Base de données - Autorisation de site distinct

Déontologie médicale : autorisation de sites distincts (Alinéa 4 des articles R. 4113-23 et R. 4127-85 du CSP)
Jonathan Quaderi

Depuis l’intervention du décret n° 2012-884, du 17 juillet 2012, relatif aux lieux d'exercice des sociétés d'exercice libéral (SEL), les projets portés par ces structures en vue d’être autorisées à exercer une activité médicale sur un ou plusieurs sites distincts de leur résidence professionnelle doivent, à certains égards, satisfaire au respect de conditions quasiment identiques à celles que connaissent, depuis plusieurs années déjà, les médecins pratiquant leur art à titre individuel (cf. art. R. 4127-85 du code de la santé publique) et les sociétés civiles professionnelles (cf. art. R. 4113-74 du même code et CE, 7 juillet 2010, n° 323995 : « Pour l'application [des] dispositions relatives [à ce] mode d'exercice […], il appartient aux instances ordinales de veiller également à l'application de l'article R. 4127-85 [dudit] code »).

   Au nombre de ces conditions, comptent celles fixées au 4ème alinéa des articles R. 4113-23 et R. 4127-85 du CSP prévoyant qu’un site distinct peut être accordé, dans l’intérêt de la population, lorsque les investigations et les soins envisagés « nécessitent un environnement adapté, l'utilisation d'équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants ».

 

   Le Cabinet étant souvent interrogé sur le contenu et l’étendue de cette formulation, voici, ci-après, mais sans être exhaustif, quelques exemples d’investigations et soins à entreprendre sur lesquels le Conseil national de l’Ordre s’est déjà prononcé :

 

   Constitue la mise en œuvre de « techniques spécifiques » la pratique de « gestes de phlébectomie en ambulatoire » (CNOM, 16 septembre 2009, dossiers nos 104 et 105) ou, encore, d’actes « de petite chirurgie dermatologique » (CNOM, 16 septembre 2009, dossier n° 101) ou réalisés « dans le domaine de la chirurgie mini invasive du pied » (CNOM, 14 décembre 2007, dossier n° 24) mais, en aucun cas, la mise en œuvre d’une « méthode dite de "lipotomie" »(CNOM, 20 février 2013, dossier n° 223), le « […] recours à la technique de sclérothérapie par échosclérose à la mousse et une "possible" prise en charge des varices par laser endoveineux ou radiofréquence » (CNOM, 7 février 2013, dossier n° 1921), l’utilisation d’un « matériel dénommé "Finemeter pro" » en acupuncture (CNOM, 13 décembre 2012, dossier n° 1914), des « retouches de blépharoplastie, des injections de produit de comblement ou de Botox » (CNOM, 20 octobre 2011, dossier n° 1841), « l’abord psychanalytique de la pédopsychiatrie » (CNOM, 22 juin 2006, dossier n° 1475), etc.

 

   Par ailleurs, le Conseil a considéré qu’il pouvait effectivement y avoir, dans certaines circonstances, « coordination de différents intervenants » au bénéfice d’un praticien qualifié spécialiste en chirurgie maxillo-faciale et en stomatologie souhaitant exercer dans le cabinet d’un confrère chirurgien plasticien et esthétique (CNOM, 10 février 2011, dossier n°1812), à celui d’un praticien qualifié spécialiste en psychiatrie en vue de réaliser des examens neurophysiologiques au sein d’une clinique, (CNOM, 7 octobre 2010, dossier n° 1787), voire même au profit d’un praticien qualifié spécialiste en stomatologie et compétent en chirurgie maxillo-faciale envisageant d'effectuer des consultations au sein d’un cabinet de chirurgiens-dentistes (CNOM, 26 juin 2008, dossier n° 1619).

 

   Ainsi, si le champ d’application du 4ème alinéa des articles R. 4113-23 et R. 4127-85 du CSP apparaît vaste (ce qui est vrai dans une certaine mesure), il incombe néanmoins aux promoteurs de justifier que leur projet y entre bien, en répondant en outre à un véritable intérêt pour la population ciblée, démonstration qui en passe nécessairement par une présentation rigoureuse du dossier et la production de pièces utiles à son soutien.
La Lettre du Cabinet - Septembre 2014


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Le Conseil d’Etat annule une décision du CNOM en matière d’autorisation de site distinct
(Conseil d’Etat, sous-section n° 4, 9 juin 2008, n° 299843, CDOM de l’Hérault)
Isabelle Lucas-Baloup

Le contentieux portant sur les autorisations et/ou refus de sites d’exercice distincts de la résidence professionnelle habituelle des médecins augmente.
Un orthopédiste de Béziers avait demandé l’autorisation d’exercer deux demi-journées par semaine, en alternance avec un confrère, sur un site distinct de sa résidence professionnelle, situé à Agde, commune sur laquelle un seul orthopédiste était installé précise l’arrêt, et dans laquelle la densité de médecins exerçant cette spécialité était sensiblement inférieure à celle constatée au niveau national. Enfin, une partie de la clientèle à mobilité réduite était obligée de se rendre à Béziers, à 25 kilomètres.
Le Conseil d’Etat en déduit, contrairement au Conseil national de l’Ordre des médecins qui est déclaré avoir fait une inexacte application du droit, que, dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques de la discipline en cause, l’offre de soins dans ce domaine doit être regardée, au sens des dispositions de l’article R. 4127-85 du code de la santé publique, comme présentant une insuffisance au regard des besoins de la population et de la nécessité de la permanence des soins.
L’Ordre doit payer 3000 euros à l’orthopédiste de Béziers qui peut donc s’installer à Agde comme il le souhaitait.

La Lettre du Cabinet - Juin 2009
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Site distinct : annulation d’une autorisation à des cardiologues
(Conseil national de l’Ordre des médecins, décision du 5 avril 2012)
Isabelle Lucas-Baloup

La Lettre du Cabinet a déjà présenté à plusieurs reprises la jurisprudence ordinale sur les autorisations/refus de sites distincts, en application de l’article R. 4127-85 du code de la santé publique :

« Le lieu habituel d’exercice d’un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental, conformément à l’article L. 4112-1.

« Dans l’intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle :

- lorsqu’il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;

- ou lorsque les investigations et les soins qu’il entreprend nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants ;

- le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins. »

Le Conseil départemental de la Gironde avait accordé un site supplémentaire d’exercice à cinq cardiologues, par rotation tous les jours de la semaine, à Castelnau de Médoc, pour un secteur géographique correspondant à un bassin de vie comprenant 13 000 habitants environ. Deux cardiologues exerçaient trois demi-journées par semaine dans la même ville et il n’était pas fait état de délais d’attente pour les patients supérieurs à une semaine, en urgence, ni de non réponse à la prise en charge en cardiologie. Les deux cardiologues avaient donc contesté devant le Conseil national de l’Ordre des médecins statuant en matière administrative l’autorisation d’un site supplémentaire délivrée par le Conseil départemental à leurs cinq confrères. Le Conseil national a considéré qu’aucun des deux critères susceptibles de justifier l’autorisation d’un site distinct n’était rempli et qu’il y a lieu d’annuler la décision du Conseil départemental, en mettant fin à l’autorisation accordée aux cinq cardiologues auxquels il est laissé trois mois pour fermer leur site distinct.

La lettre du Cabinet - Septembre 2012


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