, les centres de médecine esthétique, etc.), mais il semble que le lobbying des établissements de santé autorisés par les ARS ait été efficace pour s’opposer à la publication de ce texte.

SAFIR - Avril 2011
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Décollement de rétine après intervention sur cataracte. C.H. responsable ; indemnisation du préjudice.
(Arrêt Cour administrative de Versailles 2 avril 2008, n° 05VE00548)
Isabelle Lucas-Baloup

Intervention sur cataracte de l’œil D dans hopital public ;
infection endoculaire apparue ultérieurement, provoquant un décollement rétinien qui a nécessité une nouvelle intervention chirurgicale un mois plus tard dans un autre C.H.
Complication constatée et traitée tardivement ;
Le C.H. n’a pas contesté sa responsabilité.
Evaluation du préjudice dû au patient, électricien.
L’arrêt énonce : « Si l’acuité visuelle de l’œil droit s’établit à 1/20ème et n’est pas améliorable, comme l’indique l’expert, les allégations du requérant selon lesquelles ce handicap l’aurait privé d’un avancement ou d’une promotion ne sont assorties d’aucun commencement de justification ». 
- Incapacité permanente partielle de 20% évaluée sur la base d’un état antérieur de cataracte ayant donné lieu à la pose d’un implant : 25 000 € pour le préjudice à caractère personnel.
Souffrances endurées : 3 sur une échelle de 1 à 7 : 4 000 €.
Préjudice esthétique : 1 sur 7 : 1 000 €.
Total : 30 000 €.

SAFIR - Mars 2009
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Défaut d’information avant l’acte chirurgical (cataracte) : préjudice d’impréparation (Cour d’appel de Paris, pôle 2, 30 janvier 2015)
Isabelle Lucas-Baloup

Un patient, opéré de la cataracte, présente une rupture capsulaire responsable d’un œdème cornéen G. Le chirurgien ne démontre pas avoir informé le patient sur les risques de l’opération, le dossier médical ne comporte aucune indication sur la qualité de l’information. La cour d’appel de Paris juge que le fait que le patient a consulté 4 fois le chirurgien avant l’opération ne suffit pas à lui seul à établir son consentement éclairé, et particulièrement sur l’information de la complication de rupture capsulaire qui s’est réalisée.
L’ophtalmologiste est condamné à réparer le préjudice d’impréparation que l’arrêt définit comme « un droit personnel, détaché des atteintes corporelles » dont la lésion entraîne un « préjudice moral résultant d’un défaut de préparation psychologique aux risques encourus et du ressentiment éprouvé à l’idée de ne pas avoir consenti à une atteinte à son intégrité physique ». 5 000 €.

La Lettre du Cabinet - Septembre 2015
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Dommage intervenu dans le cadre de l’activité libérale d’un ophtalmologiste à l’hôpital. Conditions de la responsabilité du CHU non réunies en raison du matériel utilisé Notion nouvelle de « données avérées de la science »
(Arrêt Cour administrative d’appel de Bordeaux 18 mars 2008, n° 06BX01825)
Isabelle Lucas-Baloup

Brûlure rétinienne par photo-traumatisme intervenue en raison de la lumière émise par le microscope utilisé lors de l’opération de la cataracte nucléaire par phakoémulsification subie en 1998, dans le service libéral d’un ophtalmologiste PH en CHU.

Apparition des premiers symptômes de l’affection quelques jours après l’intervention.

Rappel par l’arrêt du droit applicable :
« Les rapports qui s’établissent entre un patient et un praticien hospitalier autorisé, par convention avec l’établissement public de santé dont il dépend, à y exercer une activité libérale en sus de son service, suivant les modalités définies par ces dispositions, relèvent du droit privé ; ledit établissement public ne saurait, dès lors, être rendu responsable des dommages causés à ce patient, ainsi admis dans ses services à titre privé, lorsque de tels dommages trouvent leur origine dans un agissement prétendument fautif imputé au praticien en cause ; sa responsabilité peut en revanche être engagée lorsque les dommages invoqués ont pour cause un mauvais fonctionnement du service public, résultant soit d’une faute commise par un membre du personnel auxiliaire de l’hôpital mis à la disposition des médecins, chirurgiens et spécialistes, pour les besoins de leur exercice libéral, soit d’une mauvaise installation des locaux, soit enfin de la défaillance des produits et appareils de santé ; dans ce dernier cas, la responsabilité du service public hospitalier peut être recherchée en l’absence même de toute faute de sa part, sans préjudice d’un éventuel recours en garantie contre le fabricant du produit ou appareil défectueux, et sans qu’y fasse obstacle ce régime spécial de responsabilité étant distinct du régime général de responsabilité du fait des produits défectueux dont les principes résultent de la directive communautaire n° 85/374 du 25 juillet 1985 actuellement transposée en droit interne par les articles 1386-1 et suivants du code civil, la circonstance que le fabricant du matériel en cause peut être identifié ; »

