Une GO, le Dr C., est titulaire d’un contrat de gynécologie-obstétrique, cessible, avec usage prioritaire de quatre lits et interdiction pour la Clinique S.-G. de laisser d’autres praticiens de la même spécialité venir exercer dans l’établissement, à l’exception de 3 nommés, qui constituent ultérieurement une SCP. Le contrat prévoit que lorsqu’elle cessera son exercice, elle peut présenter deux successeurs dans un délai de 6 mois, et, si la Clinique n’en agrée aucun, elle doit à son tour présenter au praticien 2 successeurs dans les 6 mois. Le Dr C. ne présente finalement personne à la Clinique, mais réclame le prix de cession « de ses 4 lits de gynécologie-obstétrique » que la Clinique concède après le départ du Dr C. à la SCP. Contrairement au jugement du tribunal de Brive qu’elle annule, la Cour de Limoges retient qu’il n’est pas établi que le Dr C. ait effectivement présenté deux successeurs à la Clinique S.-G. dans le délai prévu de 6 mois. « Que dès lors elle a perdu tout droit sur l’usage prioritaire de 4 lits de GO et n’est pas fondée à se plaindre de ce que cet usage prioritaire aurait été ultérieurement accordé à la SCP ». Le Dr C. affirme que c’est la SCP qui lui a demandé de ne pas céder son droit d’usage prioritaire afin de lui permettre de prendre un nouvel associé. « Que si ce fait est de nature à engager la responsabilité délictuelle de la SCP, encore faut-il que la preuve en soit rapportée car il est expressément contesté par celle-ci. […] Attendu que le silence opposé à l’affirmation d’un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait. » Le Dr C. est déclarée mal fondée et déboutée.
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Associés Clinique Contrat d'exercice libéral Gynécologie obstétrique Lits Prix de cession Successeurs
Les dispositions d'ordre public relatives à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, notamment l'article 2 de la loi du 31 décembre 1990, imposent l'emploi dans chaque document ou correspondance émanant de la SEL de la mention de sa forme juridique, ou de l'abréviation "SELARL" par exemple, du capital social ainsi que de sa qualité.
Un associé qui signe un contrat de fourniture en utilisant son tampon personnel qui indique seulement ses nom, prénom, profession et adresse, sans faire état de sa qualité de membre de la SEL et sans indiquer l'adresse du siège, ne peut faire profiter la SEL de ce contrat, en application de l'article 1165 du code civil ("Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121", 1121 = stipulation pour autrui). La SEL était donc un tiers par rapport à la convention en cause, dont elle ne pouvait profiter puisqu'aucune stipulation à son profit n'avait été convenue.
Je rappelle cette jurisprudence de 2002 en raison du nombre important de médecins qui nous consultent parce qu'ils considèrent notamment que leur contrat d'exercice libéral, signé individuellement avec la clinique avant la constitution de leur société, serait opposable à l'établissement. Si certains d'entre vous lisent régulièrement La Lettre du Cabinet, vous vous souviendrez peut-être de mon précédent commentaire sur ce sujet dans celle de décembre 2004 (p. 5, arrêt de la cour d'appel de Lyon du 8 janvier 2004, sous le titre "Le contrat avec un urgentiste ne bénéficie pas à sa SEL").
De telles situations doivent être organisées juridiquement, par la signature d'un nouveau contrat, ou par un acte de cession de contrat signé à la fois des praticiens individuels qui cèdent, de la SEL cessionnaire et de la clinique. Un acte seulement adopté entre les médecins titulaires et la SEL n'est pas opposable à la clinique si elle n'en a pas été dûment informée et si elle n'y a pas consenti soit expressément, soit implicitement mais d'une façon non équivoque. En tout état de cause, respectez les dispositions contractuelles d'origine qui font la loi des parties (article 1134, code civil : "Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi").
Si les médecins établissent que la clinique connaissait parfaitement l'existence de la SEL, un contrat verbal peut s'être instauré entre la société et la clinique, dont le contenu n'est pas ipso facto celui des contrats dont étaient titulaires les médecins membres de la SEL.
Les magistrats examinent au cas par cas les actes judiciaires et extra-judiciaires, les notifications, les lettres simples ou recommandées et leurs réponses ou absence de réponse, la bonne ou la mauvaise foi des parties en cause et la façon dont elles se sont comportées à l'occasion de l'exécution de leurs prestations respectives.
