Base de données - AMP

Accès à l’AMP de la « femme non mariée »
Isabelle Lucas-Baloup

   La loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique a ouvert, sous certaines conditions, l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes et aux femmes « non mariées ».

Ainsi est-il prévu à l’article L. 2141-2-1 du code de la santé publique :

 

« L’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à un projet parental. Tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée ont accès à l’assistance médicale à la procréation après les entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l’équipe médicale clinicobiologique pluridisciplinaire effectués selon les modalités prévues à l’article L. 2141-10.

« Cet accès ne peut faire l’objet d’aucune différence de traitement, notamment au regard du statut matrimonial ou de l’orientation sexuelle des demandeurs.

« Les deux membres du couple ou la femme non mariée doivent consentir préalablement à l’insémination artificielle ou au transfert des embryons […]. »

 

ou encore à l’article L. 2141-6 :

 

« Un couple ou une femme non mariée répondant aux conditions prévues à l’article L. 2141-2 peut accueillir un embryon.

« Les deux membres du couple ou la femme non mariée doivent préalablement donner leur consentement, devant notaire, à l’accueil de l’embryon. Les conditions et les effets de ce consentement sont régis par l’article 342-10 du code civil. […] »

 

La lecture des travaux parlementaires permet de constater que la question du choix de la terminologie « femme non mariée », plutôt que « femme célibataire » ou « femme seule » a été abordée dès la première lecture à l’Assemblée Nationale, notamment en raison des effets de ce visa concernant les « femmes pacsées », donc « non mariées ».

Madame Nicole Belloubet, Garde des sceaux, a apporté l’argumentaire suivant (repris systématiquement ensuite lors du rejet des amendements relatifs à l’utilisation de l’expression « femme non mariée ») :

 

« La situation juridique n’est pas la même entre la femme mariée ou non mariée et la femme pacsée. Autoriser une femme mariée à pratiquer seule une AMP avec tiers donneurs, soit que le mari aurait refusé le recours à l’AMP, soit qu’il ne serait tout simplement pas au courant de la démarche de sa femme, présente la difficulté que le mari pourrait se voir appliquer une présomption de paternité, le mariage entraînant une telle présomption. Pour une femme pacsée, les incidences du PACS en matière de filiation ne sont pas du tout identiques. C’est la raison pour laquelle, pour les couples non mariés, le concubin ou le partenaire de la mère qui a eu recours toute seule à l’AMP ne serait pas tenu de reconnaître l’enfant issu d’une AMP. D’où cette rédaction qui prend en compte les différences de situation par rapport à la filiation. »

 

En effet, l’article 312 du code civil énonce un principe de présomption de paternité pour le mari de la mère de l’enfant :

 

« L'enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari. »

 

Il n’existe pas de dispositions identiques dans le cadre du pacs ou du concubinage. Il n’était donc pas nécessaire d’ajouter « non pacsée » et « non en situation de concubinage », puisque seul le mariage induit la présomption de paternité.

 

  • Dès lors, les médecins ne doivent s’assurer que de l’absence de mariage conclu par la femme demanderesse à l’AMP, les autres formes de couple ne relevant pas de leur contrôle.
  • Concernant les modalités de vérification de la qualité de « femme non mariée », le plus simple est de lui demander la production d’une copie intégrale de son acte de naissance, lequel reproduit l’ensemble des informations figurant sur les registres d’état civil, notamment les mentions marginales, telles que mariage, divorce, séparation de corps, pacs, changement de sexe.
  • En cas de doute, interroger le notaire dont l’intervention est prévue à l’article L. 2141-6 du CSP.

 

Gyneco-online - janvier 2022


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AMP : 59 ans pour les hommes
Isabelle Lucas-Baloup

Dans deux arrêts rendus le 5 mars 2018, la Cour administrative d’appel de Versailles approuve l’Agence de la biomédecine et fixe à 59 ans la limite d’âge pour les hommes.

 

La Cour administrative d’appel de Versailles, siégeant en formation plénière, a, le 5 mars 2018, confirmé deux décisions de l’Agence de la Biomédecine rejetant les demandes, formées par deux couples ne pouvant donner naturellement naissance à un enfant, tendant à ce que soit autorisée l’exportation à l’étranger de gamètes et de tissus germinaux aux fins d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Ce faisant, elle a fait droit aux requêtes d’appel formées par l’Agence de la Biomédecine contre deux jugements du Tribunal administratif de Montreuil du 14 février 2017. Par ces jugements, le Tribunal administratif avait annulé les décisions de l’Agence de la Biomédecine refusant à deux couples l’autorisation d’exportation de gamètes et tissus germinaux. Les décisions litigieuses de l’Agence de la Biomédecine, fondées sur l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, avaient été opposées au motif qu’au sein de chacun des couples en cause les deux hommes, âgés respectivement de 68 et 69 ans, ne pouvaient plus être regardés comme étant encore « en âge de procréer » au sens de cette disposition législative.

L’article L. 2141-2 du code de la santé publique fait figurer, au nombre des conditions requises pour pouvoir bénéficier d’une technique d’assistance médicale à la procréation (AMP) celle tenant à ce que l’homme et la femme formant le couple soient, l’un comme l’autre, encore en « âge de procréer ». La Cour, se référant à l’intention du législateur de préserver notamment l’intérêt de l’enfant à naître, afin qu’il ne soit pas exposé à certains risques inhérents au recours à une assistance médicale à la procréation, et celui de la femme du fait du caractère éprouvant et non exempt de risques des techniques de stimulations ovariennes, retient que l’« âge de procréer » doit être entendu comme étant celui au cours duquel les capacités procréatives de l’homme et de la femme ne sont pas encore altérées par le vieillissement. Se fondant sur des travaux scientifiques disponibles en cette matière, relevant qu’au-delà de 59 ans les capacités procréatives de l’homme sont généralement altérées compte tenu du risque statistiquement accru de malformations et autres complications médicales, la Cour juge que l’âge au-delà duquel les capacités procréatives de l’homme sont susceptibles d’être altérées par le vieillissement est d’environ 59 ans. A ce titre l’arrêt mentionne :

« Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, notamment de différentes études médicales menées par des chercheurs de l’Inserm en 2011 et le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France en 2010 que, si un homme peut parfois être père à un âge très avancé, une telle paternité accroit le risque de mutations génétiques à l’origine de troubles mentaux pour l’enfant, tels que la schizophrénie ou l’autisme ; que la Commission nationale de médecine et biologie de la reproduction a préconisé en juillet 2004, pour des raisons associant l’efficacité des techniques d’assistance médicale à la procréation et l’intérêt de l’enfant, de ne pas accéder à une telle demande lorsque l’âge de l’homme est supérieur à 59 ans révolus ; que la Fédération française des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (CECOS) examine régulièrement, depuis 1973 et à la lumière des données les plus récentes issues des travaux scientifiques disponibles, la question de l’âge des donneurs de spermatozoïdes, actuellement fixé à 45 ans au maximum, afin de tenir compte des chances de succès d’une AMP, des risques de fausses couches spontanées, du risque malformatif et de la survenue de mutations génétiques liées à un âge avancé de l’homme ; qu’en fonction des connaissances scientifiques disponibles, un homme peut être regardé comme étant « en âge de procréer », au sens de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, jusqu’à un âge d’environ 59 ans, au-delà duquel les capacités procréatives de l’homme sont généralement altérées ; »

 