Il est finalement jugé que l’appareil utilisé était de conception ancienne n’ayant pu être équipé, lors de sa révision en 1997, du modulateur recommandé notamment par une circulaire ministérielle du 11 juin 1996. « Toutefois, l’intensité lumineuse du microscopie opératoire en cause ne révèle pas une défaillance de l’appareil et n’a pas été, lors de l’intervention, supérieure aux données fournies par son fabricant ; »
Son utilisation pour les besoins d’opérations de cette nature n’était pas contraire aux normes en vigueur et demeurait compatible avec les données avérées de la science. Il ne saurait dès lors être regardé, nonobstant la disponibilité, sur le marché de l’équipement médical, de matériels plus perfectionnés, comme présentant un défaut de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire. » 

-->  Il est intéressant de lire que la juridiction administrative fait référence aux « --onnées avérées de la science ». On se souvient que le code de déontologie médicale fait obligation aux ophtalmologistes de donner des soins « consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents » (article R. 4127-32, code de la santé publique).

-- > C’est dans la loi du 4 mars 2002 (loi dite Kouchner) qu’on trouve pour la première fois la notion de « connaissances médicales avérées », à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique : « Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. » 


-->  Dans chaque cas, ce sont les experts nommés qui informent la juridiction saisie de l’état de l’art, ce qui peut évidemment générer des discussions techniques, médicales et plus généralement scientifiques sur ce qui est « avéré », « acquis », « actuel » ou obsolète…

SAFIR - Mars 2009


Mots clefs associés à cet article :
Cataracte Décollement de rétine Indemnisation Ophtalmologie

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Dommages-intérêts obtenus par un ophtalmologiste victime d’une dénonciation calomnieuse de la part d’une patiente devant le Conseil de l’Ordre des médecins
(Arrêt Cour d’appel de Bordeaux, 5ème ch. civile, 26 octobre 2011, n° 2009/07510)
Isabelle Lucas-Baloup

Une patiente est opérée de la cataracte sur son œil D, et devait l’être par le même chirurgien de l’œil G une semaine plus tard. Déçue du résultat, elle change d’ophtalmologiste, et subit ailleurs son intervention sur l’œil G.
Elle saisit le Conseil de l’Ordre des médecins pour accuser le premier chirurgien qui d’après elle « n’aurait pas dû opérer son meilleur œil en premier » et aurait donc « commis une erreur grave en opérant un œil que l’on n’aurait jamais dû toucher ». Une expertise conclut que le chirurgien attaqué avait donné des soins conformes aux données de la science à l’époque des faits. Ce dernier lance une action pour faire condamner la patiente à des dommages-intérêts pour dénonciation calomnieuse.
L’arrêt juge : « En accusant le chirurgien d’avoir effectué une intervention injustifiée sur un œil valide, alors qu’elle savait que cela était faux, la patiente a procédé à une dénonciation calomnieuse » et l’ophtalmologiste peut obtenir réparation du préjudice matériel qui est la conséquence de la dénonciation auprès de l’Ordre (pas de l’action en référé-expertise également lancée par la patiente).
Il est retenu une demi-journée de perdue pour se défendre, soit la privation, d’après une attestation de l’expert comptable de l’ophtalmologiste, de 1300 €, et 1000 € en réparation de son préjudice moral. Le reste de l’arrêt ne présente pas d’intérêt à commenter.