Ordonnance du 26 août 2005 : Cette ordonnance (n° 2005-1040), qui comporte diverses mesures relatives à l'organisation des professions de santé (cf. commentaires de Bruno Lorit dans cette Lettre), ajoute à la rédaction habituelle de l'article L. 4113-9 du code de la santé publique, qui impose la communication des contrats des médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes (ce qui est nouveau) au conseil départemental de l'ordre dont ils relèvent, ayant pour objet leur exercice ou qui concerne leur matériel ou leurs locaux, la même obligation lorsqu'ils exercent en société, c'est-à-dire, précise le texte "outre les statuts de cette société et leurs avenants les conventions et avenants relatifs à son fonctionnement ou aux rapports entre associés. Ces communications doivent être faites dans le mois suivant la conclusion de la convention ou de l'avenant." (cf. JO du 27 août 2005).
La SAS est caractérisée par la mise en œuvre du principe de liberté contractuelle et les rédacteurs de statuts ne se privent pas de concentrer tous les pouvoirs entre les mains des fondateurs qui le leur demande... Bien évidemment, après les excès rédactionnels, on rencontre les contentieux !
Dans l’affaire concernée, les Hauts magistrats cassent l’arrêt des juges de Douai qui avaient validé l’exclusion par deux associés minoritaires d’un associé majoritaire, lequel n’avait pas été appelé à délibérer sur cette mesure qui le visait, ce qu’autorisaient les statuts. Bien évidemment, faire voter un associé majoritaire sur l’opportunité de sa propre exclusion est le plus sûr moyen de priver la délibération de toute chance d’être adoptée. La Cour de cassation protège ainsi le droit de vote des associés, prévu à l’article 1844 alinéa 1er du code civil (tout associé a le droit de participer aux décisions collectives), ce qui avait été déjà jugé dans une célèbre affaire Château Yquem en 1999, au détriment de la liberté statutaire en vigueur au sein des sociétés par actions simplifiées (cf. sur ce point le très intéressant commentaire du Professeur Dominique Bureau, JCP, E.G., Jurisprudence II, 10197, n° 48, 28 novembre 2007).
Si, dans une SAS, les clauses statutaires d’exclusion « ne peuvent être adoptées ou modifiées qu’à l’unanimité des associés » (article L. 227-19, code de commerce), il ne résulte pas de l’article L. 227-9 que la décision d’exclusion doive être impérativement décidée en assemblée. D’autres solutions sont donc possibles pour atteindre un tel résultat et éviter l’annulation ultérieure d’une délibération, et ses suites, après plusieurs années de procès...
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Associés Droit de vote Exclusion d'un associé Société par actions simplifiée (SAS)
La loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 dite de « simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés », comme avant elle la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, dite loi PACTE, et trois jurisprudences récentes méritent quelques commentaires susceptibles d’intéresser les professionnels de santé associés voulant exclure un d’entre eux ou au contraire objet d’une délibération ayant pour objet leur exclusion de la société :
Les sociétés d’exercice libéral entre professionnels de santé adoptent le plus souvent le statut de SELARL (SEL à responsabilité limitée) ou de SELAS (SEL par actions simplifiée). Au regard du régime juridique applicable, se cumulent alors le droit commun des sociétés d’exercice libéral dans ses conditions générales, imposées par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 et ses décrets d’application aux professions de santé : articles R. 4113-1 et suivants pour les médecins, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes, d’une part, et d’autre part avec le droit commun des SARL (articles L. 223-1 et suivants du code de commerce ou des SAS (articles L.227-1 et suivants du code de commerce), outre les dispositions générales du code civil applicables à toutes sociétés (articles 1832 et suivants du code civil), si bien que certaines dispositions s’avèrent protéiformes et, par voie de conséquence, font l’objet de difficultés pratiques majeures et de jurisprudences différentes selon les chambres, civiles ou commerciales, saisies du contentieux entre associés. Les clauses d’exclusion constituent l’illustration d’une combinaison de textes pas toujours facile à gérer en toute sécurité :
Article 1844 du code civil :
Le premier alinéa de l’article 1844 du code civil, applicable à toutes les sociétés, pose un principe fondamental : « Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives », auquel les statuts ne peuvent déroger (même article, 4ème alinéa). Dès lors, un associé dont l’exclusion est inscrite à l’ordre du jour d’une décision collective doit voter.