Il est utile de rappeler que l’article L. 2141-11-1 du code de la santé publique confère à l’Agence de biomédecine un pouvoir majeur d’appréciation dans les termes suivants :

« L’importation et l’exportation de gamètes ou de tissus germinaux issus du corps humain sont soumises à une autorisation délivrée par l’Agence de la biomédecine. Seul un établissement, un organisme ou un laboratoire titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 2142-1 pour exercer une activité biologique d’assistance médicale à la procréation peut obtenir l’autorisation prévue au présent article. Seuls les gamètes et les tissus germinaux recueillis et destinés à être utilisés conformément aux normes de qualité et de sécurité en vigueur, ainsi qu’aux principes mentionnés aux articles L. 1244-3, L. 1244-4, L. 2141-2, L. 2141-3, L. 2141-7 et L. 2141-11 du présent code et aux articles 16 à 16-8 du code civil, peuvent faire l’objet d’une autorisation d’importation ou d’exportation. Toute violation des prescriptions fixées par l’autorisation d’importation ou d’exportation de gamètes ou de tissus germinaux entraîne la suspension ou le retrait de cette autorisation par l’Agence de la biomédecine. »

La Cour de Versailles considère que ces dispositions interdisent que les gamètes déposés en France puissent faire l’objet d’une exportation, s’ils sont destinés à être utilisés, à l’étranger, à des fins qui sont prohibées sur le territoire national.

L’arrêt poursuit :

« Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’article L. 2141-2 du code de la santé publique fait figurer au nombre des conditions requises pour pouvoir bénéficier d’une technique d’AMP, la condition tenant à ce que l’homme et la femme formant le couple soient l’un comme l’autre encore en « âge de procréer » ; qu’en édictant cette disposition, éclairée notamment par les travaux préparatoires de la loi n° 94-654 du 19 juillet 1994 dont elle est issue, le législateur a entendu préserver à la fois l’intérêt de l’enfant à naître, afin que celui-ci ne soit pas exposé à certains risques inhérents au recours à une assistance médicale à la procréation, celui de la femme, les techniques de stimulations ovariennes étant éprouvantes et non sans risque pour sa santé et enfin celui de la société, eu égard au coût élevé mis à la charge des caisses de sécurité sociale lorsqu’il est fait usage de cette technique ; qu’au sens de l’article L. 2141-2 du CSP, l’ « âge de procréer » doit être entendu comme étant celui au cours duquel les capacités procréatives de l’homme et de la femme ne sont pas altérées par le vieillissement ; qu’il incombe en pareil cas à l’Agence de la biomédecine, devant veiller au respect des intérêts mentionnés ci-dessus, d’apprécier sous le contrôle du juge si la demande dont elle est saisie remplit, parmi les conditions légalement exigibles, celle selon laquelle l’homme et la femme ayant formé la demande n’ont pas atteint un âge au-delà duquel le vieillissement est susceptible d’altérer leurs capacités reproductives respectives ; qu’il revient à l’Agence de la biomédecine de vérifier le respect de cette condition, en fonction des connaissance scientifiques disponibles. »

 

Ainsi l’Agence de la biomédecine a pu à bon droit regarder chacun des hommes en cause, âgés respectivement de 68 et 69 ans, comme n’étant plus en âge de procréer au sens de l’article L. 2141-2. Dès lors que les dispositions du code de la santé publique interdisent que les gamètes déposés en France puissent faire l’objet d’une exportation, s’ils sont destinés à être utilisés à l’étranger à des fins non autorisées par la législation française, la Cour en a déduit que l’Agence de la biomédecine a pu légalement refuser les autorisations d’exportation à l’étranger qui étaient demandées, aux seules fins d’y pratiquer une AMP non autorisée en France.

La Cour administrative de Versailles a donc annulé les jugements du tribunal administratif de Montreuil qui avaient annulé les décisions de la directrice générale de l’Agence de la biomédecine refusant d’autoriser l’exportation de gamètes et de tissus germinaux aux fins d’AMP et rejeté les demandes d’annulation des décisions de l’Agence de la Biomédecine.

 

En 2006, le Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, chargé d’approuver le guide de bonnes pratiques cliniques et biologiques en assistance médicale à la procréation, s’est interrogé sur la question de l’âge comme en témoigne sa délibération : « Le Conseil a opté clairement pour ne pas retenir de limite normative d’âge. D’une part, il est apparu aux membres du Conseil qu’une limite normative ne ferait pas suffisamment droit aux différences clinico- biologiques pouvant exister entre les personnes. D’autre part et plus encore, le Conseil estime, quel que soit le for intérieur de chacun de ses membres quant à une sagesse de vie, qu’il s’arrogerait un regard exorbitant en érigeant une norme d’âge pour être parent ou une norme quant à la différence d’âge maximale entre les membres d’un couple. De même les membres du Conseil ont estimé difficile d’édicter des règles a priori permettant aux équipes pluridisciplinaires de différer les limites de l’AMP, soulignant pour certains d’entre eux les risques d’une intrusion excessive dans les choix de couple. Le Conseil estime qu’une réflexion approfondie devrait être engagée et un débat public organisé sur cette question de possibles limites à l’AMP compte tenu de certaines indications ».

Plus récemment, en 2012, un avis du CO sur l’autoconservation de gamètes préconisait de rester dans le cadre de ce qui est l’usage en AMP : 42 ans pour la femme et 59 ans pour l’homme. La loi de bioéthique de 2011 a repris les notions d’âge de procréer et d’intérêt de l’enfant. Dans le guide des bonnes pratiques (arrêté du 3 août 2010 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation), la question de l’âge est mentionnée. S’il n’y a pas de limite précisée en AMP, le texte évoque le fait que la possibilité de réaliser l’AMP est discutée en fonction de l’âge de la femme et de l’homme.

 

Le rapport du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine adopté le 8 juin 2017 conclut :

« Peut-on mettre une limite apparaissant raisonnable tant en ce qui concerne l’efficacité des méthodes, la minimisation des risques obstétricaux et des risques pour l’enfant, la question de l’éducation et l’accompagnement de l’enfant par ses parents ? Le conseil d’orientation souligne la nécessité de rappeler que la situation la moins à risque est la procréation à un âge jeune. En 2009, le conseil d’orientation avait déjà émis un avis sur la nécessité d’informer sur la baisse de la fertilité avec l’âge. En termes de santé publique, cette notion est très importante, la procréation à un âge avancé demandant une médicalisation quelque peu artificielle de la procréation. Les pouvoirs publics devraient organiser des campagnes d’information sur cette thématique montrant également les limites des techniques d’AMP permettant ainsi de relativiser l’attrait magique que les techniques d’AMP suscitent dans le public mais également chez certains médecins. Les pouvoirs publics pourraient également mettre en place les conditions pour que les couples jeunes puissent procréer tout en poursuivant leur projet de vie. Il s’agit d’un vrai choix de société. Il semble nécessaire de mettre en place des actions pédagogiques auprès des jeunes, hommes et femmes, et des campagnes d’informations sur la notion de la réalité de l’horloge biologique et sur le fait que devenir parents devrait se faire à un âge jeune. L’information devrait éclairer également sur la difficulté de la procréation à un âge plus tardif et sur le fait que les techniques d’AMP, aussi performantes qu’elles soient, ne peuvent tout résoudre et notamment faire remonter le temps biologique. La période de la vie au cours de laquelle un couple est dit en âge de procréer est naturellement rapportée à des données physiologiques. Les extrêmes ont été bien observés, et ce terme d’extrême se conjugue aux surrisques encourus tant par la mère, que par l’enfant à naître. Alors que l’AMP, encadrée par la loi relative à la bioéthique, a pour but de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité, l’irruption de ces techniques bouleverse-t-elle la sagesse des couples et celle des équipes médicales ? Les praticiens du domaine sont particulièrement vigilants face à ces situations qui surviennent, il est vrai rarement, dans un contexte de procréation naturelle.