SAFIR - Mars 2012
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Endophtalmie après intervention sur cataracte Clinique responsable. Indemnisation du préjudice
(Arrêt Cour d’appel Aix en Provence 22 avril 2008, n° 06/04099)
Isabelle Lucas-Baloup

Intervention sur cataracte de l’œil D, implant, dans clinique privée, en 2003, F ; endophtalmie aiguë avec staphylocoque coagulase négatif.
Réintervention, vitrectomie avec ablation du vitré opacifié.
Responsabilités encourues :
- Clinique responsable de l’infection nosocomiale, en application de l’article L. 1142-1 code de la santé publique (loi Kouchner applicable).
- Responsabilité de l’ophtalmologiste uniquement en cas de faute dans le cadre d’une obligation de moyens : pas de faute en l’espèce.
Evaluation du préjudice :
Pretium doloris : 3 sur une échelle de 1 à 7 : 5 000 €
Déficit fonctionnel temporaire : 1,5 mois, 1 050 €
Pas d’Incapacité Permanente Partielle, pas de préjudice esthétique, pas de préjudice d’agrément.
Total : 6 050 €.

SAFIR - Mars 2009


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Cataracte Endophtalmie Infections nosocomiales Ophtalmologie

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Infection après intervention sur cataracte Clinique responsable. Indemnisation du préjudice.
(Arrêt Cour d’appel d’Aix en Provence 15 janvier 2008, n° 06/02690)
Isabelle Lucas-Baloup

Infection après intervention dans clinique privée sur cataracte œil G en 1997, H, maçon chef d’entreprise, 60 ans.
Condamnation de l’établissement à payer en réparation du préjudice :
IPP : 10% : 9 000 €
Déficit physiologique : 4 500 €
Pretium doloris : 4 sur 7 : 4 500 €
Préjudice esthétique : 1 sur 7 : 1 000 €
Total : 19 000 €.

SAFIR - Mars 2009
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Opération de la cataracte sous AG : intubation buccale à l’origine de la perte de 10 dents supérieures, anesthésiste pas fautif
(Cour d’appel de Rennes, 7ème ch., 1er avril 2009, JurisData 2009-376931)
Isabelle Lucas-Baloup

L’anesthésiste n’avait pas informé le patient du risque de lésions dentaires lié à l’anesthésie générale avec intubation buccale, indiquée en raison de l’état cardiovasculaire fragile avec HTA, insuffisance cardiaque compensée et arythmie traitée par AVK, la prise d’anticoagulants prohibant une anesthésie locorégionale. La Cour de Rennes juge que le malade n’établit pas son préjudice, la nécessité de changer de bridge étant antérieure à l’intervention chirurgicale et compte tenu de l’état de morbidité majeure de la dentition du patient.

La Lettre du Cabinet - Juin 2009


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Anesthésie Cataracte Information Intubation Ophtalmologie

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Produits visqueux en chirurgie de la cataracte : liberté de prescription et risques professionnels
Isabelle Lucas-Baloup

La liberté de prescription de l’ophtalmologiste constitue un principe essentiel garanti par le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale. Plutôt que rédiger des commentaires, permettez-moi de rappeler les textes en vigueur qui établissent d’une manière on ne peut plus claire cette liberté encadrée mais sans cesse réaffirmée :


1. La liberté de prescription de l’ophtalmologiste :

- Article R. 4127-8, code de la santé publique (CSP) :

« Dans les limites fixées par la loi, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance.
« Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins.
« Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles. »

- Article L. 5123-7, CSP :

« Afin d’éviter le gaspillage des médicaments et sans porter atteinte à la liberté des prescriptions médicales, des modalités particulières peuvent être fixées par décret pour la délivrance des médicaments aux bénéficiaires d’un régime d’assurance maladie et aux bénéficiaires de l’aide sociale. »

- Article D. 5232-5, CSP :

« Le prestataire de services et le distributeur de matériels prennent en charge la personne malade ou présentant une incapacité ou un handicap avec la même conscience sans discrimination et sans chercher à exploiter sa confiance en vue d’un avantage personnel ou financier.

« Il leur est interdit toute pratique qui risquerait de compromettre l’indépendance de l’équipe médicale en charge de la personne malade ou handicapée vis-à-vis de sa liberté de prescription. »


- Article L. 162-2, code de la sécurité sociale :

« Dans l’intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par le malade, la liberté d’installation du médecin, sauf dispositions contraires en vigueur. » 

-->  La liberté de prescription constitue un principe fondamental.