Jurisprudence déclarant « non écrite » une disposition statutaire privant un associé de son droit de vote :
Depuis 2007, la chambre commerciale de la Cour de cassation interdit que les statuts d’une SAS privent l’associé dont l’exclusion est proposée de son droit de participer à cette décision et de voter sur la proposition (arrêt du 23 octobre 2007, n° 06-16.537).
Par un arrêt du 6 mai 2014, la même chambre commerciale de la Cour de cassation a, au visa de l’article 1844-10, alinéa 2 du code civil, considéré qu’un article des statuts de SAS prévoyant que l’associé menacé d’exclusion ne vote pas et que les calculs de quorum et de majorité ne prennent pas en considération le voix dont il dispose, doit être « réputé non écrit », dès lors l’exclusion intervenue en vertu d’un tel article est nulle « peu important que l’associé ait été admis à prendre part au vote » (arrêt du 6 mai 2014, n° 13-14.960).
En exécution de cette jurisprudence, l’exclusion est nulle en présence de statuts privant l’associé de voter sur sa propre exclusion, même si finalement ses associés l’ont autorisé à voter malgré les statuts.
Article R. 4113-16 du code de la santé publique :
La loi du n° 90-1258 du 31 décembre 1990 sur les SEL ne prévoit pas de disposition spécifique concernant l’exclusion d’un associé. En revanche le décret d’application aux médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, codifié à l’article R. 4113-16 du CSP, dispose :
« L’associé exerçant au sein d’une société d’exercice libéral de médecins, de chirurgiens-dentistes ou de sages-femmes peut en être exclu :
1° lorsqu’il est frappé d’une mesure disciplinaire entraînant une interdiction d’exercice ou de dispenser des soins aux assurés sociaux, égale ou supérieure à trois mois ;
2° lorsqu’il contrevient aux règles de fonctionnement de la société.
Cette exclusion est décidée par les associés statuant à la majorité renforcée prévue par les statuts, calculée en excluant, outre l’intéressé, les associés ayant fait l’objet d’une sanction pour les mêmes faits ou pour des faits connexes, l’unanimité des autres associés exerçant au sein de la société et habilités à se prononcer en l’espèce devant être recueillie. […] »
Le Conseil national de l’Ordre des médecins a approuvé, en session plénière du 17 juin 2011, un guide et des statuts types de SELARL de médecins, dont certains articles sont assortis d’un signalement (E) que le CNOM explique ainsi : « Le signe (E) renvoie aux clauses essentielles que les statuts doivent obligatoirement comporter conformément à la délibération du CNOM en date du 7 avril 2011. Les clauses en marge desquelles figure la lettre E sont considérées comme des clauses essentielles (article 91 du code de déontologie médicale) soit qu’elles résultent des dispositions impératives du code civil et du code de commerce, soit qu’elles résultent de principes déontologiques fondamentaux. Il ne peut donc y être dérogé. »
Il ne peut donc être dérogé, au moment de la rédaction des statuts, à des clauses déclarées illégales par la Cour de cassation et il est fréquent que des Conseils départementaux refusent l’enregistrement de statuts de SEL dont l’auteur a corrigé les dispositions illégales des statuts types publiés par le CNOM.
Lois des 22 mai et 19 juillet 2019 :
La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (dite « loi PACTE ») a modifié l’article 1844-10 du code civil, dont le 2ème alinéa est dorénavant rédigé ainsi qu’il suit : « Toute clause statutaire contraire à une disposition impérative du présent titre dont la violation n’est pas sanctionnée par la nullité de la société, est réputée non écrite », ce qui renforce s’il en était besoin la portée de l’arrêt du 6 mai 2014 évoqué ci-dessus.
La loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 a quant elle prévu, entre autres dispositions, la suppression de l’obligation de vote prévue à l’article L. 227-16 du code de commerce impliquant qu’une clause d’exclusion ne peut être modifiée qu’à l’unanimité des associés dans une SAS (donc dans une SELAS). Depuis la loi du 19 juillet 2019, la règle de l’unanimité n’est plus obligatoire. Mais comment modifier les statuts antérieurs d’une rédaction contraire, qui souvent ont pris en considération l’ancien article L. 227-16 en prévoyant que la modification des règles d’exclusion doit être votée elle-même à l’unanimité ?