« Dans ce contexte, le conseil d’orientation a été saisi pour préciser la notion d’âge pour procréer. Préciser cette notion, c’est probablement mettre une limite à l’âge de procréer. Plus généralement, l’absence de limite ne renvoie-t-elle pas à une société où l’individu dans sa toute-puissance utiliserait les dernières technologies ? N’est-ce pas sur des limites que la société peut se construire ? Dans un souci, de bienfaisance (ne pas entraîner de risques pour les différents acteurs impliqués ou à venir), d’équilibre mesuré entre l’autonomie de l’individu, l’intérêt de l’enfant à venir et la responsabilité de l’équipe médicale, d’équité (même accès aux soins pour tous), il a paru pertinent au conseil d’orientation de préciser la notion d’âge pour procréer avec l’aide de l’assistance médicale à la procréation. Il ne s’agit pas de mettre une norme abstraite supplémentaire mais bien de faciliter pour les équipes médicales la prise en charge des couples inféconds en clinique quotidienne et d’apporter des informations aux décideurs et politiques chargés de la santé publique. Dans ce contexte, le débat au sein du conseil d’orientation fut riche et mit en évidence des différences d’appréciations sur le caractère strict ou relatif de la limite.

« En conclusion, le Conseil d’Orientation est favorable à une limite de « l’âge pour procréer » dans les différentes situations d’AMP :

- Age de la femme : 43 ans avec, dans le cas de l’utilisation d’ovocytes préalablement conservés ou de donneuse, une discussion au cas par cas entre 43 et 45 ans

- Age de l’homme : procréation intraconjugale ou avec don de spermatozoïdes : 60 ans.

« Le Conseil d’Orientation insiste sur la nécessité que ces limites soient explicitées, en amont, au couple dès le début de son parcours en AMP et qu’un accompagnement bienveillant soit mis en place pour tous les couples souhaitant une prise en charge en AMP. »

Le moins qu’on puisse dire est que la consultation sur le sujet, dans les cadre des Etats généraux de la Bioéthique n’a pas beaucoup intéressé le public : seulement 27 votes répertoriés au chapitre :

« Limite d'âge pour l'accès à la PMA », sur le site :  

https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/projects/procreation/consultation/consultation-6/opinions/constats-et-enjeux-quelle-est-la-situation-actuelle/limite-d-age-pour-l-acces-a-la-pma

Wait and see…

Gynéco-Online - juin 2018


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AMP Assistance médicale à la procréation (AMP)

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AMP et entente préalable
Isabelle Lucas-Baloup

L’aide médicale à la procréation (AMP) ne peut être prise en charge par une caisse d’assurance maladie que si :

 

  • l’acte est prévu par la nomenclature comme étant pris en charge,
  • qu’il a été précédé d’une demande d’entente préalable non suivie d’un refus dans le délai de 15 jours.

 

 

  1. Actes pris en charge :

 

L’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale permet que la prise en charge ou le remboursement par l’assurance maladie de certains actes soit subordonnée « à leur inscription sur une liste établie […] et subordonnée au respect d’indications thérapeutiques ou diagnostiques, à l’état du patient ainsi qu’à des conditions particulières de prescription, d’utilisation ou de réalisation de l’acte ou de la prestation. »

 

Les règles de facturation par le médecin conventionné qui donne des soins à un assuré social dans le cadre d’une AMP sont décrites notamment dans la Classification Commune des Actes Médicaux (CCAM), disponible dans sa dernière version 45 applicable le 15 décembre 2016 sur le site ameli.fr. dans les termes ci-après qui encadrent leur prise en charge :

 

« 09.02 ASSISTANCE MÉDICALE À LA PROCRÉATION

Facturation :

- les actes du sous chapitre 09.02 ASSISTANCE MÉDICALE À LA PROCRÉATION ne peuvent pas être facturés au-delà du jour du 43ème anniversaire de la femme ;

- une seule insémination artificielle par cycle peut être facturée avec un maximum de 6 pour l'obtention d'une grossesse ;

- 4 tentatives de fécondation in vitro avec ou sans micromanipulations peuvent être facturées pour l'obtention d'une grossesse ; on appelle tentative, toute ponction ovoctaire suivie de transfert embryonnaire ;

- une demande d'entente préalable globale doit être déposée avant le début du traitement avec mention de la technique utilisée ; si cette technique change le contrôle médical doit être informé ; l'absence de réponse dans les 15 jours vaut accord ; le biologiste et l'échographiste sont informés de la date de dépôt de l'entente préalable. »

 

Les trois premières conditions doivent être respectées et il est inutile de déposer une demande d’entente préalable dont la description du traitement violerait les contraintes imposées dans le cadre de la prise en charge : par exemple pour une femme âgée de plus de 43 ans, ou s’il s’agit d’une cinquième tentative de fécondation in vitro, alors que seulement 4 tentatives peuvent être prises en charge.

 

On ne peut en effet se prévaloir de l’absence de refus, ou d’un refus tardif de la caisse d’assurance maladie, suite à une demande d’entente préalable qui ne respecte pas les conditions de prise en charge du traitement (cf. arrêt du 11 avril 1996 de la chambre sociale de la Cour de cassation, n° 94-10-468).

 

Les tarifs pris en charge sont exposés dans la CCAM pour et selon les codes :

  • « JKHD002 : Prélèvement et examen de la glaire cervicale, sans examen de la mobilité des spermatozoïdes.
  • JKHD003 : Prélèvement et examen de la glaire cervicale, avec examen de la mobilité des spermatozoïdes [Test postcoïtal de Huhner].
  • JJFJ001 : Prélèvement d'ovocytes sur un ou deux ovaires, par voie transvaginale avec guidage échographique (AP).
  • JJFC011 : Prélèvement d'ovocytes sur un ou deux ovaires, par cœlioscopie.
  • JHFB001 : Prélèvement de spermatozoïdes au niveau du testicule, de l'épididyme ou du conduit déférent, par voie transcutanée (AP)
    • prélèvement de sperme, par ponction transcutanée du testicule
    • facturation : une seule fois au cours de l'intervention.
  • JSLD002 Insémination artificielle intracervicale (AP)
    • avec ou sans examen de la glaire cervicale.
  • JSLD001 Insémination artificielle intra-utérine (AP)
    • avec ou sans examen de la glaire cervicale.
  • JSEC001 Transfert intratubaire d'embryon, par cœlioscopie (AP)
    • Indication : transfert intra-utérin par voie vaginale impossible du fait d’un col utérin infranchissable, chez les femmes ayant au moins une trompe saine
    • Formation : spécifique à cet acte en plus de la formation initiale
    • Environnement : spécifique ; cet acte doit être réalisé dans le cadre légal régissant les actes d’assistance médicale à la procréation – loi n° 94-654 du 29 juillet 1994, arrêté du 12 janvier 1999, arrêté du 10 mai 2001
    • Recueil prospectif de données : nécessaire.
  • JSED001 Transfert intra-utérin d'embryon, par voie vaginale (AP)
    • Indication : acte de référence pour réaliser le transfert d’embryon
    • Formation : spécifique à cet acte en plus de la formation initiale
    • Environnement : spécifique ; cet acte doit être réalisé dans le cadre légal régissant les actes d’assistance médicale à la procréation – loi n° 94-654 du 29 juillet 1994, arrêté du 12 janvier 1999, arrêté du 10 mai 2001
    • Recueil prospectif de données : nécessaire. »