2. L’intérêt du patient et de la santé publique :

La liberté de prescription s’exerce en tenant compte notamment de l’efficacité du produit, de la sécurité sanitaire au regard de l’état de l’art et du coût du produit à qualité équivalente.

Deux dispositions du code de la santé publique l’organisent, le code de la sécurité sociale l’encadre :

- Article L. 1110-5, CSP, alinéa 1er :

« Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés, de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. »

- Article R. 4127-32, CSP :

« Le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science. » 

--> L’intérêt supérieur du patient gouverne la prescription, dont la qualité est appréciée par rapport à l’état de l’art (les « connaissances médicales avérées » de la Loi Kouchner ou les « données acquises de la science » du code de déontologie).


- Article L. 162-2-1, CSS :

« Les médecins sont tenus, dans tous les actes et prescriptions, d’observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins. »

Si l’UNCAM a été habilitée par le législateur à établir et proposer un contrat type comportant des engagements individualisés sur l’activité des médecins conventionnés, notamment en matière de prescriptions médicamenteuses, contenant des objectifs quantifiés en matière de prescriptions moins onéreuses à l’efficacité comparable, sous réserve qu’elles soient conformes aux données actuelles de la science, l’adhésion au contrat est laissée à la libre décision du praticien (article L. 162-12-21, CSS et article 2 décision du 9 mars 2009 de l’UNCAM), ainsi que vient de le juger le Conseil d’Etat dans un arrêt n° 329069 du 7 avril 2011.

Il a été également déjà jugé que si les partenaires conventionnels peuvent instituer des obligations individuelles ou collectives portant sur l’activité des médecins conventionnés en matière de prescriptions médicamenteuses, ces obligations ne sauraient avoir pour effet de retirer aux médecins ayant adhéré à la convention leur liberté de prescription. Pas plus les avenants à la convention ne sauraient avoir légalement pour effet d’étendre la portée du droit reconnu aux pharmaciens par l’article L. 5125-23 du CSP de substituer à une spécialité prescrite (médicament ou autre produit) une spécialité du même groupe générique (arrêt Conseil d’Etat, n° 261746, 1er octobre 2004). 

--> Ainsi, les dispositions tarifaires ne peuvent pas non plus avoir pour effet de constituer des atteintes à la liberté de prescription du médecin.


3. Responsabilités encourues :

Lorsqu’il a évalué le bénéfice/risque du traitement qu’il propose, dans le cadre de sa liberté de prescription, dans l’intérêt supérieur du patient, après s’être assuré du consentement de ce dernier (dans les conditions prévues à l’article L. 1111-2 du CSP), le chirurgien engage sa responsabilité, comme tout professionnel, mais uniquement s’il a commis une faute (de diagnostic, de traitement, une maladresse, une négligence, etc.) :

- Article L. 1142-1, CSP, alinéa 1er :

« I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. »


--> La jurisprudence définit la faute de l’ophtalmologiste, en appréciant son comportement le plus souvent après expertise. Le chirurgien doit donc prévoir d’apporter la preuve de la qualité de son geste, de son choix, de sa prescription dans l’intérêt du patient.

Certains établissements tentent néanmoins de considérer que constituerait une faute la prescription d’un produit de santé non spécifiquement prévu en interne, le plus souvent la Commission du médicament et des dispositifs médicaux stériles (Comedims) prévue aux articles L. 5126-5 et R. 5126-48 du CSP, chargée d’établir la liste des « médicaments et dispositifs médicaux stériles dont l’utilisation est préconisée dans l’établissement » et des « recommandations en matière de prescription et de bon usage des médicaments et des dispositifs médicaux stériles ».

Mais, on le vérifie à la seule lecture des dispositions légales et réglementaires l’instituant, la Comedims n’a pas pour mission d’imposer : elle « préconise », elle « recommande », on est loin d’un pouvoir d’ordonner ou de décréter ce qui serait ou non autorisé dans l’établissement de santé, public ou privé.

--> Ainsi, le médecin a les moyens légaux et réglementaires de faire respecter par ses différents partenaires et interlocuteurs sa liberté de prescription. Cela crée, évidemment, à sa charge, une obligation de leur expliquer la qualité et la pertinence de ses choix de prescription.

Réalités Ophtalmologiques
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