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Parution du décret fixant la liste des activités de soins et des équipements matériels lourds soumis à autorisation
Bruno Lorit

Est paru au Journal Officiel du 28 novembre 2004 le décret n° 2004-1289 du 26 novembre 2004 relatif à la liste des activités de soins et des équipements matériels lourds soumis à autorisation en application de l'article L. 6122-1 du code de la santé publique et modifiant ce code.
Ce décret constitue un des textes d'application majeurs de l'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 réformant l'organisation de la planification sanitaire et, plus particulièrement, le régime des autorisations hospitalières portant désormais sur des activités et équipements figurant sur la liste arrêtée par le décret du 26 novembre 2004, codifié à l'article R. 712-37-1 du code de la santé publique.
Ce texte comporte des innovations importantes :

Disparition de la carte sanitaire et de la notion de discipline :
En premier lieu, et contrairement aux dispositions anciennes de l'article R. 712-2 du code de la santé publique établissant la liste des installations, équipements et activités régis par la carte sanitaire, le nouvel article R. 712-37-1 du code de la santé publique tire les conséquences de la suppression, par l'ordonnance du 4 septembre 2003, de la carte sanitaire en se bornant à fixer une liste d'activités de soins et d'équipements soumis à autorisation.
Est également abrogée la notion d'"installations" correspondant à des "disciplines" ou "groupes de disciplines" telle que prévue par l'ancien article R. 712-2 du code de la santé publique puisque le décret du 26 novembre 2004 ne vise désormais plus que des "activités de soins", d'une part, et des "équipements matériels lourds", d'autre part.
Néanmoins, la portée de ce changement doit être relativisée dans la mesure où la quasi-intégralité des disciplines prévues par l'article R. 712-2 du code de la santé publique sont reprises dans la nouvelle liste des activités de soins (médecine, chirurgie, psychiatrie, etc.)
Ceci observé, la liste des activités de soins et équipements lourds connaît des modifications substantielles.

Activité de soins et équipements lourds :
Sont ainsi supprimés, dans la catégorie des activités de soins :
- l'utilisation thérapeutique de radioéléments en sources non scellées,
- le traitement des affections cancéreuses par rayonnements ionisants de haute énergie.
Apparaissent, en revanche :
- les activités interventionnelles par voie endovasculaire en neuroradiologie,
- les activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie,
- le traitement du cancer.
S'agissant des équipements matériels lourds, n'ont pas été repris dans la liste du nouveau décret :
- les appareils de circulation sanguine extracorporelle,
- les appareils destinés à la séparation in vivo des éléments figurés du sang,
- les appareils de dialyse, à l'exception de ceux utilisés pour la dialyse péritonéale,
- les appareils de sériographie à cadence rapide et appareils d'angiographie numérisée,
- les appareils accélérateurs de particules et les appareils contenant des sources scellées de radioéléments d'activité minimale supérieure à 500 curies et émettant un rayonnement d'énergie supérieur à 500 KeV,
- les compteurs de la radioactivité totale du corps humain,
- les appareils de destruction transpariétale des calculs.
Que penser de ces modifications ?