 

 

  1. Procédure relative à la demande d’accord/entente préalable :

 

L’article I-4 des Dispositions Générales de la CCAM décrit (comme le fait l’article 7 de la NGAP pour les actes non prévus par la CCAM) la procédure d’accord préalable dans les termes ci-après :

 

« Certains actes font l’objet d’un accord préalable du contrôle médical. Ces actes sont repérés dans la liste par les lettres «AP». Ils ne sont pris en charge qu’à la condition d’avoir reçu l’avis favorable du contrôle médical, sous réserve que l'assuré remplisse les conditions légales d'attribution des prestations.

1. Quand l'acte est soumis à cette formalité, le praticien qui dispense cet acte (médecin, sage-femme, auxiliaire médical) est tenu, préalablement à son exécution, d’adresser au contrôle médical une demande d’accord préalable remplie et signée. Les demandes d'accord préalable sont établies sur des imprimés conformes aux modèles arrêtés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

2. Le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la demande est réputée acceptée ne court qu’à compter de la date de réception de la demande d’accord préalable. La réponse de la caisse d'Assurance Maladie doit être adressée au malade et en copie au praticien, au plus tard le 15ème jour à compter de la date de réception de la demande par le service du contrôle médical, la caisse ou la mutuelle.

3. Lorsqu'un accord est exigé, en application du présent article préalablement au remboursement d'un acte ou d'un traitement par l'assurance maladie, l'absence de réponse, Dispositions générales et dispositions diverses Livres I et III – 20 juillet 2016 6 17/06/15 pendant plus de quinze jours de l'organisme, sur la demande de prise en charge équivaut à un accord. Dans ce cas, le contrôle médical peut toujours intervenir pour donner un avis à l'organisme d'assurance maladie sur la prise en charge de la suite du traitement ou la poursuite des actes.

4. Lorsque la demande est incomplète, l'organisme d'assurance maladie indique au demandeur les pièces manquantes indispensables à l'instruction et fixe un délai pour leur réception. Le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la demande est réputée acceptée ne court qu'à compter de la réception des pièces requises.

Lorsqu'il y a urgence manifeste, le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme dispense l'acte mais remplit néanmoins la demande d'accord préalable en portant la mention : « acte d'urgence ».

 

En ce qui concerne les actes de biologie médicale, la version 43 de la table nationale de biologie (TNB), mise à jour le 20 avril 2016, l’article 5 prévoit :

 

« Entente préalable :

L’organisme d’assurance maladie ne participe aux frais résultant de certains actes de biologie médicale que si le service médical a donné, préalablement, un avis favorable à leur prise en charge (sous réserve que l’assuré remplisse les conditions légales d’attribution des prestations).

Une « demande d’entente préalable » doit être faite sur un formulaire spécifique composé de trois zones :

  1. une zone à remplir par l’assuré qui concerne son identification
  2. une zone à remplir par le prescripteur :
    • identification du prescripteur
    • nature de l’acte prescrit
    • motifs de l’acte et indications cliniques
    • date, signature et cachet
  3. une zone à remplir par le directeur de laboratoire qui doit effectuer l’acte, sous réserve des dispositions transitoires prévues à l’article 2 :
  • identification du laboratoire
  • numéro(s) de(s) l’acte(s)
  • autorisation de pratiquer l’acte numéro : et/ou date
  • date, signature et cachet.

Les deux dernières zones sont réservées au service médical de la caisse d’affiliation de l’assuré.

Les formulaires d’entente préalable sont établis sur des imprimés conformes aux modèles arrêtés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

L’assuré adresse ce formulaire au service médical de sa caisse après que le directeur de laboratoire eut rempli la partie le concernant.

La date d’envoi de ce formulaire est attestée par le cachet de la poste.

L’absence de réponse de l’organisme d’assurance maladie à l’assuré, dans les quinze jours, équivaut à un accord.

Lorsqu’il y a urgence médicale, précisée par le prescripteur sur la demande d’entente préalable, le directeur de laboratoire effectue l’acte, indique la mention « acte d’urgence » sur le formulaire et l’assuré l’adresse, dans le même temps, au service médical de sa caisse. »

 

 

  1. Preuve de l’envoi de la demande d’entente préalable :

 

Les difficultés en pratique concernent la preuve de l’envoi de la demande d’accord/entente préalable et la preuve de l’envoi de la décision de refus de prise en charge par la CPAM :

 

Jusqu’au 1er octobre 2016, l’article 1315 du code civil régissait la charge de la preuve en droit français par les dispositions ci-après : « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. ». Depuis l’entrée en vigueur de la réforme du code civil, c’est l’article 1353 qui prévoit, à l’identique, à qui incombe la charge de la preuve.

 

En matière d’accord/entente préalable, c’est à la personne qui a adressé le formulaire de demande à la caisse d’assurance maladie d’établir la preuve de l’envoi, soit l’assuré social, soit le praticien.

 

Pour conserver une preuve de la date d’envoi, il faut donc expédier la demande par lettre recommandée. A défaut, le demandeur n’aura pas la preuve de la date d’envoi qui est mentionnée sur l’enveloppe adressée à la Caisse, si cette dernière prétend ne pas l’avoir reçue et ne la produit pas en cas de conflit.

 

Si le demandeur établit la date d’envoi, la charge de la preuve incombe à la Caisse qui prétendrait avoir refusé le traitement. C’est alors elle qui doit établir qu’elle a envoyé sa réponse dans les 15 jours, puisque l’absence de réponse vaut accord.

 

Quelques confirmations de ces principes généraux par la jurisprudence :

 

  • arrêt de la Cour d’appel de Paris, Pôle 6, 12ème chambre, 19 janvier 2012,

n° 09/11634 : PMA réalisée en Espagne, avec demande d’entente préalable auprès de la CPAM 94 :

 

« La patiente ne rapporte pas la preuve que sa demande d’entente préalable qu’elle a datée du 1er mai 2008, qui est en France un jour férié chômé, serait effectivement parvenue à la caisse avant le 22 mai 2008 comme cette dernière le déclare ; la Cour, en l’absence de preuve contraire dont la charge incombe à l’assurée, retient cette date du jeudi 22 mai 2008.

Il s’ensuit que les frais engagés pour le premier rendez-vous du 28 avril 2008 l’ont été bien antérieurement à la demande d’entente préalable et ne peuvent qu’être écartés. »

 

  • arrêt de la Cour d’appel de Pau, chambre sociale, 27 sept. 2012,

n° 10/00182 : PMA réalisée en Espagne, avec demande d’entente préalable auprès de la CPAM des Landes :

« La CPAM ne produit pas la demande d’entente préalable aux débats afin de permettre à la juridiction de vérifier la date de la demande par rapport à la date de l’acte.