On sait qu’un associé se sentant, à tort ou à raison, marginalisé, ne votera pas favorablement à une telle modification des statuts donnant à ses confrères plus de facilité à l’exclure ultérieurement.
SCM et exclusion :
(arrêt du 24 octobre 2018, Cassation ch. com., n° 17-26.402)
Les statuts types de société civile de moyens publiés pendant de nombreuses années sur le site du CNOM, et par voie de conséquence recopiés à des centaines d’exemplaires par les professionnels de santé mettant en commun des locaux, des matériels et/ou du personnel salarié, contenaient un article illégal prévoyant que les voix de l’associé menacé d’exclusion n’étaient pas prises en compte à l’occasion du vote de la délibération en assemblée générale, en violation avec l’article 1844 1er alinéa du code civil, applicable aux SCM.
Dans une SCM entre ophtalmologistes, il était prévu qu’à partir de trois associés « l’assemblée générale statuant à l’unanimité des voix moins les voix de l’associé mis en cause peut, sur proposition de tout associé, exclure tout membre de la SCM » pour les causes précisées dans l’article. En application des statuts, un médecin associé était exclu par les trois autres disposant de 82,5% des voix, alors qu’il avait pu lui-même voter à l’encontre de la délibération prévoyant son exclusion. L’associé exclu avait attaqué la délibération, en soutenant que l’article des statuts permettant de voter sans prendre en considération ses voix devait être considéré comme non écrit et son exclusion annulée.
La Cour de cassation retient au contraire dans cet arrêt, nonobstant la rédaction malencontreuse des statuts, que l’associé avait pu prendre part au vote de la délibération décidant son exclusion, sans violer dès lors l’article 1844 alinéa 1er.
Le CNOM a modifié les statuts types de SCM depuis 2016, mais souvent les statuts n’ont pas été corrigés depuis et le problème se rencontre encore. Les associés auraient intérêt à rectifier la rédaction illégale avant qu’elle soit mise en œuvre en situation de crise, c’est-à-dire quand l’exclusion d’un associé est envisagée.
La Lettre du Cabinet - Décembre 2019
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Associés Exclusion d'un associé
Un radiologue membre d’une société civile professionnelle est malade pendant plus de huit mois, ce qui permet, d’après les statuts, à ses associés de le mettre en demeure de céder ses parts ou de se retirer de la SCP. Une offre de rachat lui est notifiée, laquelle est refusée. L’associé assigne alors la SCP en rachat de ses parts et subsidiairement en paiement d’une provision à valoir sur le prix. La Cour d’appel de Nîmes avait entériné l’évaluation faite par une précédente assemblée générale des associés fixant, comme il est prévu aux statuts, la valeur unitaire des parts.
La Cour de cassation annule cette décision et juge « qu’en cas de refus, par le retrayant, du prix proposé pour la cession ou le rachat de ses parts, la valeur au jour du retrait en est fixée par le juge après expertise selon la procédure particulière et impérative prévue à cet effet » par l’article 1843-4 du code civil.
Cette position est regrettable pour ses effets en pratique : très souvent les experts nommés ne sont pas rompus à l’évaluation des cabinets médicaux, qui doit tenir compte d’éléments propres à la spécialité, à la concurrence locale, à la réputation du cabinet, aux conventions qu’il a passées avec divers autres acteurs, à la démographie médicale au moment de la cession etc. Si bien que la valeur déterminée par expertise s’éloigne souvent de la valeur vénale, c’est-à-dire celle qu’un candidat à la succession est réellement prêt à payer.
On sait, contrairement aux juges parfois, que beaucoup de patientèles ne trouvent pas de repreneurs à titre onéreux. Est-il légitime et équitable de faire payer aux associés restants des prix excessifs, alors qu’ils ne trouveront pas plus de candidat pour le retrayant que pour eux-mêmes ultérieurement ? Dans certains cas, certains cabinets, certains statuts… il faut mieux être le premier que le dernier à quitter la SCP ! Conclusion : on ne doit y entrer que prudemment.
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Associés Cession Cession de parts Patientèle Radiologue SCP