Réforme contrastée :
En premier lieu, certaines d'entre elles procèdent d'une volonté louable de simplification et d'actualisation. Ainsi, la création d'une activité de soins unique de "gynécologie-obstétrique, néonatalogie, réanimation néonatale" évitera aux
établissements de santé d'avoir à solliciter une autorisation dans la discipline de gynécologie-obstétrique, d'une part, et au titre de l'activité de soins d'obstétrique, néonatalogie, réanimation néonatale, d'autre part, au motif que cette dernière activité doit être réalisée dans des lits de gynécologie-obstétrique.
Par ailleurs, le décret du 26 novembre 2004 prend acte du développement de la radiologie vasculaire et de l'imagerie interventionnelle en créant deux nouvelles activités de soins interventionnelles sous imagerie médicale par voie endovasculaire en cardiologie et interventionnelles par voie endovasculaire en neuroradiologie.
En revanche, certaines modifications apportées par le décret du 26 novembre 2004 à la liste des activités et équipements ne manquent pas de surprendre :
Certains équipements matériels lourds sont retirés de la liste et donc soustraits au régime des autorisations hospitalières sans être, par ailleurs, visés au titre de l'activité de soins correspondante (appareil de destruction transpariétale des calculs par exemple).
A l'heure de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, le retrait de la liste d'équipements matériels lourds tels les lithotripteurs, et, partant leur développement hors planification sanitaire, s'accompagnera-t-il d'un refus de prise en charge des actes par l'assurance maladie ? Le risque n'est pas impossible !
En outre, la suppression d'un équipement matériel lourd utilisé dans le cadre d'une activité de soins soumise à autorisation (appareils d'angiographie numérisée et activité interventionnelle par voie endovasculaire en cardiologie) contraindra-t-elle l'Agence Régionale de l'Hospitalisation à instruire le dossier sans prendre en considération l'existence ou l'absence de l'équipement matériel lourd sans lequel l'activité de soins ne peut être exercée ?
Mais surtout, la principale innovation consiste en la création d'une activité de soins "traitement du cancer" en remplacement des accélérateurs de particules et appareils contenant des sources scellées de radioéléments ainsi que de l'activité de traitement des affections cancéreuses par rayonnements ionisants de haute énergie. Le caractère extrêmement général et global de l'activité de traitement du cancer pourrait poser problème dans l'hypothèse d'une demande d'autorisation portant seulement sur une technique particulière de traitement du cancer (chimiothérapie ambulatoire par exemple).
L'établissement devra-t-il, dans cette hypothèse, déposer un dossier de demande d'autorisation d'activité de traitement du cancer ou simplement d'autorisation d'une structure d'activité de soins en médecine, au titre de la chimiothérapie ambulatoire ?
Par ailleurs, l'Agence Régionale de l'Hospitalisation ne sera-t-elle pas fondée dans cette hypothèse à invoquer le caractère indivisible de l'activité de traitement du cancer et exiger de l'établissement qu'il exerce dans cette matière une activité pluridisciplinaire (chirurgie et médecine cancérologique, radiothérapie, etc.) ?
Il convient donc, pour apprécier la portée des changements opérés par le décret, d'attendre la publication des circulaires .

Dispositions transitoires :
Le décret du 26 novembre 2004 prévoit deux séries de dispositions transitoires qu'il convient de mentionner en raison, d'une part, de l'importance des modifications apportées par ce texte à l'actuel régime des autorisations hospitalières et, d'autre part, des problèmes que ne manquera pas de poser l'entrée en vigueur du nouveau dispositif en fonction du degré de rapidité de la publication des décrets d'application.
En premier lieu, l'article R. 712-2 du code de la santé publique, bien qu'abrogé, régissant les disciplines, équipements et activités de soins actuellement soumis à autorisation restera en vigueur jusqu'à la publication des schémas d'organisation sanitaire applicables aux activités de soins et équipements régis par le décret et, en l'absence de publication de tels schémas, au plus tard pendant un délai de deux ans à compter de la publication de l'ordonnance du 4 septembre 2003, c'est-à-dire jusqu'au 6 septembre 2005.
Mais surtout, un régime transitoire destiné à faire progressivement disparaître les autorisations délivrées sur le fondement de l'article R. 712-2 du code de la santé publique a été prévu.
Ainsi, lorsque l'autorisation arrive à expiration au cours d'une période comprise entre la date de publication du décret du 26 novembre 2004 et la date de publication du schéma d'organisation sanitaire correspondant ou, à défaut, le 6 septembre 2005, l'autorisation est prorogée de quatorze mois à partir de la fin de ladite période.
En outre, si l'autorisation arrive à expiration dans un délai de deux ans commençant à courir à la date de publication du schéma d'organisation sanitaire correspondant ou, à défaut, à compter du 6 septembre 2005, sa durée de validité est prorogée de quatorze mois à partir de sa date d'expiration.
Rien n'est, en revanche, prévu en ce qui concerne les autorisations qui arriveraient à échéance postérieurement à la période de deux ans visée supra.
Malgré ces dispositions, sont à craindre des conflits de réglementation dans le temps puisque l'absence de publication simultanée de l'ensemble des décrets d'application de l'ordonnance du 4 septembre 2003 laissera subsister d'anciennes dispositions réglementaires plus ou moins compatibles avec les nouveaux principes arrêtés par l'ordonnance.

La Lettre du Cabinet - Janvier 2005


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