« Mais de plus il n’est pas contesté que Mme HL a effectivement sollicité l’autorisation préalable de la Caisse, conformément aux dispositions de l’article R. 332-4 du CSS, la décision qu’elle a prise de ne pas attendre l’accord de l’organisme social l’exposant seulement à l’obligation d’en supporter le coût en cas de refus. »

 

  • arrêt de la Cour d’appel d’Amiens, 5ème chambre sociale, 7 mai 2013,

n° 12/03163 : PMA réalisée en République Tchèque, avec demande d’entente préalable auprès de la CPAM de Saint-Quentin :

 

« S’agissant des actes d’AMP, […], la CCAM prévoit qu’une demande d’entente préalable globale doit être déposée avant le début du traitement avec mention de la technique utilisée, si cette technique change le contrôle médical doit être informé.

L’absence de réponse dans les 15 jours vaut accord.

[…] Cette précision ne constitue pas un descriptif de la pratique clinique et biologique d’AMP qui sera réalisée.

Les éléments du dossier ne permettent pas de constater que Mme J. avait présenté, avant le refus de la prise en charge intervenu le 23 mars 2011, une demande d’entente préalable globale lui permettant de se prévaloir d’une autorisation réputée acquise.

Sa demande de prise en charge n’est pas fondée en l’absence de demande d’entente préalable globale telle qu’exigée pour mettre en œuvre une technique d’AMP. »

 

  • arrêt de la Cour d’appel d’Agen, chambre sociale, 4 octobre 2011,

n° 10/02118 : PMA réalisée en Espagne, avec demande d’entente préalable auprès de la CPAM du Lot et Garonne :

 

La Cour déboute la patiente qui a écrit une lettre à la CPAM en lui demandant quel serait le montant de la prise en charge :

 

« Contrairement à l’analyse des premiers juges, ce courrier ne peut en rien être assimilé à une demande d’entente préalable mais à une simple demande d’information sur les droits de l’assurée ; »

 

  • arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 11 avril 1996,

n° 94/10468 : PMA réalisée en France, avec demande d’entente préalable auprès d’une CPAM pour une fécondation in vitro de 5ème rang, alors que la nomenclature ne prévoit que 4 tentatives. La Cour de cassation juge que la NABM ne prévoyant que la cotation de 4 tentatives successives de FIV, cela exclut pour l’assurée la prise en charge d’une 5ème tentative et rendait donc inopérante la demande d’entente préalable, peu importe dès lors que la CPAM ait refusé après l’expiration du délai de 15 jours.

 

o

o     o

 

Il n’existe aucune jurisprudence publiée ayant tranché un litige entre les praticiens et le patient assuré, au regard des responsabilités des uns et des autres relativement à l’envoi effectif de la demande d’accord/entente préalable et à la réception d’un refus qui aurait été caché par celui qui l’a reçu. Cela n’est pas étonnant compte tenu du coût des procédures ; le problème se rencontre en pratique sans que les parties n’engagent une action judiciaire en raison du faible intérêt économique du litige.

 

Il apparaît que les praticiens intervenant en matière d’AMP auraient donc intérêt à faire signer au patient assuré social un document attestant qu’il a envoyé, en date du [à compléter], la demande d’accord/entente préalable à la CPAM, si l’un des médecins ne l’a pas lui-même expédiée et qu’il n’a reçu aucune réponse 16 jours plus tard, avant le commencement des actes médicaux et/ou de biologie, aucun refus exprès de prise en charge envoyé par la CPAM dans le même délai ou aucune demande d’éléments complémentaires.

 

Titulaires d’une telle attestation, le praticien pourra ainsi demander le paiement des actes au patient si, après l’accomplissement de ceux-ci, la CPAM, qui n’aurait jamais reçu de demande de prise en charge ou qui l’aurait expressément refusée dans le délai, refuse le règlement des honoraires aux médecin et biologiste qui auraient réalisé les actes sans avoir été informés du refus de prise en charge et qui n’auraient pas été réglés par le patient lui-même. Le praticien prescripteur informé du refus de prise en charge communiquera au biologiste cette information.

 

Si le patient est défaillant dans son obligation d’informer du refus de prise en charge par la CPAM les praticiens qui interviennent, sa responsabilité civile peut être mise en cause, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle de droit commun : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » (nouvel article 1240 du code civil), « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. » (article 1241).

Comme souvent en matière de tarification et de paiement des honoraires, un peu de vigilance au bon moment peut éviter un contentieux ultérieur.

Gynéco Online - janvier 2017


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AMP Entente préalable

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AMP et répétitions d'indus par les CPAM
Isabelle Lucas-Baloup

 Plusieurs contentieux ont lieu actuellement en raison de ce que des CPAM soutiennent que les transferts d’embryons, effectués dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation, pourraient être effectués en cabinet libéral de gynécologue sans nécessité d’une « hospitalisation de jour » au sens de la nouvelle tarification à l’activité (T2A). Le TASS de Rouen vient de se prononcer (jugement du 25 janvier 2011) en déboutant les caisses d’assurance maladie.

Victoire pour les cliniques dans lesquelles on transfère des embryons, dans les conditions prévues aux articles L.2141-1, L.2142-1 et suiv. et R. 2142-1 du code de la santé publique, et qui, de ce chef, facturent bien normalement – pensait-on -, un GHS 8285 « affection de la CMD 13 [appareil génital féminin – groupes médicaux et chirurgicaux] : séjours de moins de deux jours, sans acte opératoire de la CMD 13 ».
Les trois conditions cumulatives bien connues des médecins DIM fixées à l’arrêté du 5 mars 2006 relatif à la classification des actes et à la prise en charge des prestations d’hospitalisation étaient remplies et le TASS de Rouen, dans son jugement du 25 janvier 2011 (n° 20900806) déboute la caisse de son affirmation que le transfert d’embryons serait envisageable dans un cabinet médical « implanté dans un établissement » plutôt que dans le service de chirurgie ambulatoire de l’établissement de santé, dans les termes ci-après :


« S’agissant de la nécessité de recourir à une hospitalisation de jour, le tribunal relève que l’activité de transfert d’embryons ne peut être pratiquée qu’en établissement de santé (art. L. 2142-1 du CSP), lequel doit être autorisé à exercer ses activités sous réserve de remplir les conditions déterminées par la loi. Ainsi, parmi les conditions de fonctionnement de ces établissements autorisés à exercer des activités cliniques d’assistance médicale à la procréation, figure l’obligation pour l’établissement de disposer d’un médecin expérimenté en échographie, d’un anesthésiste-réanimateur (art. R.2142-22 du CSP) mais également l’obligation que ces activités soient réalisées dans un lieu comprenant : une pièce pour les entretiens des couples avec l’équipe médicale, une pièce destinée au transfert d’embryons, une salle de ponction équipée et située à proximité ou dans un bloc opératoire, des locaux destinés au secrétariat et à l’archivage des dossiers, l’accès à des lits d’hospitalisation (art. R.2142-23, CSP). Ainsi, la réalisation d’activités cliniques d’assistance médicale à la procréation en établissement de santé n’est pas un choix du praticien, mais une obligation légale de santé publique.
Il y a ainsi obligatoirement nécessité de recourir à la structure qui répond à ces conditions de fonctionnement. La Clinique Saint-Antoine est autorisée à pratiquer cette activité de transfert d’embryons en son sein. Le tribunal ne saurait retenir comme le soutient la Caisse que le transfert d’embryons serait envisageable dans un cabinet médical implanté dans un établissement autorisé lequel ne serait alors pas remboursé de l’environnement pourtant imposé par les textes pour l’exercice de cette activité. Il y a lieu par conséquent de faire droit à la demande de la Clinique Saint-Antoine et d’annuler l’indu relatif à l’activité du transfert des embryons. »

