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Affaire PIP : responsabilité au titre d’une carence fautive de l’ANSM ? non (Tribunal administratif de Toulon, 22 octobre 2015, n°1302231) 
Luiza Gabour
Le Tribunal administratif de Toulon a jugé qu’une carence fautive de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dans l’exercice de ses missions de police sanitaire peut engager la responsabilité de l’Etat, sans toutefois la retenir dans cette affaire. En l’espèce, la requérante reprochait à l’Agence, d'une part, de s'être contentée de la remontée d'informations dans le cadre de la matériovigilance prévue à l'article L. 5212-2 du code de la santé publique, sans organiser des vérifications appropriées sur la société PIP et, d'autre part, de ne pas avoir tenu compte de différents signaux d'alerte. Le Tribunal administratif écarte ces arguments en considérant qu'à la date où la victime s'est fait implanter les prothèses, l'Agence ne disposait pas d'informations propres à éveiller le soupçon d'une fraude qui auraient requis la mise en place de contrôles inopinés et renforcés de sa part. La Lettre du Cabinet - Janvier 2016


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Déremboursement des pilules de 3è génération
Isabelle Lucas-Baloup

Publié au Journal Officiel du 6 mars 2013, l’arrêté du 28 février 2013 du ministre des affaires sociales et de la santé radie, à compter du 31 mars 2013, de la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux, les 48 présentations de pilules oestroprogestatives de 3ème génération contenant du gestodène ou du désogestrel, jusqu’ici remboursées (cf. www.legifrance.gouv.fr).

Cet arrêté fait suite notamment à la position adoptée par :

- l’Agence Nationale de Sécurité des Médicaments (ANSM, qui a succédé à l’AFSSAPS),

- la Haute Autorité de Santé qui a publié, en juin 2012, une réévaluation des contraceptifs oraux de 3ème génération effectuée par sa Commission de la transparence concluant :

« En 2012, la Commission de la transparence prenant en compte d’une part le surrisque d’événements thromboemboliques veineux et d’autre part l’absence d’avantage démontré en termes de tolérance clinique pour les femmes exposées aux contraceptifs oraux de 3ème génération par rapport aux contraceptifs oraux de 2ème ou de 1ère génération, considère que le service médical rendu par ces spécialités doit être qualifié d’insuffisant pour une prise en charge par la solidarité nationale. »

Une fiche de bon usage destinée aux professionnels de santé a été diffusée par la HAS en collaboration avec l’ANSM, mentionnant notamment :

« Tous les contraceptifs estroprogestatifs (COEP) sont associés à une augmentation du risque d’accident thromboembolique artériel ou veineux. Avant leur prescription, il est indispensable de rechercher des facteurs de risque thromboembolique personnels ou familiaux. Chez les femmes ayant des facteurs de risque constituant une contre-indication, un autre mode de contraception devra être proposé.

« Les COEP dits de 3ème génération (C3G, contenant du désogestrel, du gestodène ou du norgestimate) exposent les femmes à un surrisque d’accident thromboembolique veineux par rapport aux COEP dits de 1re ou 2ème génération (C1G ou C2G).

« Aucune étude n’a démontré que les C3G apportaient un bénéfice supplémentaire par rapport aux C1G/C2G sur les effets indésirables comme l’acné, la prise de poids, les nausées, les mastodynies, la dysménorrhée, l’aménorrhée et les ménométrorragies.

« Du fait de leur moindre risque thromboembolique veineux pour une efficacité comparable, la HAS considère que les contraceptifs oraux de 1ère ou de 2ème génération doivent être préférés à ceux de 3ème génération. »

Dans son dossier thématique intitulé « Pilules estroprogestatives et risque thrombotique » (cf. http://ansm.sante.fr/Dossiers-thematiques), l’ANSM précise :

« Qu’en est-il des pilules comportant un progestatif seul comme Cérazette (désogestrel) ou Microval (lévonorgestrel) ? Les données montrant un surrisque thromboembolique veineux ou artériel ne concernent que les contraceptifs oraux qui contiennent à la fois un estrogène et un progestatif (appelés contraceptifs oraux combinés (COC) ou pilules estroprogestatives ou encore pilules combinées). Les pilules comportant un progestatif seul telles que Cérazette (désogestrel) ou Microval (lévonorgestrel) ne font pas partie des pilules entraînant ce surrisque. »


Les pilules radiées de la liste des médicaments pris en charge par les caisses d’assurance maladie peuvent-elles être encore prescrites ?

Oui, mais avec une double obligation renforcée à la charge du médecin prescripteur :

- d’évaluer le bénéfice/risque spécifique compte tenu des publications à sa disposition (cf. notamment, pour des données chiffrées, l’estimation du nombre de cas d’accidents thromboemboliques veineux attribuables aux contraceptifs oraux combinés en France entre 2000 et 2011 publiée par l’ANSM sur son site web le 26 mars 2013) et de l’état de la patiente. Il veillera ainsi notamment au respect de : 

- l’article L. 1110-5 du code de la santé publique :

« Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. […] »

- l’article R. 4127-40 du même code :

« Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié. »

 

- l’article R. 4127-8 du même code :

« Dans les limites fixées par la loi, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance.
« Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins.
« Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles. »

- d’informer tout spécialement la patiente sur le surrisque encouru, en respectant ainsi les dispositions ci-après : 

- l’article L. 1111-2 du code de la santé publique :

« Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé.
« Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité de la retrouver.
« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser.
« Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel. […]
En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter la preuve que l’information a été délivrée l’intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être rapportée par tout moyen.» 

- l’article L. 1111-3 du même code :

« […] Les professionnels de santé d’exercice libéral ainsi que les professionnels de santé exerçant en centres de santé doivent avant l’exécution d’un acte, informer le patient de son coût et des conditions de son remboursement par les régimes obligatoires d’assurance maladie. » 

- l’article L. 1111-4 du même code :

« […] Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. […] 

- l’article R. 4126-35 du même code :

« Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. »

Enfin, il est rappelé que c’est une obligation pour le médecin de choisir, à qualités égales, le traitement le moins cher, en application de : 

- l’article L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale :

« Les médecins sont tenus, dans tous les actes et prescriptions, d’observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins. »

En conclusion, les pilules de 3ème génération peuvent encore être prescrites, mais le médecin devra diligenter une toute particulière vigilance au respect formel de ses obligations légales et réglementaires, notamment celles qui viennent d’être rappelées.

Gynéco Online - Avril 2013
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