Gynéco Online
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GPA et AMP : soupçons/condamnations (les circulaires incohérentes)
Isabelle Lucas-Baloup

Le 21 décembre 2012, une instruction du ministère de la Santé, intitulée « risques encourus par les praticiens français qui donneraient suite aux sollicitations de cliniques dont les pratiques en matière de don de gamètes ne sont pas conformes à la législation nationale », a été adressée aux directeurs des Agences Régionales de Santé (ARS) et au Président de l’Ordre national des médecins pour leur demander de mettre en garde particulièrement les gynécologues contre le risque de condamnation pénale qu’ils encourent (5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende) en visant le délit réprimant la violation de dispositions générales et particulières du code de la santé publique sur l’assistance médicale à la procréation (AMP, articles 511-15 et suivants du code pénal). L’instruction précise :

« En France, le don de gamètes est anonyme et gratuit.
« Actuellement, l’offre de don d’ovocytes en France est insuffisante pour couvrir les besoins nationaux. Le nombre de couples français qui se rendent à l’étranger en vue d’assistance médicale à la procréation avec don d’ovocytes (en particulier en Espagne) ne cesse d’augmenter. Ces soins reçus à l’étranger ne sont pas toujours conformes à la législation française (rémunération du don d’ovocytes, double don de gamètes,…).
« La situation tend à s’aggraver […]. »

M. Jean-Yves Grall, directeur général de la santé, ajoute que, selon un rapport de l’IGAS de février 2011 « 1 800 à 3 600 femmes françaises auraient ainsi eu recours à un don d’ovocytes à l’étranger en 2009, chiffres qui ne cessent de progresser. »


Le 25 janvier 2013, une circulaire du ministère de la Justice, intitulée « délivrance des certificats de nationalité – convention de mère porteuse », a été adressée aux procureurs et aux tribunaux d’instance pour que soient délivrés des certificats de nationalité française (CNF) aux enfants nés à l’étranger dès lors que le lien de filiation avec un Français résulte d’un acte d’état civil étranger probant.
M. Laurent Vallée, directeur des affaires civiles et du sceau, précise que le soupçon du recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui (GPA) « ne peut suffire à opposer un refus aux demandes de CNF dès lors que les actes de l’état civil local attestent du lien de filiation avec un Français ».

Pourtant, en France, aujourd’hui :

- l’assistance médicale à la procréation avec dons d’ovocytes est autorisée par l’article L. 2142-1 du code de la santé publique, mais les activités cliniques et biologiques d’AMP relatives aux gamètes en vue de don ne peuvent être pratiquées que dans des établissements de santé publics ou privés à but non lucratif, avec des délais extraordinairement longs en raison de la procédure et faute de donneuses d’ovocytes (lourdeur du protocole, multiples interventions et examens, sans rémunération des donneuses anonymes difficiles en conséquence à motiver),

- la convention de gestation pour le compte d’autrui est totalement et expressément interdite, par l’article 16-7 du code civil.

En résumé, en application de ces deux textes très récents émanant du même Gouvernement, il est recommandé par un ministère de poursuivre pénalement des gynécologues qui participeraient à une activité totalement autorisée en France, mais organisée et réservée à certains hôpitaux qui n’interviennent qu’avec des délais importants dans le cadre d’une pénurie de donneuses, alors qu’il est recommandé par un autre ministère de faciliter la reconnaissance des enfants nés d’une gestation pour autrui à l’étranger, pourtant fermement prohibée en France. 

--> On réprime ce qui est autorisé, on tolère ce qui est formellement interdit.

Lorsqu’on observe la jurisprudence française relevant des deux situations, les recommandations apparaissent encore plus incohérentes : 

* en effet, les caisses d’assurance maladie prennent en charge une FIV avec don d’ovocytes pratiquée sur une assurée sociale française dans une clinique de Barcelone (arrêt n° 91/10 du 3 mars 2010, Cour d’appel de Rennes, chambre de la Sécurité Sociale), ce qui est prévu par l’article R. 332-3 du code de la sécurité sociale et conforme à la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (nombreuses affaires jugées concernant la libre circulation des patients dans l’Union Européenne), 

--> donc la CPAM prend en charge la FIV à Barcelone, mais le gynécologue français est susceptible d’être – selon l’instruction critiquée - condamné pénalement s’il pratique un « acte préparatoire », tel une consultation, une prescription de médicaments, la surveillance par échographie encadrant l’acte technique d’implantation de l’embryon chez la receveuse qui sera pratiquée ailleurs, en toute légalité, dans le territoire de l’Union Européenne aux frais de la CPAM du domicile de l’assurée sociale ! 

* en effet également la Cour de cassation refuse, contrairement à la circulaire dite Taubira du 25 janvier 2013, que soit transcrit un acte de naissance établi en exécution d’une décision étrangère, fondé sur la contrariété à l’ordre public international français lorsque celle-ci comporte « des dispositions qui heurtent des principes essentiels du droit français ; qu’en l’état du droit positif, il est contraire au principe de l’indisponibilité de l’état des personnes, principe essentiel du droit français, de faire produire effet, au regard de la filiation, à une convention portant sur la gestation pour le compte d’autrui, qui, fût-elle licite à l’étranger, est nulle d’une nullité d’ordre public aux termes des articles 16-7 et 16-9 du code civil. »
(Cour de cassation, chambre civile 1, arrêt du 6 avril 2011).

Les applications jurisprudentielles sont fréquentes : voir un des derniers arrêts prononcé le 8 janvier 2013 par la Cour d’appel de Rennes, ayant refusé une demande de transcription des actes de naissance de jumeaux du fait d’indices sérieux faisant présumer que leur naissance en Ukraine, à l’Hôpital de Kharkov qui dispose d’une maternité spécialisée dans la médecine reproductive, était intervenue dans le cadre d’une gestation pour autrui (pas de résidence en Ukraine, pas de projet professionnel, les parents ne parlent pas l’ukrainien, n’avaient jamais eu d’enfant mais engagé des démarches en vue d’une adoption, et enfin la mère, au moment de remplir la demande de transcription dans les locaux de l’ambassade, avait oublié la date de naissance des jumeaux). 

-->  des soupçons, que des soupçons !...

Heureusement, le 25 octobre 2013, la France, comme les autres Etats membres de l’UE, doit avoir transcrit en droit interne la Directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 relative à l’application des droits des patients en matière de soins transfrontaliers.

Gynéco Online - Février 2013


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AMP Directive 2011/24/UE Dons d'ovocytes GPA Soins transfrontaliers

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Procédés et techniques d’AMP arrêt du Conseil d’Etat, 30 décembre 2015
Isabelle Lucas-Baloup
1. Rappel du contexte :

La loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 a introduit un nouveau régime juridique concernant les procédés biologiques d’assistance médicale à la procréation (AMP), qui doivent être autorisés pour être mis en œuvre dans les établissements de santé ou les laboratoires d’analyses de biologie médicale, les nouvelles dispositions sont codifiées dans le code de la santé publique aux articles L.2141-1 et suivants.
Les procédés biologiques utilisés en AMP s’entendent des méthodes de préparation et de conservation des gamètes et des tissus germinaux, de fécondation in vitro et de conservation des embryons, que ce soit à des fins d’assistance médicale à la procréation ou de préservation de la fertilité.
Un décret n° 2012-360 du 14 mars 2012 a fixé les modalités et critères d’inscription des procédés sur une liste publiée par le ministre chargé de la santé après avis de l’Agence de biomédecine, en précisant que les critères d’inscription portent notamment sur :

? le respect des principes fondamentaux de la bioéthique prévus en particulier aux articles 16 à 16-8 du code civil,
? l’efficacité, la reproductibilité du procédé ainsi que la sécurité de son utilisation pour la femme et l’enfant à naître.

Toute technique visant à améliorer l’efficacité, la reproductibilité et la sécurité des procédés figurant sur cette liste fait l’objet, avant sa mise en œuvre, d’une autorisation délivrée par le directeur général de l’Agence de biomédecine après avis motivé de son conseil d’orientation. Si ce conseil considère que la modification proposée est susceptible de constituer un nouveau procédé, sa mise en œuvre est subordonnée à son inscription sur la liste elle-même.

Par arrêté du 12 juin 2012, le ministre chargé de la santé a fixé la liste des procédés biologique d’AMP régulièrement utilisés à la date du 9 juillet 2011, consacrés par l’usage et faisant l’objet d’une évaluation annuelle au moyens des rapports annuels d’activité transmis par les centres d’AMP :

? préparation de sperme en vue d’AMP,
? fécondation in vitro sans micromanipulation,
? fécondation in vitro avec micromanipulation,
? congélation des gamètes (ajouté le 6 novembre 2013),
? congélation des tissus germinaux,
? congélation de zygotes et d’embryons,
? maturation in vitro des ovocytes.

L’Agence de biomédecine, consultée sur la liste fixée par l’arrêté, a constitué pour chaque procédé, un dossier technique comprenant :
? la description des techniques régulièrement mises en œuvre aux fins d’utilisation de ces procédés,
? la caractérisation ou la nature du procédé,
? les procédures et modes opératoires qu’il suppose et l’identification des étapes critiques,
? le cas échéant, l’impact du procédé sur le nombre d’embryons conservés,
? une synthèse des données pertinentes issues du suivi des activités biologiques d’AMP et du dispositif de vigilance existant.


2. Refus d’inscription de la culture embryonnaire prolongée en coculture sur cellules d’endomètre autologue :

Les Laboratoires Genévrier ont demandé au ministre de la santé de saisir l’Agence de biomédecine d’une demande de réexamen de la cette liste des techniques pouvant être mises en œuvre dans le cadre des procédés biologiques utilisés en AMP, à la suite d’une décision du 6 novembre 2013 par laquelle le directeur général de l’Agence a refusé d’autoriser la culture embryonnaire prolongée en co-culture sur cellules d’endomètre autologue (Endocell) en tant que technique visant à améliorer l’efficacité, la reproductibilité et la sécurité des procédés figurant sur la liste.


3. Arrêt du Conseil d’Etat du 30 décembre 2015 (n° 376963) :

Le Conseil d’Etat vient de trancher ainsi qu’il suit :

« 3. La décision par laquelle le ministre des affaires sociales et de la santé a rejeté la demande des Laboratoires Genévrier, à la différence de l’autorisation ou du refus d’autorisation du directeur général de l’Agence de la biomédecine, ne présente pas de caractère réglementaire. Ainsi, l’acte en litige ne relève pas des dispositions du 2° de l’article R. 311-1 du code de justice administrative, qui donnent compétence au Conseil d’Etat pour connaître en premier et dernier ressort des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres. Aucune autre disposition du code de justice administrative ne lui donne compétence pour connaître en premier et dernier ressort des conclusions de la requête.

« 4. Toutefois, par une décision du 30 juin 2014, intervenue postérieurement à l’introduction de la requête, le directeur général de l’Agence de la biomédecine a retiré sa décision du 6 novembre 2013, en vue de procéder à un nouvel examen de la demande d’autorisation de la technique Endocell, développée par la société requérante, en tant que technique visant à améliorer l’efficacité, la reproductibilité et la sécurité des procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation. Dans ces conditions, les conclusions de cette société tendant à l’annulation du refus du ministre chargé de la santé de saisir l’Agence de la biomédecine, en vue d’une révision de la liste des techniques autorisées, a perdu son objet. Il appartient dès lors au Conseil d’Etat, par application de l’article R. 351-4 du code de justice administrative, de constater qu’il n’y a pas lieu de statuer.

« 5. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’etat la somme que la société requérante demande au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions que l’Agence de la biomédecine présente au même titre.
« Décide :

« Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête des Laboratoires Genévrier tendant à l’annulation du refus du ministre chargé de la santé de saisir l’Agence de la biomédecine en vue d’une révision de la liste des techniques visant à améliorer l’efficacité, la reproductibilité et la sécurité des procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation.

« Article 2 : Les conclusions des Laboratoires Genévrier et de l’Agence de la biomédecine présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

« Article 3 : La présente décision sera notifiée aux Laboratoires Genévrier, à l’Agence de la biomédecine et à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. »


Le dossier était à nouveau en cours d’instruction devant l’Agence de biomédecine, mais le Conseil d’Etat, saisi par requêtes des 1er avril et 30 juin 2014, vient seulement de statuer…


Procédure administrative d’inscription :

Le ministre de la santé procède à l’inscription d’un procédé sur la liste susvisée, après avoir consulté l’Agence de biomédecine, qui doit rendre son avis dans le délai de 4 mois, porté à 6 mois si l’Agence l’estime nécessaire (article R. 2141-1-2, CSP). L’avis est accompagné de celui de son conseil d’orientation et du dossier technique présenté.

L’article R. 2141-1-7 du CSP prévoit que, saisi d’une demande d’autorisation d’une technique modifiant un procédé figurant sur la liste AMP, le directeur de l’Agence de biomédecine saisit le conseil d’orientation de l’agence qui se prononce, par avis motivé, sur la nature et sur l’intérêt de la modification proposée au vu du dossier technique.

Si le conseil d’orientation considère que la modification proposée doit être regardée comme un nouveau procédé, le directeur général rejette la demande et peut proposer au ministre de la santé l’inscription du procédé sur la liste.

L’article R. 2141-1-8 oblige le directeur de l’Agence à statuer sur la demande d’autorisation dans un délai de 4 mois. A défaut, la demande est réputée rejetée.

Gynéco-Online - Mars 2016


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AMP Autorisation de procédé

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Quelle « communauté de vie » pour le couple candidat à l’AMP ?
Isabelle Lucas-Baloup
   Avant la réforme intervenue par la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique (c’est-à-dire sous le régime de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004), l’assistance médicale à la procréation (AMP) était encadrée strictement par l’article L. 2141-2 du code de la santé publique (CSP) :

 

 

 

« L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans et consentant préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination. Font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons le décès d’un des membres du couple, le dépôt d’une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l’homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en œuvre l’assistance médicale à la procréation. »

 

 

 

   Depuis la réforme de 2011, la condition de stabilité de 2 ans de vie commune est supprimée dans le nouvel article L. 2141-2 du CSP :

 

 

 

« L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination. Font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons le décès d’un des membres du couple, le dépôt d’une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l’homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en œuvre l’assistance médicale à la procréation.  »

 

 

 

   Dans la hiérarchie des normes, un arrêté ne peut être contraire à la loi. Le problème est que l’arrêté relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’AMP du 11 avril 2008, a été modifié par un arrêté du 3 août 2010, lui-même modifié par un arrêté du 2 juin 2014 (JO n° 134 du 12 juin 2014 page 9778), signé par Monsieur B. Vallet, Directeur Général de la Santé, qui n’a pas pris en considération le préambule de l’annexe qui mentionne donc toujours l’exigence de la « preuve d’une vie commune d’au moins deux ans » et au § II-5 de l’Annexe à l’arrêté l’exigence avant le recours à l’AMP d’un « justificatif du mariage ou tout document apportant les éléments en faveur d’une durée de vie commune d’au moins deux ans ». 

 

   Néanmoins, la loi nouvelle ayant supprimé l’obligation d’être « mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans », ni le gynécologue ni le médecin biologiste n’est en droit d’exiger une preuve supprimée par la réforme de 2011.La déclaration écrite sur l’honneur de l’homme et la femme déclarant vivre en couple suffit sans obligation d’apporter la preuve d’une durée de 2 ans de vie commune. 

 

   En revanche, il est indispensable, pour le gynécologue et le biologiste, de faire signer un formulaire dans lequel l’homme et la femme certifient sur l’honneur : 

 

-        consentir au transfert des embryons ou à l’insémination,

 

-        s’ils sont mariés ensemble : ne pas avoir déposé une requête en divorce ou en séparation de corps,

 

-        s’ils ne sont pas mariés ensemble : déclarer ne pas être mariés avec une autre personne et être actuellement en état de vie commune. 

 

   Les médecins n’ont pas à se convertir en détectives privés pour vérifier la pertinence des déclarations sur l’honneur de l’homme et la femme formant le couple demandeur à l’AMP et n’ont pas non plus à leur imposer une durée minimum de deux ans de vie commune que la dernière loi de bioéthique (2011) a écartée.

 

   Le but est d’éviter un conflit de « présomption de paternité », si la femme ment en déclarant être divorcée alors qu’elle ne l’est pas, mais l’article 314 du code civil écarte cette présomption de paternité avec l’homme n° 1 lorsque l'acte de naissance de l'enfant ne désigne pas celui-ci (« le mari » non divorcé contrairement à la déclaration de la mère), et que l'enfant n'a pas de possession d'état à son égard. Le couple obtenant l’AMP déclarera l’homme n° 2 comme étant le père et non le « mari non divorcé » lequel ne pourra pas établir la « possession d’état » de l’enfant puisqu’il n’existait plus de vie commune avec lui au moment de l’AMP et que l’enfant ne vivra normalement pas (ou alors vous êtes tombés sur une situation vaudevillesque très très compliquée…)  sous son toit. Le risque juridique n’est donc pas exclu si la mère signe une déclaration sur l’honneur frauduleuse, mais c’est aux parties (la mère, le père et le mari qui n’est pas le père) à gérer les effets éventuels de la fraude, pas aux cliniciens et biologistes qui peuvent s’en tenir aux termes de la loi de bioéthique modifiée.

 

   En conclusion, l’article L. 2141-2 n’exige pas « la preuve du divorce » d’avec un autre homme que celui avec lequel la femme constitue aujourd’hui le couple demandeur et qui en atteste par un écrit qui doit être conservé précieusement dans le dossier médical, comme la mention qu’aucun autre obstacle juridique et/ou médical à l’AMP n’est constaté ce qui sera tracé également dans le dossier à archiver.
Gynéco Online - Juillet 2014


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AMP Couple Preuve de la communauté de vie

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Transfert d’embryons et cotations (T2A)
(arrêts du 31 janvier 2012)
Isabelle Lucas-Baloup

Il avait été annoncé, dans cette rubrique (mars 2011) que le Tribunal des affaires de sécurité sociales de Rouen (TASS) avait débouté plusieurs caisses d’assurance maladie de leurs actions en répétition d’indus portant sur la tarification de l’activité de transfert d’embryons.

Les CPAM ont interjeté appel et c’est avec plaisir que nous pouvons aujourd’hui publier les arrêts prononcés par la Chambre de l’urgence et de la sécurité sociale de la Cour d’appel de Rouen, le 31 janvier 2012, ayant à nouveau statué sur la facturation des transferts d’embryons en établissements de santé privés.

Mieux qu’un commentaire, voici un extrait d’un des arrêts concernés (six au total) :

« Sur la facturation des transferts d’embryons :

« Aux termes de l’arrêté du 5 mars 2006, la catégorie de prestations visée au 1° de l’article R. 162-32 du code de la sécurité sociale, donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale est notamment couverte par des forfaits de séjour et de soin dénommés « groupes homogènes de séjours » (GHS) établis selon la classification des groupes homogènes de malades (GHM) fixée par l’arrêté du 31 décembre 2003.

« Lorsque le patient est pris en charge moins d’une journée, à l’exception des cas où il est pris en charge dans un service d’urgence, un GHS ne peut être facturé que dans les cas où sont réalisés des actes qui nécessitent :

- une admission dans une structure d’hospitalisation individualisée mentionnée à l’article D. 6124-301 du code de la santé publique disposant de moyens en locaux, en matériel et en personnel, et notamment des équipements adaptés pour répondre aux risques potentiels des actes réalisés ;

- un environnement respectant les conditions de fonctionnement relatives à la pratique de l’anesthésie ou la prise en charge par une équipe paramédicale et médicale dont la coordination est assurée par un médecin ;

- l’utilisation d’un lit ou d’une place pour une durée nécessaire à la réalisation de l’acte ou justifiée par l’état de santé du patient.

« C’est par des motifs pertinents qui doivent être approuvés que les premiers juges ont relevé que l’activité de transfert d’embryons exige de recourir à une hospitalisation de jour en établissement de santé autorisé à exercer des activités cliniques et assistances médicales à la procréation disposant d’un médecin expérimenté en échographie, d’un anesthésiste-réanimateur et disposant d’une infrastructure autorisant l’entretien des couples avec l’équipe médicale, une pièce destinée au transfert d’embryons, une salle de ponction équipée est située à proximité ou dans un bloc opératoire, des locaux destinés au secrétariat et à l’archivage des dossiers, l’accès individu hospitalisation. Dès lors les conditions nécessaires à la facturation d’un GHS sont remplies pour l’activité de transfert d’embryons.

« Sur la suffisance de ces trois conditions pour facturer un GHS, l’arrêté susvisé précise, d’une part, que des suppléments journaliers peuvent être facturés en sus de ces forfaits et, d’autre part, que lorsque l’une de ces trois conditions dérogatoires n’est pas remplie, la prise en charge du patient donne lieu à facturation de consultations ou actes mentionnés à l’article L. 162-26 du code de la sécurité sociale ou réalisés en médecine de ville.

« Il en résulte donc nécessairement qu’un GHS peut être facturé, dans tous les cas de prise en charge de moins d’une journée nécessitant les conditions ci-dessus spécifiées, lesquelles nécessitent une logistique lourde et particulièrement coûteuse pour la sécurité des patients, ce qui explique précisément les conditions dérogatoires posées par l’arrêté du 5 mars 2006 susvisé.

« Par ces motifs, la Cour […]

« Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 janvier 2011 par le TASS de la Seine Maritime.

« Condamne la CPAM aux dépens ainsi qu’à payer 800 € à la Clinique […] en application de l’article 700 du code de procédure civile. »

Gyneco Online - février 2012
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